Homunculus : critique qui voit des gens qui font morts sur Netflix

Simon Riaux | 26 avril 2021 - MAJ : 26/04/2021 18:46
Simon Riaux | 26 avril 2021 - MAJ : 26/04/2021 18:46

Nous avions quitté Takashi Shimizu avec Inunaki, le Village oublié, primé au Festival de Gérardmer. Bazar horrifique indéniablement foutraque, mais aussi inventif que réjouissant, le film débordait d’envie et laissait espérer que le réalisateur de Ju-on : The Grudge et de son remake The Grudge était sur le point de retrouver l’inquiétante hargne de ses débuts. Malheureusement, Homunculus, disponible sur Netflix, vient considérablement doucher ces espoirs.

TROISIÈME OEIL

Quand un cadre à la dérive s’éveille d’une opération expérimentale dont il a été le cobaye, trépané et amnésique, il s’attend à passer un sale quart d’heure. Mais ce n’est que le début de ses mésaventures, puisqu’il a désormais la capacité de voir les traumas ou névroses de ses contemporains. Une situation inconfortable, voire cauchemardesque, dont le malheureux va tenter de trouver son parti, quitte à se transformer en Amélie Poulain infernale. 

Il y avait bien des choses à raconter avec semblable point de départ, qui offre quantité de possibilités à la caméra pour retranscrire les psychés torturées d’un corps social japonais pas spécialement avare en angoisses en tout genre. C’est d’ailleurs la seule véritable réussite de Homunculus. Le film nous offre quelques séquences particulièrement stimulantes où Shimizu se plaît à transformer les angoisses de ses contemporains en concepts visuels tour à tour plastiquement attrayants, perturbants, provocateurs ou tout simplement inattendus. 

 

photo, Gô AyanoBon bonnet, bon oeil

 

C’est aussi quand il mélange styles et références que le métrage étonne. Comme lors de son ouverture, où se marient motifs appelés à émailler tout le récit, images de trépanation et sonorités pop a priori hors-sujet. Dans ces – rares – moments de grand écart, le cinéaste retrouve un peu du style agressif, ou gentiment mutant, qui a conféré à plusieurs de ses œuvres précédentes leur énergie. Autant de gourmandises gentiment azimutées, malheureusement distribuées au spectateur avec beaucoup trop de pingrerie. 

 

photo, Ryou NaritaDessine-moi un bubon !

 

AU ROYAUME DES AVEUGLES

Malheureusement, Takashi Shimizu tient rarement la barre de son intrigue. Condenser le manga de Hideo Yamamoto, dont le récit pouvait prendre de l’ampleur au gré de 15 tomes, avait tout de la tâche impossible, ou du piège mortel.

Et en effet, montage comme scénario s’avèrent, le plus souvent, incapable de condenser intelligemment l’œuvre originale, qu’il n’est nul besoin d’avoir lue pour sentir combien rien ne tourne rond en termes de rythme, tant les ellipses sont heurtées, ou certains dialogues trop lourdement explicatifs. On s’ennuie fréquemment, on ne se passionne presque jamais pour l’action, un comble quand elle promettait sur le papier, tant d’expérimentations. 

 

photo, Gô Ayano, Ryou NaritaGrosse battle de charisme

 

Fastidieux à suivre, Homunculus donne également l’impression que le réalisateur n’est jamais à la hauteur de son récit, voire que la maladresse dont il fait preuve le mutile carrément. En témoigne une séquence de viol, qui se voudrait plus maline, retorse et intelligente qu’elle ne s’avère, en dépit d’un traitement visuel inventif.

Le découpage, et in fine le discours du long-métrage amènent alors un contresens passablement désolant, transformant une agression sexuelle caractérisée en simili-sauvetage. Un exemple parmi beaucoup d’autres des tête-à-queue narratifs qui parsèment l’ensemble et le rendent progressivement aussi indigeste qu’ennuyeux.

Homunculus est disponible sur Netflix depuis le 22 avril 2021 en France

 

Affiche officielle

Résumé

Malgré quelques idées visuelles, un sujet prometteur et une poignée de trouvailles, Shimizu semble essoufflé, presque incapable d'embrasser son sujet ou de s'élever jusqu'à lui.

Autre avis Mathieu Jaborska
Le long-métrage sème les idées intéressantes et les réflexions pertinentes, mais son incapacité à mieux articuler les aspects psychanalytiques et sociaux de son récit finit par avoir raison de lui, voire par lui prêter des intentions douteuses.
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Lecteurs

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commentaires
Ippo99
10/05/2021 à 13:05

Film naze aux mœurs étranges....sans intérêt, je lui attribue ma note qui se rapproche de mon test de vue -> 1/10 (oeil gauche) et 1/10 (oeil droit)

Barberousse
27/04/2021 à 19:45

Ah j'ai eu peur, en voyant les notes du film sur sens critique je croyais être le seul à avoir vu cette scène...je sais qu'il y a culturellement une approche différente du sexe au Japon, mais là quand même, c'est l'enfer, on est loin de l'horreur de irreversible, je suis d'accord avec @hoi c'est de la pure apologie du viol pour moi. Et si l'idée du réal était de critiquer la culture du viol au Japon, j'éspère qu'il a prévenu avant parce que c'est difficile à remarquer et c'est un sacré raté!

Simon Riaux
27/04/2021 à 10:13

@hoi

Non, on ne dit pas qu'elle "aurait pu être plus maline retorse et intelligente". On dit que Shimizu voudrait tordre les représentations de la violence sexuelle au sein du cinéma japonais en proposant une scène plus "maline, retorse et intelligente" que ce qui est finalement à l'écran, et qui s'avère un pur condensé de culture du viol.

hoi
26/04/2021 à 22:23

Qu'entendez vous par une scène de viol qui aurait pu être plus maline retorse et intelligente ? Tout ce que j'ai vu c'est de l'apologie du viol, où il ne fait que ''donner à cette adolescente ce qu'elle désire au fond d'elle''. Ce que tous les violeurs pensent faire, en somme. Je n'ai pas lu le manga, je ne sais donc pas comment la scène y était représentée à la base. Mais dans ce film ça m'a tellement répugnée que je n'ai pas pu le finir.

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