La Voie de la justice : critique au nom de la vérité
La Voie de la justice, ce soir à 20h50 sur Canal+ Cinéma.
En quelques années, Destin Daniel Cretton s'est fait remarquer pour ses drames sociaux intimistes, d'abord dans un foyer pour adolescents avec States of Grace, puis à travers l'enfance difficile de Jeannette Walls, adaptée dans Le Château de verre. Avant de réaliser Shang-Chi and the Legend of the Ten Rings pour Marvel, le réalisateur nous emmène au coeur du système judiciaire américain dans La Voie de la justice avec l'histoire poignante d'un homme injustement enfermé dans le couloir de la mort.
DEAD MAN WALKIN’
Le 22 novembre 1992, la célébre émission américaine 60 minutes consacre un de ses épisodes à Walter McMilian, ou Johnny D pour ses amis et ses proches. Les États-Unis découvrent alors l'histoire ahurissante de cet afro-américain condamné à mort depuis six ans pour un crime qu'il nie avoir commis. Sans enquête, sans preuve, en ne s'appuyant que sur le témoignage de Ralph Myers, un récidiviste notoire, la justice l'a envoyé dans le couloir de la mort pour avoir tué Ronda Morrison, une adolescente blanche de 18 ans.
Alors qu'il attendait de passer sur la chaise électrique, un avocat, Bryan Stevenson, s'intéresse à lui et décide de le défendre. Il poursuivra ensuite sa lutte activiste pour le respect et la protection des droits civiques et contre les discriminations raciales systémiques et prendra la défense de plusieurs autres détenus issus de minorité ou de milieux défavorisés, prouvant ainsi l'innocence de près de 140 d'entre eux. Un combat retracé dans ses mémoires, Just Mercy : A Story of Justice and Redemption, dont le scénario de La Voie de la justice s'inspire.
Le film démarre en 1987, à Monroeville en Alabama, quand Walter McMilian (Jamie Foxx) était encore libre, en pleine forêt, en train d'abattre des arbres pour son entreprise de pâte à papier. Arrêté sans ménagement pour le meurtre d'une jeune employée dans une teinturerie, il clame son innocence, mais un jury le condamne à la prison à perpétuité. Une peine qui sera ensuite alourdie par un juge en condamnation à mort.
Fraîchement diplômé d'Harvard, Bryan Stevenson (Michael B. Jordan) s'installe en Alabama pour fonder son organisation Equal Justice Initiative, destinée à représenter les détenus qui ne peuvent plus se faire entendre, essentiellement des condamnés à mort. Après en avoir interrogé plusieurs, il décide de s'occuper du cas de Walter McMillian, persuadé qu'il est innocent.
Jamie Foxx et Michael B. Jordan
AMERICAN CRIME STORY
Le sujet a beau être déjà vu, il n'en reste pas moins poignant, et La Voie de la justice l'utilise au nom d'un superbe plaidoyer contre la peine de mort. D'abord en décrivant le désarroi quotidien des détenus qui attendent la date de leur exécution dans une cellule où la beauté du ciel et la sensation de l'air frais ne sont plus que des souvenirs, puis en suivant les derniers instants d'un condamné. Une scène déchirante, que le film choisit de montrer à travers les yeux de Bryan Stevenson.
Comme lui, le film s'attaque aux inégalités du système judiciaire américain à bras-le-corps et le fait en étant le plus honnête possible. Sans fioritures, La Voie de la justice raconte l'histoire de Walter McMilian telle qu'elle est : celle d'un homme qui a été injustement condamné à mort simplement parce qu'il est noir, victime d'un racisme latent des États du Sud qui portent encore les stigmates de la ségrégation. Un scénario signé Andrew Lanham suffisamment éloquent et fort pour être captivant sans avoir besoin d'en rajouter et directement confronter la société à ses errements, passés ou actuels.
Même si La Voie de la justice souffre assurément d'une narration un peu trop classique et de quelques longueurs, le film se distingue surtout par son authenticité. Un parti pris que Destin Daniel Cretton applique jusqu'à la réalisation, qui reste sobre, voire académique. Néanmoins, au milieu d'une mise en scène assez commune, où le film prend des allures de documentaire, la caméra capture des moments emplis d'un réalisme sincère et s'attarde sur les regards des personnages, avec des gros plans sur leurs visages, valorisant ainsi un casting impressionnant.
Habité par l'optimisme, la fureur et la ténacité de Bryan Stevenson, Michael B. Jordan incarne le jeune avocat avec conviction, tandis que Jamie Foxx réalise sans doute une de ses meilleures performances récentes. L'acteur communique toute la vulnérabilité, la gentillesse et la détresse émotionnelle de Walter McMilian, un homme dépouillé de son humanité, qui a perdu tout espoir.
Rob Morgan est bouleversant dans le rôle d'un des voisins de cellule de Walter, un vétéran du Vietnam souffrant d'un trouble de stress post-traumatique qui aurait mérité un développement plus approfondi. Un constat également applicable aux personnages de Brie Larson, mère de famille obstinée et alliée de Stevenson dans son combat, ou de Tim Blake Nelson, brillant dans son interprétation du criminel dont le témoignage a servi à faire condamner Walter.
La puissance de La Voie de la justice repose d'abord dans la brutalité de son sujet, avec cette histoire aussi saisissante que surréaliste, exposée sans ressorts dramatiques, de manière plus didactique que cinématographique. Malheureusement, malgré son discours frappant, le film se retrouve limité par cette sincérité qu'il porte au nom de cet homme qui s'était déjà résigné à mourir.
Lecteurs
(3.9)23/04/2021 à 13:56
J'ai suivi le film il y a deux jours. Il est nase. Le droit de tuer de Schumacher est meilleur
22/04/2021 à 19:11
Moui, extrêmement balisé, enjeux tièdes et zéro tension. Mais ça se regarde car c'est bien emballé (acteurs chouettes). Et puis s'oublie...
14/05/2020 à 23:50
Je fais un rêve qu un jour il n y ai plus autant de film de ce genre.
Mais ce ne sera sûrement pas demain la veille.
Il a l’air bon en tout cas.
14/05/2020 à 19:29
Clay
Entiérement d'accord, dans the unicorn elle ce dirige bien en plus meme si le film est un peu mievre
14/05/2020 à 17:43
Brie Larson est une actrice de grand talent (Room, States of Grace, Crazy Amy) .Elle brille encore dans ce second rôle.
Le scénario de Captain Marvel n'était pas très fouillé.
14/05/2020 à 17:15
Gros Gros Gros plaisir de ces dernières semaines!
J'ai découvert ce film, un peu par hasard!
Et quel bonheur!
Le pire, c'est que je venais de me refaire (pour la X ème fois MISSISSIPPI BURNING!)
Et je lis le pitch de ce film... donc, allons y pour ce film et le truc qu'il va me raconter!
Encore merci! Ce fut un immense plaisir de découvrir cette oeuvre.
Et d'en apprendre encore un peu plus à la fin du film (je ne dis rien... mais une des plus grosse erreur judiciaire de l'histoire américaine est dans ce film... mais en second rôle!) ;-)
Enfin, les acteurs et actrices, sont impeccables! (même Captain Marvel...)
Une réal, sobre et qui sait dérouler un film de ce genre, sans en faire trop!
Bon pour résumer, un de mes plus gros plaisirs de ces derniers temps!
A VOIR DE TOUTE URGENCE!