Nobody : critique Better call Wick

Simon Riaux | 20 juillet 2022
Simon Riaux | 20 juillet 2022

Nobody est ce soir à 21h10 sur Canal+.

Bob Odenkirk interprète un quidam banal à la vie bien trop rangée se retrouvant propulsé dans une spirale meurtrière, après qu’un évènement perturbateur ait réactivé son appétit pour l’ultra-violence. Impossible de ne pas penser à la franchise à succès John Wick en découvrant le synopsis de Nobody, réalisé par Ilya Naishuller. Et pour cause, on retrouve en coulisses plusieurs artisans de la saga.

KILLER INSTINCT 

Succès surprise de 2014 qui marqua instantanément la rétine des spectateurs en rompant avec l’esthétique heurtée post-Jason Bourne pour proposer une captation de l’action inspirée des grandes heures du cinéma hongkongais et centrée sur des plans amples et des cascades lisibles, John Wick n’a pas tardé à avoir une énorme influence sur le cinéma. Si on ne retrouve aucun de ses deux metteurs en scène derrière la caméra de NobodyDavid Leitch y tient le rôle de producteur, tandis que le scénariste historique de la licence, Derek Kolstad, est aux commandes de la narration. 

 

 

Contre toute attente, c’est peut-être de ce duo que proviennent les quelques limites de ce divertissant film d’action. Si le scénario ne peut jamais être pris en défaut de patinage, tant il s’efforce de tenir un récit condensé, dénué de gras et mené tambour battant (à peine 90 minutes au compteur), la tonalité de l’ensemble s’avère un peu flottante. À ne pas choisir entre éloge de l’auto-défense viriliste et auto-critique teintée de folie douce, le film paraît plus d’une fois se contredire et chercher son rythme. Hutch est-il un faible qui mérite sa vie sexuelle de bulot arthritique, ou le seul de cette galerie de tarés à la gâchette facile qui est conscient de l’absurdité du massacre à venir ? 

 

photo, Bob Odenkirk"Bonjour c'est le poinçonneur des lilas"

 

À ne jamais choisir, le film se retrouve le fondement entre deux chaises, tout comme il lance quantité de pistes stimulantes, qu’il n’exploite jamais tout à fait. Le concept de la famille étendue de Hutch (Michael Ironside, RZA, Connie Nielsen et Christopher Lloyd, rien que ça !), aussi bienveillante et protectrice que pleine d’allant quand il s’agit de transformer un hostile en purée de cartilage, est plaisant, mais finalement utilisé de manière un peu superficielle.

De même, on regrette que l’action, pour bien chorégraphiée, brutale et euphorisante qu’elle puisse être, ne trouve jamais un écrin à sa hauteur. Entrepôt, zone industrielle générique, banlieue pavillonnaire... on peine à trouver une arène, un lieu ou même un concept qui inscrive ces fusillades énervées dans un décorum de cinéma

 

photoLa flinguette des rois

 

NOW BODIES 

Sans doute orchestré un peu trop vite pour trouver pleinement sa voie, ou se démarquer de son modèle, dont le patron et les coutures sont encore visibles à chaque articulation dramaturgique, Nobody n’en demeure pas moins un plaisant carnage. Le crédit en revient d’abord à Bob Odenkirk, qui, loin de son personnage d’avocat roublard dans Better Call Saul, se permet ici un jeu de pure outrance, parfois proche du pantomime, encore renforcé par un investissement physique de chaque instant. 

Aux antipodes du Droopy psychotique incarné avec prestance par Keanu Reeves, Odenkirk compose un petit homme revanchard, voire colérique. Tantôt pathétique, tantôt hilarant, il a le mérite de nous taper dans l’œil, mais surtout de faire idéalement écho à son antagoniste. Mafieux russe manifestement désintéressé par la gestion d’une dynastie criminelle, il aspire comme son adversaire à réenchanter un quotidien singulièrement foireux, et confère à l’atmosphère générale une pincée de surréalisme désenchanté.

 

photoOn a connu des sélections de l'Eurovision plus souriantes

 

Une modulation bienvenue, renforcée par le travail à la mise en scène d’Ilya Naishuller, dont on n’avait plus beaucoup de nouvelles depuis le frappadingue Hardcore Henry. Il n’en retrouve jamais les turbulences cosmiques, mais veille continuellement à inclure dans ses joutes millimétrées un décalage et un sens de l’immodération trop rares par les temps qui courent.

Un dosage d'autant plus délicat qu'il ne bascule jamais dans le pastiche ou la parodie, mais préfère tirer le meilleur parti de l'anatomie particulière de son acteur principal, tout en décuplant, à coups de plans malins ou d'effets de montage rusés, la portée des coups qu'il distribue, mais aussi de ceux qu'il reçoit. Soit l’ajout idéal de fantaisie à une équation de rigolade à la viande techniquement très solide. 

 

Affiche officielle

Résumé

La tonalité de l'ensemble manque parfois un peu d'assurance, et la recette de John Wick demeure par endroits trop voyante, mais le réalisateur de Hardcore Henry emballe de très plaisantes bastons, et Bob Odenkirk compose une adorable machine à tuer râleuse.

Newsletter Ecranlarge
Recevez chaque jour les news, critiques et dossiers essentiels d'Écran Large.

Lecteurs

(3.6)

Votre note ?

commentaires
Flo
15/07/2023 à 12:50

Le vanity project de Bob Odenkirk, tenant surtout de Breaking Bad (crise de la cinquantaine en mode salaud), et un peu de John Wick pour le reste.
Mais il ne fallait justement pas confier le projet à 87North Productions… À quelques films près, ces gens ne savent pas créer de construction narrative claire, leurs films partant dans tous les sens juste pour le plaisir des séquences de combats/cascades. Même si elles n’ont pas toujours une grande originalité, car ici on se croirait souvent dans le premier film « Equalizer ».
Sauf que là, dès qu’on comprend que le personnage principal n’est pas un type bien, qu’il a un pète au casque et a souvent envie de chercher la bagarre et les coups (comme un accroc, évidemment), impossible de le rendre aussi impressionnant qu’un Denzel ou Neeson. Ni même empathique à moins d’en faire une totale comédie noire, sans lorgner non plus sur du Tarantino.
Peine perdue, les gags sont bons et décalés grâce aux deux antagonistes, mais pitoyables lorsque Christopher Lloyd et RZA se greffent inutilement à l’intrigue.
L’évolution du gars est souvent artificielle, et on ne traite jamais du propos viriliste exposé au début de l’histoire (pas plus sur l’histoire du Russe noir, qui mériterait un film à lui tout seul)… puisqu’il n’y a aucun marqueur géographique ou sociétal là dedans, qui permettrait d’être ouvertement critique…
Jamais de la vie avec 87North Productions, il ne faut fâcher personne.
La radicalité en prend un coup, et fait une croix sur tout type de questionnements dérangeants.

Rick Hunter
28/07/2022 à 21:19

Bon, je ne dirais rien sur les propos de somebody fuck everybody, qui ne manquent pas de panache ; mais je m'attarderai sur mon ressenti après le visionage de ce film.
First point, la musique est excellente tout au long du métrage, j'ai adoré.
Secondo, c'est bien filmé, même si on arrive pas à savoir dans quel ville on se trouve.
Alors oui les décors sont en mode solde à -70%, mais en même temps, ça reste un bon petit film de baston qui passe bien en sirotant sa bière.
Un film pour se détendre un soir de grande fatigue !

Galawar
21/07/2022 à 07:15

Très sympa, je rejoins la plupart des avis. Mais putain, le VF de Bob Odenkirk c'est juste pas possible... J'ai pas eu le choix de le voir en français et ça m'a quelque peu gâché le film...

Cinégood
20/07/2022 à 21:46

La séquence du bus est d'anthologie, un bijou. Rien que pour celle-là, le film vaut le coup.

John Spartan
20/07/2022 à 21:37

Un bon divertissement à la sauce 90'

Tu mets le cerveau sur off et tu t amuses.

shivattaque
20/08/2021 à 00:48

J'en attendais un film sympa et franchement je l'ai trouvé terrible du début à la fin je ne suis pas ennuyé les acteurs sont bons (regarder en VO) et pour ma part ça me fait plus penser à équaliseur qu'à John Wick car Wick et un tueur à gage alors que là comme dans équaliseur c'est un tueur du gouvernement américain la différence qu'il a une famille, enfin bref j'ai vraiment apprécié ce moment passé devant ma télé et pour moi ça vaut une très bonne note car je note les films en fonction du type de film et celui-là est très bon dans son genre.

Jdbravo
05/07/2021 à 16:14

Une bonne surprise !

De toute manière, rien que pour voir Christopher Lloyd, c'est mythique...

Plus sérieusement, j'ai bien rigole, ma femme et mon fils aussi.

bodynobodynobody
05/06/2021 à 01:13

Seul avec un coup de main du papy cela aurait été suffisant,mais encore une fois (sûrement pour une affaire de quota)on a un méchant black homme de main russe (ça sent le woke car a un moment le boss prend sa défense en disant a un autre type qu'il est black mais aussi russe que lui )et bien sûr pour contrebalancer le tout on a un black gentil présent vraiment pour un quota homme blanc et homme noir....On sent que ce film sympa d'avant l'été a été obligé d'ajouter cette fameuse dose de woke a la fin du film.

michael
04/06/2021 à 19:43

Et Michael ironside a doublé de volume

Sascha
03/06/2021 à 22:36

J'ai passé un bon moment. Alors oui, c'est du John Wick (en moins bien du coup car l'effet de surprise n'est plus) et limite cela pourrait se passer dans le même univers que cela ne serait pas déconnant.

Après, le film est sans temps mort, Bob Odenkirk tient la route. Revoir Christopher Lloyd en mode "Papy fait de la résistance et il va surtout te/tout cramer" est un régal.

Et je ne pensais pas qu'un jour je trouverais Saul Goodman si sexy.

Plus
votre commentaire