Le Visiteur du Futur : voilà ce qui va se passer dans cette critique

Mathieu Jaborska | 7 septembre 2022 - MAJ : 05/10/2022 16:43
Mathieu Jaborska | 7 septembre 2022 - MAJ : 05/10/2022 16:43

En 2009, François Descraques, son frère Raphaël et son ami Florent Dorin tournent pour Dailymotion et leur site Frenchnerd trois épisodes de web-série fauchés d'à peine plus de 2 minutes chacun. Treize ans et quatre saisons plus tard, Le Visiteur du Futur débarque au cinéma, fort d'une longue tournée d'avant-premières dans toute la France. 

Le visiteur du passé

Avouons-le tout de go : l'accomplissement que représente Le Visiteur du futur donne forcément envie de le soutenir, malgré ses défauts. François Descraques le confesse volontiers dans un entretien passionnant au Point : malgré le succès d'estime de la web-série, qui a su se trouver des financements et gagner en ampleur sans perdre de son authenticité, il n'a rencontré que des portes fermées. Là où Kaamelott : Premier volet est le produit d'une grosse licence télévisuelle, son oeuvre reste en marge du système bien rôdé de l'industrie française, ayant en prime l'audace de lorgner sur la science-fiction américaine, voire sur le gros post-apo à la Terminator.

Son acharnement impose le respect et le démarque d'emblée des films de youtubeurs opportunistes qui ont pollué les multiplexes à de rares occasions (vous vous rappelez de Pas Très Normales Activités et Le Manoir ? Nous non plus). Descraques et son équipe cherchent moins à capitaliser sur leur toute relative célébrité qu'à décliner et remanier leur univers pour le rendre plus accessible encore, sans néanmoins sacrifier ses fondations. À savoir le système D et la passion.

 

Le visiteur du futur : photoLe T-800 n’a pas trop de soucis à se faire

 

Le Visiteur du Futur est une web-série adaptée sur grand écran. Ni la facture technique ni la direction d'acteur ne font illusion, ni la facture technique ni la direction d'acteurs ne prétendent faire illusion, pour être plus précis. Dès l'apparition du fameux visiteur, campé par un Florent Dorin aussi investi qu'à l'accoutumée, le long-métrage assume son décalage, à rebours de l'académisme esthétique des grosses productions du moment. Le film brandit fièrement ses ambitions sans jamais revendiquer la fausse minutie des simili-blockbusters américains, laissant apparentes ses coutures, coutures qui font en fait sa réussite.

Les décors trahissant les limites du budget et le jeu très spontané des comédiens, plutôt que de plomber le récit, renvoient à la modestie, à l'inventivité attendrissante des débuts de YouTube, à l'époque où la plateforme et son économie n'avaient pas encore enseveli ses créateurs les plus talentueux sous des mégatonnes de contenus désincarnés. Eh oui, rassurez-vous : le duo McFly et Carlito fait juste office de caméo obligatoire, le temps d'une scène qui rappelle avec une pointe de cynisme les évolutions du médium.

 

Le visiteur du futur : photo Carlito"Et si on appelait Macron ?"

 

Bien évidemment, le budget plus conséquent a permis à la bande de revoir ses ambitions à la hausse, que ce soit en termes de production design ou d'effets spéciaux. Le film se permet des plans assez spectaculaires, dont la série n'aurait jamais osé rêver. Mais il peut se targuer de ne pas avoir pour autant abandonné une forme de pureté, de relation directe à son public que les longs-métrages institutionnels sont incapables d'atteindre, peu importe le nombre d'icônes du PAF employées.

 

Le visiteur du futur : photoUne scène tournée à Dunkerque, économisant des effets spéciaux

 

Les Couloirs du temps

Voilà pourquoi l'avalanche de blagues et de gags qui parsèment ses 104 minutes, parfois aléatoires, arrache des sourires, voire quelques rires (sauf pour les Belges, peut-être) : la dynamique entre Florent Dorin, Raphaël Descraques, Slimane-Baptiste BerhounMathieu Poggi et Lénie Chérino, datant de 2009 quand même, est bien réelle. Il faudra en revanche plus de temps pour s'habituer à la présence d'Arnaud Ducret et Enya Baroux, représentants d'un cinéma plus conventionnel, invités pour créer de nouveaux enjeux.

François Descraques cherche certes à prolonger non pas la web-série, mais l'intégralité de l'univers du Visiteur du Futur puisqu'il emprunte aussi très largement au roman La Meute. Toutefois, il compte bien également livrer un divertissement familial, universel, qui séduira les cinéphiles de tous poils, qu'ils soient familiers ou non de la saga. Nos héros rencontrent donc Gilbert, homme politique sur le point de faire de grosses bêtises, et Alice, activiste déterminée à l'en empêcher. L'occasion de recycler la fameuse formule "Voilà ce qui va se passer", qui avait débuté la série, à une échelle bien plus importante, tout en introduisant un tout nouvel arc narratif.

 

Le visiteur du futur : photo Arnaud Ducret, Enya BarouxPikachu face.jpeg

 

Leur histoire fait office de fil rouge un peu balourd sur les bords, qui prend soin d'emmener les différents protagonistes dans les divers endroits obligatoires, du bar post-apo au repaire de la brigade du temps, en passant par le Terrier de la meute, avec comme prétexte une thématique écologique qui passe du pastiche (la première saison) au sérieux, années 2020 obligent. Une idée intéressante, à la cohérence et à la subtilité néanmoins malmenées par les autres impératifs du scénario, a fortiori vers la fin, qui embrasse de fait les paradoxes temporels avec moins d'ironie que dans la série.

Le numéro d'équilibriste mine de rien assez risqué auquel se livrent les vétérans de feu Dailymotion (comment ça, ça existe encore ?) est donc plus que périlleux. Et ils s'en sortent avec les honneurs, non sans quelques difficultés. Pas exempt de défauts, Le Visiteur du futur devrait sans mal convaincre les inconditionnels. Reste à voir si ses indéniables qualités toucheront le grand public, qui a bien besoin qu'on lui prouve qu'on peut investir les salles obscures sans essayer de la lui faire à l'envers.

 

Le visiteur du futur : Affiche française

Résumé

Malgré ses évidentes imperfections, la singularité et l'authenticité du Visiteur du Futur l'emportent largement.

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commentaires
Trac
03/01/2023 à 15:15

A tout les nazes qui critiquent dans les commentaires sachez que la web-série visiteur du futur est une oeuvre culte pour beaucoup et que ces petit gars viennent de loin et qu'il faut encourager ce genre de mecs qui ont tout fait tout seul car les producteurs français ne veulent jamais miser un euro sur eux . J'étais là pour le premier épisode en 2009 et je suis là pour le film c'est un parcours incroyable dont t'ils peuvent être fier . Toujours à descendre le peux de qualité qu'ont a en France le peu de gens qui se battent pour faire exister le cinéma de genre . Tfouuu les commentaires dans se site toujours les mêmes a vomir

Flo
13/09/2022 à 13:17

Alors tu nous racontes, Descraques ?

En 2009, alors que la série culte « Kaamelott » s’arrêtait et que Alexandre Astier produisait quelques dérivés bd en attendant un hypothétique film, « Le Visiteur du Futur » prenait en quelque sorte le relais. Non pas sur un médium télévisé (pour une génération de spectateurs un peu plus âgée) mais sur le Net avec des collectifs créatifs (pour une nouvelle génération). Cependant le principe reste le même : une histoire « de Genre », SF plutôt que Fantasy légendaire, traitée à la française c’est à dire avec beaucoup de huis-clos en appartements à cause de l’économie de moyens, et avec ironie parodique (émaillé de tas de jurons) pour un Genre pas du tout cartésien… Mais où la déférence, l’émotion et l’attachement se créent malgré tout, y compris un sens de la mise en scène et du scénario ambitieux qui veulent pousser les limites d’un format, dont les épisodes ne font que quelques minutes.
Avec un peu plus d’avance pour le créateur François Descraques (mais n’était-ce pas aussi du bol ?), sa série évoluant à toute vitesse tout en restant dans les clous d’un budget restreint. Avec un peu d’aide et beaucoup de système D.

Ses personnages ? Typiquement reconnaissables dans la Pop-Culture puisque dérivés de Doc Brown et Marty McFly (et de Kyle Reese et Sarah Connor, ou le Docteur et ses compagnons), à savoir un voyageur doux-dingue au manteau long et tentant de prévenir des apocalypses futures… Mais encore plus violent, trash, menteur, catastrophique, réduisant son gentil acolyte à un rôle de soufre douleur quasi masochiste… Tout en se nuançant au fur et à mesure, laissant poindre le portrait d’un fou cabossé en quête d’affection, et de conflits entre les générations. Bien avant « Rick et Morty » – qui sera d’ailleurs lancé un peu avant la fin de la série.
Il y a surtout une générosité et un savoir-faire dans le rythme des épisodes, aussi bien dans les gags (certains assez beaufs font datés, le reste est souvent très marrant) que dans l’action (au moins une bonne baston chorégraphiée par saison), ou juste dans le montage et ses chutes finales. Il y a du Sam Raimi et du Edgar Wright là dedans.
Manque peut-être d’un peu plus de rapidité dans le rythme de certaines scènes, ce qui se résoud facilement en accélérant son visionnage – essayez donc sur le générique final de la première saison, c’est rigolo.
Toutefois chaque personnage y a droit à un arc narratif assez travaillé, dépassant la caricature et ayant des évolutions tangibles. Montrant ainsi qu’il y a une vraie écriture dans ce show, au delà du délire de sales gosses.

La série a eu le petit luxe de se finir en bouclant plusieures intrigues, sans nous laisser sur notre faim, avec des dérivés sur plusieurs médiums (roman numérique, bande-dessinée et manga à la française)…
Le film qui suit est là pour répondre à la promesse cinématographique de cette histoire visant à être plus grande que nature.
Avec notamment de bons clins d’œil à John Carpenter, George Miller, Edgar Wright (forcément), sans compter ce qui a trait à la série elle-même… mais sans être trop restrictif ni lourd en cameos, car il s’agit bien d’un film autonome que n’importe qui peut regarder sans connaître tout ce qui a précédé, et en y intégrant facilement ses règles temporelles basées sur la causalité..
Bonne idée, encore une fois : présenter ça comme un film « à la Arnaud Ducret », où il y joue l’habituel grand dadais trouvant la rédemption, notamment lorsqu’il y a des enfants… Et le script le pousse un peu plus loin, jusqu’à une émotion à laquelle on ne s’attendait pas (ça aussi c’est une habitude de la série).
À travers lui et le personnage de sa fille moyennement idéaliste jouée par Enya Baroux (la fille de Olivier), on a une porte d’entrée dans cet univers, tout en restant fidèle à cette obsession thématique de la série sur les responsabilités que doivent prendre les (jeunes) adultes pour protéger l’Avenir du Monde.

Quant aux (anti) héros principaux, loin d’être mis sur la touche ils restent le moteur de l’action, leurs allures toujours très iconique, et leur évolution restant intacte, chacun assumant plus son statut de leader – Florent Dorin plus sobre et moins dans l’imitation de Jim Carrey…
de brave équipier sans grandes qualités mis à part l’empathie – Raphaël Descraques tout en fausse passivité…
de robot inventeur plus du tout tenté par la misanthropie – Slimane-Baptiste Berhoun délesté de son gag identitaire récurrent.
Idem pour leurs antagonistes de la Brigade Temporelle, présents depuis longtemps dans le récit, bien que ça ne soit pas une histoire où on puisse vraiment opposer des gentils à des méchants… Mais plutôt l’Idéalisme, même maladroit, à un Pragmatisme de fonctionnaires, détaché de toute humanité.

Il manque quelques boulons au film pour permettre une cohérence de Ton, surtout quand on y évoque l’amertume du sacrifice. Il y a aussi la présence de quelques effets spéciaux qui font assez pauvres à divers moments, le côté « économique » étant trop intrinsèquement lié à l’identité de cet univers.
À part ça, c’est une réussite. Même si ça devait passer inaperçu pour une majorité du Grand Public.
Tout comme les actes héroïques de nos protagonistes, en somme.

Voila ce qu’il vient de se passer ! ;-)

Quelqu'un
10/09/2022 à 12:19

Bonjour bonjour,
Vous vous êtes tromper sur l'écriture du nom de Florent Dorin et avez écrit Florent Morin dans la catégorie "Les couloirs du temps".
Voilà voilà c'est tout.
Et aussi le film est vraiment vraiment bien

La Classe Américaine
08/09/2022 à 17:01

Purée le casting tout claqué des orteils. Franchement, pour mettre un billet et aller voir un étron de youtubeurs au cinéma, il faut être au bout de sa vie.

Carlo
08/09/2022 à 13:08

Le film français par excellence, regard éberlué des acteur de l'affiche à chaque scène du film.

Faurefrc
08/09/2022 à 00:05

@Rientintinchi 1 ou 2

Ce qui est beau avec ta fixette sur les Wacho sur chacun de tes commentaires, c’est que j’imagine que chaque soir, pour évacuer ta frustration, tu tapes les lettres T,R,A,N,S sur ton petit clavier avant d’assouvir tes fantasmes inavoués, de souiller ton écran… avant de te fouetter le dos en te repentant de tes péchés.

Franchement, passe à autre chose. Leurs vies leur appartiennent et même si tu es fan de Matrix et que tu aimes te rendre tout de cuir vêtu tous les dimanches faire confesse, ton énergie ne devrait pas se résumer à balancer quelques blagues vaseuses sur ces cinéastes.

T-Bib
07/09/2022 à 21:02

Je trouve que le film a le cul entre 2 chaises, il se veut serieux mais en meme temps comique, du coup ca crée un problème de rythme. Et on se retrouve avec un film inégal. La mise en scène est par moment du niveau de sketch youtube, et d’autre moment, cinématographique. C’est bien de supporter des projets comme ca, mais faut quand meme faire mieux.


Beaucoup compare ca a Kaamelott, mais moi je comparerais plus avec le Palmashow, qui vient de Dailymotion, et qui avait sorti une vraie comédie avec leur max et leon. Ils avaient réussi à s’approprier les codes du cinéma et de la comédie française en y ajoutant leur écriture. Ici, je trouve que c’est pas le cas.

Non merci
07/09/2022 à 20:08

J'en veux pô !

Flash
07/09/2022 à 17:19

Comme dit la chronique, les inconditionnels trouveront leurs comptes.
Perso, ça sera sans moi.

LouiG
07/09/2022 à 17:08

A quand nerdz, noob ou karaté boy .... non en fait.

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