ABANDONNEZ TOUT ESPOIR
L’intrigue, après une introduction vaporeuse d’une extrême violence, nous précipite aux côtés de Liza, qui a récemment hérité d’un vieil hôtel aux abords de La Nouvelle-Orléans, quasiment à l’abandon. Alors qu’elle entame des travaux de rénovation et découvre le passé sinistre de l’endroit, les évènements morbides se multiplient. Transposé aux abords du bayou et des pacaniers, le cinéma de Lucio Fulci trouve un écrin idéal, un microcosme moite, dans lequel son esthétique du pourrissement peut se déployer comme jamais.
Car comme à son habitude, le cinéaste ne se soucie pas franchement de son intrigue, ou de la direction des comédiens, laissant le charisme des plus accomplis faire le job (et avec Catriona MacColl, Cinzia Monreale et Maria Pia Marsala, l’auteur réunit un casting tour à tour évanescent et magnétique), il préfère se focaliser sur la mise en scène, générant une ambiance délétère qui imprime la pellicule dès l’ouverture du métrage.
L’hospitalité à La Nouvelle-Orléans
Le scénario ne se soucie par conséquent jamais de ce qu’il raconte, se contentant d’articuler des séquences horrifiques artificiellement reliées entre elles. Mais ici, causes et conséquences passent petit à petit au second plan, tandis que seuls règnent la poisse et les symboles. Lucio Fulci épouse progressivement un terrain purement sensoriel, au fur et à mesure que ses deux héros se perdent dans un décor dont la géographie finira, elle aussi, par se désagréger, jusqu’à donner le sentiment au spectateur d’explorer un dédale infini, qu’il est condamné à peupler de ses propres névroses.
LA FÊTE DE LA VIANDE
Tout à fait décomplexé, le cinéaste peut alors varier les supplices jusqu’à l’ivresse, enchaînant une scène culte après une autre, son sens de la dilatation spatiale et temporelle atteignant ici son paroxysme. Avec une obscénité funèbre, navigant entre Borgès, Bosch et Bacon, il observe des mygales apparues comme par magie dévorer la langue d’un second rôle, avant d’énucléer un malheureux quidam, pour mieux scruter la terreur organique qui vaporise le cadavre d’un père sous les yeux de sa fille, paralysée par la terreur.
Ce festin d’entrailles convulse au gré de la partition de Fabio Frizzi, qui emmène toute cette troupe de morts-vivants, chiens affamés et innocents promis au bûcher vers une conclusion parmi les glaçantes de l’histoire du cinéma. L’avènement des enfers étant annoncé dès l’ouverture, Lucio Fulci va ici plus loin qu’il ne le fit quelques mois plus tôt dans son redoutable Frayeurs. Il y suivait ses héros jusqu’à un ultime plan, qui dévoilait leurs visages, déformés par l’horreur, sans nous donner à voir l’objet de cette émotion.
Dans la conclusion de L’Au-delà, il pousse ce principe de vertige bien plus loin, alors que son couple de survivants se perd sous nos yeux, les pupilles révulsées, dans un nouveau type de labyrinthe aux couleurs du linceul. Véritable matrice pour David Lynch, Robert Mitchell et autres Peter Strickland, le cinéma vénéneux de Fulci s’accomplit ici au cœur d’une véritable cathédrale de chairs fumantes.
@simon
Bien ton article.
Hai parlato del cinema italiano et ti ringrazio. La tua recensione è bella. « The Beyond » è un buon film.
A mia avviso : In generale, le tue critiche sono spesso troppo dure. Farete fuggire i vostri lettori. Più lettori, quindi più Ecran Large… Sei il caporedattore devi dare l’esempio.
Ti dico « Ciao » e alla prossima.
D.