Lucky Strike : critique vénale

Simon Riaux | 11 juillet 2020 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Simon Riaux | 11 juillet 2020 - MAJ : 09/03/2021 15:58

Le cinéma coréen est un des plus dynamiques et variés au monde, auquel un public croissant se montre sensible. Dans ce contexte, on était donc particulièrement curieux de découvrir Lucky Strike, qui devait être présenté au Festival de Beaune, et dont il aurait fait les beaux jours, si une certaine pandémie ne s'en était pas mêlée.

LA DOULEUR DE L’ARGENT 

Une tripotée de personnages aux abois, un énorme paquet de pognon, une avidité qui se cache à chaque coin de rue et un paquet d’objets contondants. Voilà pour l’équation de départ de Lucky Strike, thriller choral coréen réalisé par Kim Yong-hoon. Et pour son premier long-métrage, le metteur en scène ne manque pas d’ambition, tant il multiplie intrigues, protagonistes et thématiques. Malgré cette profusion, il parvient à tenir sa barre avec une grande rigueur. 

Toujours limpide, y compris quand la narration se risque à multiplier les plans narratifs ou à jouer de la temporalité, le film réussit à allier l’acidité amusée du genre avec la volonté de proposer un portrait sans fard des classes populaires coréennes. Coincées entre les lâchetés ordinaires, les veuleries ou médiocrités de quiconque tente de détrousser son prochain, les alliances se font, se défont, et racontent toujours quelque chose d’un corps social entre dépression et implosion. Un jeu d'échecs complexe, mais dont l'écriture demeure toujours pensée, capable de s'assurer plusieurs grilles de lecture, sans jamais sacrifier à sa clarté.
 

photoPour tout l'argent du monde

 

QUI PERD, PERD 

Pour autant, le métrage se garde bien de tomber dans le tract politique, ou le réquisitoire artificiel contre un capitalisme qui transformerait ses acteurs en autant de loups pour l’homme. Ici, ce sont bien les personnages eux-mêmes et leurs passions tristes qui motivent les saillies de violence qui parsèment le récit. Et il faut dire qu’en la matière, Kim Yong-hoon sait y faire, tant son Lucky Strike sait ménager au spectateur de ruptures de ton à la brutalité saisissante, et puissamment immersive. Qu'on retourne sa veste, broie des innocents ou refasse la peinture d'une salle de bain à l'hémoglobine, le film ne recule pas devant les extrémités dans lesquelles s'embarquent ses anti-héros.

On regrettera simplement que la rigueur de la mise en scène et la très bonne tenue du scénario aillent de pair avec un relatif manque de personnalité. Propre, bien mené, emballé avec soin, l’ensemble a du mal à creuser un sillon qui lui soit propre, à conférer à sa folle course à l’argent liquide une patte personnelle. Et ce n’est pas le découpage en chapitres, pas toujours fonctionnel ni éclairant, qui conférera à l’ensemble une quelconque forme de signature. En l’état, si le divertissement est assuré, difficile de distinguer l’œuvre du tout-venant du cinéma traitant d’arnaque et de crime (voire de botanique). 

 

Affiche française

Résumé

A défaut d'affirmer un style propre ou de tout proposer quelque chose de foncièrement original, Lucky Strike est un thriller réussit et exécuté avec soin.

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commentaires
Hank Hulé
11/07/2020 à 14:28

Réussi....

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