Le Secret de La Cité Perdue : critique à la poursuite du diamant berk

Geoffrey Crété | 4 novembre 2022 - MAJ : 07/11/2022 10:31
Geoffrey Crété | 4 novembre 2022 - MAJ : 07/11/2022 10:31

Que se passe-t-il quand Sandra Bullock et Channing Tatum se retrouvent perdus dans la jungle, entre un Daniel Radcliffe énervé et un fabuleux trésor caché ? Pas grand-chose. C'est Le Secret de La Cité Perdue, une comédie très dispensable réalisée par Aaron et Adam Nee, qui fait comme si À la poursuite du diamant vert n'existait pas.

wild wild vert

Comment rater un film pourtant si simple à réussir, a priori ? La vieille formule de la comédie romantique d'aventure a donné plus de navets qu'autre chose, mais puisqu'elle repose avant tout sur les acteurs, il y avait de quoi espérer, avec Sandra Bullock et Channing Tatum. Elle n'a plus à prouver qu'elle est un moteur comique nucléaire, et il a brillé dans 21 Jump Street et sa suite. Leur duo promettait des étincelles faciles, surtout avec une telle histoire.

Sandra Bullock est une romancière désabusée, spécialisée dans les récits d'aventure mi-érotiques mi-neuneu, type 50 nuances de jungle. Channing Tatum est un mannequin plus ou moins débile, devenu une star en posant avec la perruque de Thor pour les couvertures de ces livres. Ils ne s'aiment pas, mais suite à leur rencontre avec un milliardaire fou, qui pense que l'écrivaine peut l'aider à trouver un trésor perdu, ils se retrouvent perdus dans la jungle, sur une île sauvage.

Ça ressemble au film culte À la poursuite du diamant vert, avec Kathleen Turner en romancière embarquée malgré elle dans l'aventure de la jungle ? Ce n'est que le début, puisque le vrai-faux secret de cette Cité perdue est son air de quasi-remake (raté) du classique réalisé par Robert Zemeckis, où la citadine Joan Wilder portait des talons hauts dans la boue. Il y a beaucoup trop de similitudes pour ne pas avoir la dent dure contre cette comédie fadasse, mais le film n'a même pas besoin de ça pour exaspérer.

 

The Lost City : photo, Sandra Bullock, Channing TatumEn quête de l'humour

 

sandra balek

Le scénario du Secret de la Cité perdue sent la poussière, et c'est normal : il traînait depuis des années dans les tiroirs des studios, et Sandra Bullock l'avait refusé. Jusqu'à ce que Paramount lui donne quasi carte blanche pour se l'approprier, et qu'elle amène la productrice Liza Chasin (dont le CV va de Baby Driver à Cats) et la scénariste Dana Fox (Cruella) pour une touche de modernité. Difficile de savoir où la magie est censée avoir opéré, mais une chose est sûre : le film est beaucoup trop confortable pour l'actrice.

Le rapport aux clichés féminins, l'arrogance face au bellâtre, quelques gags de screwball comedy : Sandra Bullock n'a aucun défi à relever. Elle traverse cette Cité perdue sans le moindre effort et donc, sans la moindre petite folie. Face à elle, Channing Tatum dépense beaucoup (plus) d'énergie, mais dans un rôle de faux neuneu là encore trop dans ses cordes. Les rôles sont tellement taillés à la mesure des deux acteurs, que le spectacle est complètement plat. Si la comédie est une histoire de risques, c'est ici l'assurance zéro dérapage.

 

Le Secret de La Cité Perdue : photo, Sandra BullockUnchartiède

 

C'est d'autant plus tragique qu'un tel film ne repose sur rien d'autre que l'énergie et l'alchimie de ses acteurs. Et inutile de compter sur les seconds rôles pour aider. Daniel Radcliffe n'a ni le temps ni l'occasion d'être en roue libre, puisqu'en tant que grand méchant, il doit d'abord dérouler l'intrigue et les enjeux - les yeux écarquillés, et avec option rire ridicule, pour l'honneur.

Dans le rôle de la manageuse qui cherche l'héroïne, Da'Vine Joy Randolph a plus de (mal)chance : elle a droit à sa sous-intrigue, aussi insupportable qu'inintéressante. Entre sa mamie portée sur le soft porno, le béguin d'un pilote baveux et ses péripéties diverses, ce second rôle au bord de la crise de nerfs est l'équivalent du reflux gastrique en plein McDo, toujours susceptible de venir empirer un repas déjà bien fade. Jusqu'à la toute fin, elle intervient pour ralentir une aventure déjà bien molle, et touche du bout des doigts le pire de la comédie sans aucun rythme ni idée.

 

Le Secret de La Cité Perdue : photo, Da'Vine Joy RandolphHumour low cost

 

brad pitié

La présence de Brad Pitt, à cheval entre le caméo de luxe et le second rôle, est peut-être le meilleur aveu de faiblesse. La valeur comique de ce gourou-mercenaire-fantasme repose uniquement sur la vague auto-parodie de l'acteur, digne d'un long sketch du Saturday Night Live. Interprété par un autre, ce serait parfaitement insipide. Avec lui, c'est une gigantesque diversion, qui arrive tellement tôt que le film se tire une balle dans les deux pieds.

Brad Pitt amène une petite dose d'absurdité bienvenue, qui manque justement et cruellement au film par la suite. Car après le running gag de la combinaison rose, qui donne lieu à une chute (rires) amusante, et l'idée de bloquer l'héroïne sur une chaise pendant deux poursuites, il n'y a plus rien.

La fausse bonne idée de Brad Pitt représente le parfait néant de la comédie (et Hollywood) : le public doit rire à l'extérieur du film, non pas parce que le scénario est drôle, mais parce que le système se touche et l'invite à la fête (Sandra Bullock a en plus expliqué que Brad Pitt et elle ont la même coiffeuse, qui a servi d'entremetteuse : elle lui a parlé de ce petit rôle, et l'a convaincue de remplacer Lady Gaga dans Bullet Train). La scène post-générique, probablement écrite, filmée et montée entre deux apéros, en est l'ultime démonstration. Ou quand la nullité et la stupéfaction s'allient pour un moment de gêne indescriptible.

 

The Lost City : photo, Sandra Bullock, Brad PittBrad pitre

 

jungle spleen

Mais la pire erreur du Secret de la Cité perdue est de compartimenter les choses. Ce n'est pas une comédie romantique d'aventure : c'est parfois une comédie, parfois une romance, parfois une aventure, et rarement tout ça à la fois. L'humour est concentré sur la première partie du film, avant que le premier degré n'envahisse la jungle. Les gags (mal rythmés) et blagues (basiques) deviennent des roues de secours, pour avancer dans des tunnels de dialogues sirupeux. Cul nul et chaise collante disparaissent alors dans des océans de banalités, sans la moindre malice.

L'apothéose est naturellement le climax, ramassis de nunucherie qui clôture ce récit sur le deuil, aussi fin que la couche de fond de teint de Sandra Bullock. La scène où l'héroïne se libère en jetant son alliance dans la tombe, avant de plonger pour fuir l'apocalypse, et renaître de l'autre côté, était du pain béni pour une comédie sérieusement drôle. Mais ici, elle est sérieusement filmée, écrite et interprétée. Ce qui est d'autant plus délirant que le grand méchant se demandait justement en hurlant pourquoi tant d'argent et de temps avaient été dépensés pour une métaphore aussi bête - soit la meilleure note d'intention de ce film à 70 millions de dollars.

 

Photo Channing Tatum, Sandra BullockQuand tu veux sortir de la salle de cinéma

 

Dans une autre scène, le beau gosse musclé et gentiment demeuré remet l'héroïne élitiste à sa place : "Tu ne peux pas mépriser ce que tu fais, parce que ça touche beaucoup de gens ! On ne devrait pas avoir honte de quelque chose qui plaît autant !". Entre cri à l'aide et cynisme effroyable, c'est une triste autopsie de l'industrie hollywoodienne : incapable de véritablement décoiffer ses vedettes et rire d'elle-même, mais toujours prête à donner de petites leçons de vie (et de morale) pour camoufler sa médiocrité crasse.

 

Le Secret de La Cité Perdue : Affiche française

Résumé

Sandra Bullock et Channing Tatum ne peuvent pas sauver cette poussiéreuse cité perdue, qui ressemble à un mauvais remake d'À la poursuite du diamant vert, et se prend tellement au sérieux qu'elle donne plus envie de pleurer que rigoler.

Autre avis Antoine Desrues
Jamais filmé, jamais rythmé, ce Secret de la cité perdue s'impose comme une comédie aussi vaine que ringarde. Le pire, c'est qu'on voit le léger potentiel WTF de l'ensemble, sacrifié par la médiocrité de son exécution.
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Lecteurs

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commentaires
ycnoname
20/04/2023 à 15:43

aeazea

MrDy
05/11/2022 à 13:52

Très bon film quand tu as 13h d'avion à te farcir. Ce n'est pas le film du siècle, mais en tant que divertissement ça passe.

OyBoY'
05/11/2022 à 12:46

J'ai passé un super moment devant au cinéma, en VO car en comparant la VF de la bande annonce elle avait l'air beaucoup moins bien alors que je ne suis pas un bandeur de VO et aussi je suis un fan de l'humour de Channing Tatum.

petez un coup !
05/11/2022 à 09:08

Il est excellent ce film pas prise de tête, jme suis bien marré devant ! Mais ça doit être pq je suis 1 beauf.
Humblement vôtre.
P.

Le chat machine
05/11/2022 à 06:42

Nilvere, désolé mais ils ont raisons, pourquoi parce que tout ce qui est décris dans l'article, ben c'est juste, ce film est une pale copie de "à la poursuite du diamant vert", un des joyaux de mon enfance, sauf que Sandra B n'est pas K Turner et que le pauvre Channing T n'est pas Mickael Douglas.

Ce film accumule tout les clichés, en voulant parodier certaines scènes, ça manque de rythme, c'est mal écris, vu 20 fois, bref c'est raté, comme la plupart des films actuels d'ailleurs, on vis une triste époque ou les studio n'osent plus créer mais copier c'est plus simple et plus rentable, alors que le ciné c'est pas juste une question d'argent.

Neji .
05/11/2022 à 00:33

Le genre de merde que tu regardes dans l'avion sur un écran de 10cm pour pioncer...

Dr.Zaius
04/11/2022 à 21:02

Honteux !

Nilvere
04/11/2022 à 20:58

Un pseudo journaliste qui dégoise pendant tout un article sur un film grand public, quel courage ! Franchement, vous n'avez rien de mieux à faire ? Que leur reprochez-vous vraiment en fait, ils ne vous ont pas fait profiter des nombreux objets dérivés que vous envoient d'habitude les firmes de cinéma pour que vous parliez favorablement de la dernière bouse d'Hollywood, tels que les Marvels, toujours ensencés malgré le vide sidéral des histoires ? Ce n'est pas un film qui mérite l'oscar, on est d'accord. Mais votre article me semble bien dur. Une vraie critique ne sert qu'à diriger une oeuvre vers son public. Votre critique méchante ne sert à rien, juste à vous écouter parler.

Lord Sinclair
08/07/2022 à 08:37

Comment les agents des vedettes en question peuvent ils les laisser "jouer" dans un truc pareil. C'est juste une catastrophe du début à la fin. La boursouflure du système hollywoodo-ultra libéral absolu : vendre du vide pour faire des dividendes...
On peut saluer l'effort de faire un film d'1h45, pour autant on dirait qu'il dure 2h30...

lucybelze
23/05/2022 à 01:10

Fallais absolument que je dise ce commentaire.... C'est un navet absolu qui m'a même pas décroché un sourire.

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