Carter : critique qui explose de la rotule sur Netflix

Axelle Vacher | 5 août 2022 - MAJ : 10/08/2022 10:06
Axelle Vacher | 5 août 2022 - MAJ : 10/08/2022 10:06

Aficionado bien connu des scènes d'action décomplexées et des intrigues déroulées sur un mouchoir de poche, le cerveau fou derrière les détonants The Villainess et Confession of Murder a, semble-t-il, décidé de remettre le couvert au département des mandales cinématographiques. Avec Carter, son nouveau long-métrage distribué par NetflixJung Byung-gil propose donc une expérience à faire passer John Wick et Tyler Rake pour des bisounours débonnaires.

Netflix tout puissant

Depuis 2016, date de l'implantation du célèbre N rouge en Corée du Sud, le géant du streaming a ajouté quelque 130 programmes locaux à son catalogue. Initialement réservées à un public déjà connaisseur, ces productions ont néanmoins été propulsées sur le devant de la scène suite à l'arrivée du petit phénomène Squid Game. Comptabilisant pas moins de 1,7 milliard d'heures de visionnage au terme de ses 28 premiers jours d'exploitation sur la plateforme, la série créée par Hwang Dong-hyuk a subséquemment impulsé une appétence nouvelle du grand public envers les programmes sud-coréens.

Bien évidemment, Netflix a décidé que l'opportunité était trop belle pour ne pas en profiter. En 2021, le géant du streaming a donc annoncé qu'il investirait pas moins de 500 millions de dollars dans la production de contenu original, et qu'il s'engageait à diffuser, en 2022, 25 créations locales. Du zombiesque All Of Us Are Dead à l'adaptation de La Casa de papel, en passant par le détonnant Yaksha - Un démon en mission, les séries et métrages sud-coréens ont donc peu à peu investi la plateforme depuis.

 

Carter : photo, Joo WonEn voiture, Simone

 

Certes, cet amour soudain pour le pays du matin calme est principalement motivé par une stratégie commerciale savamment pensée. Ferveur mercantile mise à part, ce nouvel investissement de Netflix dans la culture sud-coréenne a néanmoins le mérite de finalement donner la part belle aux différentes cinématographies du pays. Et si l'accent a principalement été mis sur les séries en vue d'émuler le succès de Squid Game, le N rouge a également tenu à développer deux longs-métrages, dont le nouveau bébé ultra-violent de Jung Byung-gil, Carter.

 

Carter : photo, Joo WonOn en conviendra, il y a mieux comme réveil

 

action man sous flakka

L'influence de Hardcore Henry sur le cinéaste coréen s'observait déjà amplement depuis son métrage précédent. En effet, la séquence d'ouverture de The Villainess y déclinait sans trop de détours le concept du métrage d'Ilya Naishuller. Manifestement très heureux de cet exercice de style, Jung Byung-gil a décidé de porter la manoeuvre à son paroxysme pour mieux l'appliquer aux 132 minutes sur lesquelles s'étire Carter.

Tourné en (faux) plan-séquence, le métrage s'inscrit dès lors dans l'héritage d'autres propositions similaires : on pense bien entendu à La Corde d'Alfred Hitchcock, au Birdman d'Alejandro González Iñárritu, ou encore au plus récent 1917 de Sam Mendes. Le fantasme n'est donc nullement inédit, mais l'évolution sémillante des diverses gammes d'effets numériques a rendu la chose nettement plus accessible aux cinéastes assez déments pour s'y attaquer.

Fort heureusement, Jung Byung-gil ne manque point d'ivresse, et s'adonne au mouvement avec délectation et ingéniosité. Mais si le résultat est jouissif, il trouve malheureusement bien vite ses limites. Certes, la direction en plan-séquence a le mérite de proposer une expérience visuelle stimulante : le métrage enchaîne ainsi sans relâche séquences de pugilat, cascades à faire baver d'envie Tom Cruise, courses poursuites azimutées et autres explosions en tout genre. Cependant, l'ensemble manque régulièrement de lisibilité, quand il n'est pas tout simplement abrutissant.

 

Carter : photo, Joo WonFilm VS spectateur

 

Carter bénéficie pourtant d'un point d'ancrage clairement défini par son personnage central. Mais qui dirige réellement l'autre ? La caméra suit-elle réellement les actions de Carter, ou lui impose-t-elle ses propres desiderata ? De steadycam en prises de vues subjectives, difficile d'ignorer les influences vidéoludiques auxquelles se répond le métrage, lequel en réemploie les codes pour mieux brouiller les limites de son propre médium. Hardcore Henry en a déjà fait montre, l'assimilation d'un langage ludotique par le cinéma n'est pas dénuée d'intérêt, bien au contraire.

L'ennui étant que dans le cas du métrage de Jung Byung-gil, la méthode est si paroxystique que le spectateur finit par avoir davantage la sensation d'assister à une démo non interactive qu'un véritable film. Une confusion d'autant plus cristallisée par le recours perpétuel du métrage à une voix off anonyme, laquelle impulse chacune des actions de son personnage.

  

Carter : photo, Joo WonReady Carter One 

 

no memories of murder

Certes, Carter est un bon film d'action. Pensé comme un cocktail survolté et monté comme un trip épileptique, le métrage atteste d'un cahier des charges audacieux dûment rempli par son réalisateur. Mais c'est bien là tout ce qu'il faut en attendre. En effet, à l'instar de son prédécesseur The Villainess, Carter ne brille décidément pas par son scénario. L'intrigue s'efface ainsi progressivement jusqu'à devenir une vague toile de fond pour le spectateur, qui ne s'en souviendra plus que par intermittence.

Le métrage semble pourtant avoir à coeur d'évoquer différentes problématiques économiques, sociales, ou encore politiques en confrontant notamment les deux Corées et les États-Unis. Toutefois, son schéma narratif (si tant est qu'il y en est un) est trop confus, trop disparate pour réellement conduire son propos quelque part. En découle une intrigue dissipée qui, en dépit d'un postulat de départ ultra simple (un homme s'éveille amnésique dans une chambre d'hôtel et se retrouve contraint de mener à terme une mission au péril de sa vie), effectue plus de sorties de route qu'un 38 tonnes sur une route de campagne.

 

Carter : photo, Joo WonStructure narrative en bouts de ficelle

 

Finalement, il semblerait que le cinéaste soit plus enclin à jouer les dealers d'adrénaline en misant sur l'aspect spectaculaire de sa mise en scène qu'à franchement raconter quelque chose. Un sens de la priorité qui donne subséquemment lieu à un ensemble bancal, le tout porté par un parterre de comédiens aux aptitudes douteuses. Seul l'acteur de tête, Joo Won (Good Doctor, Alice), parvient à se démarquer de tout ce beau monde. Ce dernier se jette ainsi  à corps perdu dans l'action et s'éreinte tant bien que mal à donner un minimum de substance à la base succincte qui lui a été fournie (on se demande de fait ce qui lui a demandé le plus d'effort).

Somme toute, Carter n'est pas une mauvaise expérience en soi. Bruyant, violent, et formidablement bourrin, le métrage n'a nullement le culot de prétendre faire du grand cinéma. Séquestrer le spectateur dans le tambour d'une machine à laver lancée en cycle intensif ne suffit toutefois pas à divertir pleinement, et le cinéaste aurait peut-être eu intérêt à revoir certaines de ses ambitions à la baisse.

Carter est disponible sur Netflix depuis le 5 août 2022

 

Carter : affiche (2)

Résumé

Idéal pour le moment catharsis du vendredi soir, Carter manque toutefois d'une conscience plus aiguë de ses propres limites pour en faire une expérience réellement divertissante.

Autre avis Mathieu Jaborska
Un collage approximatif de scènes d'action toutes plus tarées les unes que les autres. Plutôt qu'un faux plan-séquence, une expérimentation kamikaze qui repousse les nouvelles possibilités techniques offertes au cinéma d'action dans leurs retranchements les plus improbables. Un film en effet inconscient de ses propres limites, et ça fait du bien !
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Lecteurs

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commentaires
Tkt
27/08/2022 à 22:42

Les dialogues sont risibles et les effets spéciaux digne du sang couleur ketchup le gars se fait arraché un point de suture et te lâche un aye trois an plus tard
Les scènes sont longue et pénible

Julien
21/08/2022 à 13:07

La technique est là. C'est filmé originalement (avec l'aide de CGI) mais ça virevolte. Ça change.
Bien sûr, il y a un peu de balles illimitées, des 1 contre 50 avec le gars seul qui gagne, des oreillettes magiques avec détection des alentours omnisciente... C'est de la science fiction. Mais la fin... Dites-vous que s'il n'y a pas de Carter 2,c'est qu'ils sont tous morts.

shivattaque
15/08/2022 à 21:11

Le film ma bien pris au début mais les CGI sont horrible et il n'y à pas vraiment d'attachement aux personnages.
Domage, j'ai du passé en rapide vers la fin.

Saori
13/08/2022 à 14:54

Je me suis vraiment éclatée avec ce film bourré d’imagination. Le parcours qu’on fait avec le personnage est vraiment drôle quand on y pense. Et Joo Won assure du début à la fin. J’adore son sérieux imperturbable malgré les trucs délirants qui lui arrivent ou qui voltigent autour de lui. Bref, je suis déjà parée pour la suite !
Par contre, j’ai besoin d’un éclaircissement. Quand vous affirmez que la décision de Netflix de miser en particulier sur les séries coréennes à travers un investissement de 500 millions de dollars a été influencée par le succès de Squid Game, je ne vois pas le lien de cause à effet entre une décision business prise en février 2021 et le succès d’une série sortie sur Netflix le 17 septembre 2021.
Pareil, vous incluez dans votre raisonnement la diffusion en 2022 de All Of Us Are Dead, alors que le tournage de cette série a démarré en 2020. Il a ensuite subi des contretemps à cause de la pandémie de Covid, comme bien des productions à travers le monde. Et quant à Carter, sachez que Joo Won a été casté dans le premier rôle en mars 2021, soit bien avant le succès planétaire de Squid Game.

Linou
11/08/2022 à 18:51

Netflix ou le meilleur et le pire des séries.
Là à mon avis le pire du pire.
Maux de crâne garantis dès les 5 premières minutes.

Dahm
09/08/2022 à 22:40

JOUISSIF ET ORGASMIQUE !
et t'as le bol de ces boloss qui se la jouent critiques et experts en cinéma, ce film a été pensé pour l'action pour faire du boucan, pour tout exploser bref pour simplement divertir sans prise de tête et offrir du spectacle et c'est justement réussi. Voilà si vous voulez de l'existentialisme bordel allez regarder un vieux film français chiant à mourir et faites plus chiernles pseudos experts mais en experts en rien du tour.

J'ai hate de voir la suite car la fin m'a vraiment frustré. Le train file et les rails explosent sans pouvoir voir le dénouement de l'histoire du coup un Carter 2 est à venir putain que j'ai hate le cinéma coréen c'est un régal depuis old boy je suis en amour avec le cinéma coréen qui ne cesse de me surprendre régulièrement. J'adore leurs plans séquences car ils ne cessent d'innover. Vive les coréens, vous le decevez rarement quand il s'agit de cinéma j'en ai pour mon argent

Trac
08/08/2022 à 21:56

C'était sympa mais punaise sa file la gerbe c'est dommage avec une caméra moins tremblante et virevoltante le film aurait était peut-être vachement mieux . Et puis l'overdose de CGI visuellement a vomir par moment font de ce film un demi-echec , reste un film sacrement chorégraphié par moment pas loin de la virtuosité. Une note de 2*5 paraît correct .

Film médiatisé
07/08/2022 à 23:48

Ce film c’est effectivement du vent

Sur le plan technique l’idée est bonne mais la quasi totalité du film est en image est en CGI

NEd6979
07/08/2022 à 23:47

Sincèrement ce fil fait mal à la tête. Le FPV c’est cool mais fait pas non plus donner le mal de mer au spectateur mdr

Pharco
07/08/2022 à 23:30

Franchement, un navet.... Perte de temps, et effets spéciaux bancaux... Film très médiatisé pour sa sortie et n'en valait pas la peine.

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