Lui : critique d'un Guillaume Cané

Simon Riaux | 14 juin 2022
Simon Riaux | 14 juin 2022

Lui est ce soir à 21h11 sur Canal+.

On aura vite catalogué Lui, le nouveau film de Guillaume Canet, comme un ego trip sorti de nulle part. Mais la chose est à la fois meilleure et infiniment pire. Scénariste, réalisateur et interprète à l'univers plus difficile à cerner qu'on veut bien le dire, l'artiste s'aventure sur des terres inattendues, avec une candeur (et des limites) qui confère à l'expérience des airs de fascinante foirade.

C'EST QUOI LUI ?

On ignore son nom, mais Lui sera notre héros, imaginé par Guillaume Canet, écrit par Guillaume Canet, co-produit par Guillaume Canet, incarné par Guillaume Canet. Est-ce à dire que c'est lui Lui ? Peu importe finalement, tant il vaut mieux se rappeler la carrière de l'auteur avant de faire des conjectures sur la dimension psychanalytique du film. Personne n'est dans le secret des âmes, et déterminer ce qui relève du biographique, de l'autobiographique, de l'apitoiement ou de l'auto-fiction s'avérera finalement tout aussi vain que le spectacle crapoteux projeté devant nos yeux.

Car peu importe finalement que l'homme-orchestre derrière ce projet semble se casser les dents sur absolument tous les postes qu'il occupe. Peu importe en vérité qu'aucun personnage ne surnage du bouillon, qu'aucun enjeu ne se dessine clairement, ou que l'on peine à distinguer l'intérêt du projet, si ce n'est la perspective de se faire plaisir entre copains. Mais là encore, l'hypothèse est peu crédible, tant faire la bête à deux dos est plus rigolo sans la présence d'une demi-centaine de techniciens.

 

photo, Guillaume CanetGuillaume Canet (à droite) et un vieux piano

 

La claque vient de la dimension inédite du projet. Il arrive que des ingrédients jusqu'alors jamais mélangés dans un film aboutissent à une recette inédite. Pas nécessairement digeste, rarement recommandable, voire franchement toxique. Mais tout de même inédite.

Et avec ce mélange d'introspection bergmanienne, de fantaisie à la Blier matinée de déréglage à la Aronofsky, Canet propose une inattendue pièce montée au foie de bébé dauphin, rissolée dans du beurre de Bretonne dépressive. Le goût est rance, chaque pirouette a des airs de suicide, mais ce qui nous est montré a tout de même le mérite - comme Rock'n Roll, un peu - de ne ressembler à rien de connu.

 

photo, Guillaume Canet, Virginie EfiraGuillaume Canet (à droite) et divers éléments de décor

 

TRISTE MONDE TRAGIQUE

Le problème en définitive, c'est que Lui ne ressemble à rien, et qu'on ne saisit pas bien, même quand c'est Canet qui le co-produit, qui a pu donner son aval à la chose. Le sous-texte psychologique, avec ses métaphores à base de piano désaccordé, de surmoi incarné dans un grenier verrouillé, ou de double aux airs de Némésis, est d'une profondeur qui ferait honte aux Totally Spies. Canet lui-même, pourtant excellent comédien, paraît perdre plus d'une fois le fil de son personnage. Ses camarades de jeu sont également dirigés mollement, et personne ne surnage, pas même les figurants censés nous convaincre que le Finistère n'est pas très porté sur le brassage génétique.

Tout cela se veut étrange et mordant, mais c'est oublier cet ingrédient essentiel : la poésie acide de Blier n'est pas seulement le fruit de situations étranges comme Guillaume Canet semble le penser, mais bien de la langue d'un auteur singulier. Or, en matière de langue, Canet aurait plutôt celle d'un boeuf en fin de parcours et mal assaisonnée. Son verbe n'est pas généreux, jamais chantant, un comble quand le coeur allégorique du film demeure longtemps un piano désaccordé. Dès lors, les dialogues ou circonvolutions qui confrontent le protagoniste à ses désirs ne décollent jamais et manquent cruellement de sens.

 

photo, Guillaume Canet, Virginie Efira, Laetitia CastaGuillaume Canet (au centre) sur un lit

 

Et le spectateur de poursuivre son visionnage avec ce questionnement unique, entêtant, mais pas bien plus désagréable qu'une écharde dans l'oeil : pourquoi ? Pourquoi financer un projet qui, de l'aveu de son auteur, semble conçu pour occuper son temps au milieu de la crise sanitaire ? Pourquoi mettre sur pied un récit dont on ne voit ni d'où il part ni où il se rend ? Pourquoi donner corps à des angoisses si huileuses de bourgeoisie inquiète qu'elles feraient passer Nous finirons ensemble pour un manifeste révolutionnaire ?

Les réponses à ces interrogations se dérobent, jusqu'au générique de fin et la libération sous caution d'un spectateur qui dans le fond, le sait, le sent. Guillaume Canet reviendra, quoi qu'on pense de Lui.

 

affiche

Résumé

Ce qu'il y a de bien dans la réalité, c'est que quand un enfant bercé trop près d'une cheminée allumée s'essaye un jour au dessin, il ne vient à l'idée de personne de l'exposer au Louvre. Mais dans notre dimension du multivers, ces enfants peuvent faire des films.

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Lecteurs

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commentaires
Mauricette
03/08/2022 à 17:19

Je n ai pas du tout aimé ce film
Affreux.

Spooky
14/06/2022 à 20:57

Ce résumé qui tire à balle réelle jpp

Dirhavel le Conteur
10/11/2021 à 13:24

Rien à dire sur le fond de votre critique, sans doute juste. Mais alors, la forme ! V. Efira, "divers éléments de décor" ? Sérieux ? Je suppose que c'est du second degré, mais si j'étais à sa place, je vous balancerais des pompes à la tronche. Avec des talons aiguilles. En visant bien. Apprenez plutôt le français, ça donnera plus de poids à votre mépris. Je suppose que votre "coeur" est en fait un "chœur", que vous vouliez dire "pas beaucoup plus" et non "pas bien plus", et que vous savez qu'il faut distinguer un titre de film du texte d'une façon ou d'une autre, guillemets, italique ou autre... Enfin, même si je viens de Normandie, votre commentaire plus que condescendant sur le Finistère me consterne. C'est vilain, l'arrogance.

Dada31
03/11/2021 à 14:00

Ce film est vraiment ennuyeux, j'ai été très déçue, malgré le casting prometteur...même pour les passionnés de psychanalyse, à fuir de toute urgence.

Doudou65
02/11/2021 à 22:54

Après 45 trop longues minutes, n’en pouvant plus j’ Quitté la salle de cinéma
Aucun intérêt dans ce film
Même le très bon casting ni fera rien

Titi
02/11/2021 à 21:04

Un film de Guillaume Canet avec Guillaume Canet, suivi d'une bonne distribution, avec Leticia Casta, qui sauve
un peu les meubles grâce à sa plastique, j'y vais sans même regarder la bande annonce.... grosse erreur, un navet pour moi qui vais au cinéma pour rigoler un peu,se détendre, oublier la trop souvent triste réalité,film réservé aux passionnés de Freud et de psychanalyse.

PP
01/11/2021 à 18:53

Franchement ennuyeux nul.

Dario 2 Palma
01/11/2021 à 11:24

Peut-être que je devais être de bonne humeur mais je n'ai pas passé un mauvais moment avec cet objet ce caprice égocentrique relativement singulier qui rappelle en effet par moments le cinéma de Blier. Et puis le casting m'est sympathique, donc ça aide (j'ai trouvé Virginie Efira plus à l'aise ici que dans le décevant dernier Verhoeven..)

didier
31/10/2021 à 11:34

nul nul nul

Le diable
31/10/2021 à 09:01

Vive la France !

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