Le Haut du panier : critique sans détente, mais avec du cœur sur Netflix

Arnold Petit | 10 juin 2022 - MAJ : 11/06/2022 02:40
Arnold Petit | 10 juin 2022 - MAJ : 11/06/2022 02:40

Produit par LeBron James et Adam Sandler lui-même, avec plusieurs joueurs de la NBA au casting, Le Haut du panier réalisé par Jeremiah Zagar (We the Animals) ramène l'acteur dans le monde du basketball pour un drame sportif terriblement classique, mais tout de même prenant, sorti le 8 juin sur Netflix.

HE GOT GAME

Adam Sandler est un grand acteur, et aussi un fan invétéré des New York Knicks. Si le parieur excentrique qu'il incarnait dans Uncut Gems lui avait déjà permis d'illustrer la frénésie qu'il pouvait ressentir pour la balle orange (ce qui explique peut-être pourquoi c'est une des meilleures performances de sa carrière), Le Haut du Panier semble être un projet taillé pour le laisser exprimer tout son amour pour le basketball, en même temps que son talent.

C'est d'ailleurs ce qu'il fait, dans un monologue au milieu du film, lorsque son personnage de recruteur fatigué des Sixers de Philadelphie, Stanley Sugarman, essaie de raviver la flamme qu'il a perçue chez son prodige espagnol, Bo Cruz, joué par le joueur professionnel Juancho Hernangómez.

 

Le Haut du panier : photo Juancho Hernangomez, Adam SandlerPenser basket, respirer basket, vivre basket

 

Avec ses vêtements trop larges et sa barbe grisonnante qui fait ressortir son sourire et ses traits usés, le comédien délaisse à nouveau les bouffonneries humoristiques qui l'ont fait connaître pour continuer d'explorer son versant plus dramatique dans un rôle de type moyen et désabusé, qu'il incarne comme si c'était lui-même. Son implication et sa passion se ressentent à chaque prise de parole, à chaque geste, et permettent au film de marquer des points malgré toutes les fautes qu'il commet.

Le Haut du Panier s'en tient au plan de jeu et reprend bêtement tous les clichés d'un film du genre : les traditionnels discours inspirants dans les moments difficiles, les entraînements répétés, les obstacles à franchir et d'autres rebondissements attendus jusqu'au match final. Cependant, la mise en scène rugueuse et immersive de Jeremiah Zagar, sa capacité à capturer les mouvements des corps, les expressions et l'essence même du jeu, donnent de la personnalité et de l'épaisseur à ce qui n'aurait pu être qu'un énième drame sportif dans le catalogue de Netflix.

 

Le Haut du panier : photo Tobias Harris, Juancho HernangomezUn contre un

 

Caméra à l'épaule, le réalisateur et son directeur de la photographie Zak Mulligan tentent constamment de donner du style, du dynamisme et de l'originalité à l'image pour transformer et élever chaque élément de base d'un récit déjà connu. Comme une évidence, la séquence d'entraînement où Bo court dans les rues de Philadelphie rappelle d'abord Rocky, puis gagne en intensité et trouve son propre tempo quand la musique hip-hop se mêle à la partition électronique de Dan Deacon et aux cris de motivation d'Adam Sandler dans un montage électrisant en deux parties.

Face à l'acteur, Juancho Hernangómez s'avère étonnement crédible pour son premier rôle à l'écran dans la peau de ce garçon taciturne qui affiche une mine de chien battu. Outre ses prouesses athlétiques et son physique magnétique, le joueur des Utah Jazz laisse transparaître un naturel qui le rend aussitôt attachant. Et la douce alchimie entre lui et Adam Sandler apporte une touchante sincérité qui donne envie de suivre ce duo jusqu'au bout de leur quête de gloire et de reconnaissance, même si la fin est écrite d'avance.

 

Le Haut du panier : photo Juancho Hernangomez, Adam Sandler Attrape-moi si tu peux

 

NEVER BACK DOWN

À travers le récit de ce recruteur chevronné qui s'accroche désespérément à ce jeune talent espagnol pour espérer devenir coach, Le Haut du Panier aurait pu aborder la reconnaissance du basket étranger aux États-Unis, le processus de recrutement compliqué de la NBA, le changement de vie soudain d'un candidat à la Draft, les coulisses d'une équipe du banc jusqu'aux joueurs ou les rouages financiers, politiques et économiques complexes derrière les parquets et les paillettes.

Autant de sujets que le film traite de façon succincte ou délaisse délibérément, préférant plutôt raconter la même histoire patente et simpliste de rêves brisés et de rédemption, entre Jerry Maguire et The Way Back.

 

Le Haut du panier : photo Juancho Hernangomez, Adam SandlerAvec plein de jolis dunks tout le temps

 

En substance, le scénario donne l'impression que Taylor Materne s'est contenté de reprendre l'histoire qu'il a écrite pour NBA 2K19 ou 2K20 en demandant à Will Fetters d'y apporter un tant soit peu de profondeur et d'enjeux grâce à son expérience sur Remember Me, The Lucky One et A Star Is Born.

Tous les éléments constitutifs du mode carrière de NBA 2K se retrouvent dans le film, et les joueurs sauront les reconnaître du premier coup d'oeil : la découverte d'un jeune talent inconnu dans un quartier miteux d'une ville lui offrant une chance de sortir de la misère et d'atteindre ses rêves ; le rival qui provoque le joueur à chacune de leurs rencontres (interprété ici par Anthony Edwards) ; la réputation à entretenir sur les réseaux sociaux avec des partenariats ou des publicités et même les différents exercices sur le terrain d'entraînement pour améliorer sa vitesse, sa détente ou son agilité.

La plupart des rôles secondaires tenus par Queen Latifah, Robert Duvall, Ben Foster ou Heidi Gardner ne se limitent donc qu'à des apparitions anecdotiques, quand ils ne tombent pas directement dans la caricature, et le film suit le même déroulé programmatique et générique que le jeu vidéo, jusqu'aux apparitions de vrais joueurs au sein du récit.

 

Le Haut du panier : photo Kenny Smith, Ben Foster, Jaleel White, Matisse ThybulleCinq mineur

 

À ce niveau, le nom de Lebron James à la production est certainement ce qui a permis de réunir une telle myriade de stars et de légendes de la NBA et du streetball sur le terrain et en dehors (Julius Erving, Dirk Nowitzki, Allen Iverson, Boban Marjanović, José Calderón, Kyle Lowry, Trae Young, Grayson "The Professor" Scott Boucher ou encore Shaquille O'Neal, pour ne citer qu'eux). Kenny Smith, l'ancien joueur et actuel commentateur pour TNT, donne une performance assez solide en tant qu'ami et ancien coéquipier d'Adam Sandler. Les autres, eux, servent essentiellement à faire de la figuration et apporter encore un peu plus d'authenticité à cette déclaration d'amour qui prend parfois des airs de spot publicitaire pour la NBA. 

N'importe quel fan de basketball devrait être comblé, ne serait-ce que pour toutes les séquences de match qu'il offre et son impressionnant casting, mais ceux qui attendent autre chose qu'un film sportif qui raconte la même histoire que d'habitude devraient plutôt se rabattre sur l'excellent High Flying Bird de Steven Soderbergh.

Le Haut du panier est disponible depuis le 8 juin sur Netflix

 

 

Le Haut du panier : Affiche US

Résumé

Entre promotion pour la NBA et ode au basket-ball, Le Haut du panier compense son scénario prévisible et simpliste récupéré d'un jeu vidéo par son parterre de stars, son savoir-faire technique et sa passion, qu'Adam Sandler insuffle comme si chaque action était la dernière.

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(3.3)

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commentaires
Ozymandias
04/12/2022 à 23:45

Vu ce soir, je suis aligné avec votre critique
C'est pas mal mais on connait malheureusement le film avant de l'avoir vu. Sympathique.

Kyle Reese
10/06/2022 à 14:43

Pour Adam Sandler alors, c'est déjà ça !

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