Le Roi cerf : critique qui biche

Simon Riaux | 4 mai 2022 - MAJ : 05/05/2022 12:36
Simon Riaux | 4 mai 2022 - MAJ : 05/05/2022 12:36

S'il se place en héritier de Princesse MononokéLe Roi cerf de Masashi Ando est un long-métrage surprenant, qui s'avère bien plus qu'un simple descendant. Et pour cause, s'il s'agit de la première réalisation de son auteur, ce dernier est tout sauf un nouveau-venu. Après avoir été remarqué à Gérardmer et à Annecy, le film arrive enfin dans les salles de cinéma hexagonales.

BAMBI N'EST PAS ICI

Depuis le retrait, total ou partiel de Hayao Miyazaki du devant de la scène de l’animation japonaise la presse occidentale n’aura eu de cesse de vouloir trouver son héritier, un nouveau porte-étendard. La réalité est semble-t-il plus heureuse et plus compliquée, à l’heure où s’épanouissent dans les salles françaises les créations de Makoto Shinkai, ou Mamoru Hosoda, et que s’apprête à sortir un nouvel opus des aventures de Détective Conan dans les salles obscures. Avec la sortie du Roi Cerf de Masashi Ando, le parallèle avec le maître des studios Ghibli a beau paraître évident, mais à nouveau, il serait réducteur d’en rester à ce simple parallèle. 

 

 

Après des années de guerre, l’empire de Zol règne en maitre, notamment sur le peuple d’Aquafa. Mais l’irruption d’une mystérieuse épidémie engendre un regain de tension entre les deux factions à couteaux tirés. Un ancien combattant, rescapé de justesse d’une attaque de loups transmettant le fléau, ainsi que la petite fille qui l’accompagne vont se retrouver au centre d’un conflit qui ne demande qu’à renaître de ses cendres. Impossible de ne pas voir dans ces prémices, comme dans la direction artistique en générale, un lien de parenté avec un certain Princesse Mononoké

 

 

Le Roi cerf : photoUn univers beaucoup plus original qu'il n'y paraît

 

Et pour cause, Ando a collaboré à ce dernier a collaboré à ce dernier, ainsi qu’au Voyage de Chihiro. Le réduire à un compagnon de route des deux chefs d'œuvres serait néanmoins une erreur, tant sa carrière, comme character designer et directeur de l’animation l’aura amené sur des rivages variés, dont on retrouve l’influence dans son premier long-métrage. De Paprika, à Paranoia Agent, sans oublier Evangelion 3.0 ou encore Your Name, c’est tout un pan de l’animation japonaise qu’aura accompagné et en partie accouché, l’artiste. Assister à la maturation de ce parcours via un premier film aussi ambitieux que celui qui nous intéresse n’en est que plus passionnant. 

 

 

Le Roi cerf : photoUne innocence à l'épreuve du conflit

 

GUERRE ET PAIX

Ainsi donc, voici Van, mystérieux guerrier semble-t-il immunisé contre la peste qui ravage ses semblables, flanqué de la toute jeune Yuna. Le brillant scientifique Hoshalle est dépêché à ses côtés pour tirer de cet homme un remède. On craint un temps que ce premier mouvement de l’intrigue ne nous ramène vers une opposition technologie/nature ou civilisation/essence un tantinet rebattue. Mais rapidement, ce qui frappe, c’est la capacité du récit à épouser quantité de lignes symboliques, autrement plus variées. Son goût pour le mystère par exemple, qui pourra dérouter, s'avère une belle expérience, comme en témoigne le traitement des pouvoirs de Van, jamais frontalement explicite, laissant le spectateur deviner comment il s'aricule avec les règles d'un univers en forme de découverte perpétuelle.

Au gré des découvertes du trio de protagonistes, c’est un monde éminemment politique, dans lequel s’entremêlent avec une grande intelligence les questionnements spirituels, mais également institutionnels. Les interactions sociales des différents personnages secondaires sont toujours établies avec une clarté qui impose le respect. Ce mélange de rigueur et d’efficacité dans la mise en place des enjeux comme leur développement est remarquable dans les dialogues, marquants et enlevés, y compris quand il faut asséner au spectateur quantité d’informations. 

 

 

Le Roi cerf : photoUn récit qui ne fait pas de prisonniers

 

On pourra regretter que la formidable capacité du Roi Cerf à donner chair à un univers de fantasy riche se fasse par endroit au détriment de l’émotion.  Cette dernière est plus d'une fois étouffée par une architecture narrative qui ne joue jamais la facilité, préfère le  non-dit, comme si elle nous plongeait dans un monde déjà connu, renforçant l'immersion au risque de la rendre trop exigeante. Mais regretter ce manque ponctuel  d'accessibilité serait une fois encore passer à côté d’une autre qualité de l’ensemble.

Si les mondes réinterprétant légendes et mythologies se caractérisent parfois par leur goût bienvenu de la démesure, Le Roi Cerf joue la carte de la retenue. Une orientation risquée, mais finalement payante, tant on ressort du film avec le désir d’y replonger, signe que Masashi Ando est parvenu avec une maestria prometteuse à y insuffler une vie puissante. 

 

 

Le Roi cerf : Affiche officielle

Résumé

Fort d'un univers aussi complexe que riche, Le Roi Cerf déploie un récit qui saura passionner les spectateurs désireux de s'immerger dans une mythologie singulière.

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Lecteurs

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commentaires
Lepetitbreton
08/05/2022 à 10:29

Perso j'ai eu un peu de mal à rentrer dedans, et j'ai trouvé que l'intrigue manquait parfois de fluidité, mais j'ai passé un bon moment. Juste petite déception sur la musique, pas mauvaise, mais vraiment oubliable.

Momo
07/05/2022 à 16:58

Vu et beaucoup apprécié

Alxs
05/05/2022 à 23:01

J'en ressors et, à moins d'être fan du genre je pense, c'est vite oubliable... Les perso secondaires et les passages tout pétés à la Satoshi Kon son chouettes mais pour le reste j'ai lutté pour ne pas siester..

Fox
04/05/2022 à 14:16

Sur ma liste pour ce week-end !
En revanche, l'affiche est un peu "trompeuse" au sujet Masashi Ando : s'il a bien bossé sur - entre autres - Princesse Mononoké et Your Name, c'est au département Animation, mais pas à la réal'. Après, c'est pas ce qu'ils mentionnent, c'est vrai. Disons qu'on est sur un argument marketing un peu "flou" pour essayer de faire venir ceux qui ont aimé les deux films suscités.
Je leur pardonne quand même parce qu'ils n'ont pas une distribution folle et qu'il faut bien exister parmi toutes les sorties. Ce genre de films mérite une plus grandes exposition donc merci @La Rédaction d'en parler !

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