Ça : Chapitre 2 - critique qui rage en bas

Simon Riaux | 16 août 2020 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Simon Riaux | 16 août 2020 - MAJ : 09/03/2021 15:58

Ça a récolté les fruits plantés des années plus tôt par Stephen King, son roman au succès planétaire, puis par son adaptation en mini-série, Il est Revenu. La relecture d’Andrés Muschietti est devenue le plus grand succès horrifique du 7e Art. C’est donc précédé d’une énorme attente et promise à un succès non moins planétaire que débarque sa suite.

LE CLUB DÉRATÉ

Ça : Chapitre 2 avait un énorme défi à relever : totalement réinventer sa seconde moitié, devenue inadaptable. En effet, en séparant les deux temporalités imbriquées dans le roman de Stephen KingAndrés Muschietti rendait inutilisable l’axe « adulte » de l’intrigue, pensé dans le texte comme un champ/contrechamp, un dialogue perpétuel avec l’enfance. Éloigner les deux interdisant cet échange, il fallait offrir aux personnages vieillis de nouveaux enjeux.

Malheureusement, le film en est incapable, et préfère dérouler une redite du précédent opus, la surprise et le charme adolescent en moins. Le scénario se tord en tous sens pour justifier la séparation constante des personnages (n’espérez pas retrouver le Club des Losers), les échos épais lancés au premier métrage, ou le recyclage du – joli – bestiaire de ce dernier. La faiblesse de Ça tenait beaucoup à sa dimension très répétitive, elle est ici décuplée, et ce pendant près de trois heures.

 

photo, Bill Hader, James Ransone, Jessica Chastain, Isaiah Mustafa, James McAvoyLe Club de Losers a grandi

 

Non seulement cette durée excessive étouffe la plupart des effets, allant jusqu’à broyer ou rendre inoffensives les meilleures séquences, mais le film trouve encore le moyen de maltraiter ses personnages. Heureusement, Bill Hader (le seul à bénéficier d’un semblant d’écriture) déploie une fascinante palette d’émotions, c’est d’ailleurs sur lui seul que repose la force larmoyante des derniers instants du récit. Jessica Chastain fait preuve d’un charisme et d’un investissement qui transcendent la construction faiblarde de Beverly, tandis que James McAvoy, n’ayant rien à surjouer, préfère enlacer amoureusement la gueule de bois qui lui tient lieu de personnalité.

Le reste du Club est traité par le scénario avec une indifférence totale, la palme du néant revenant à Mike (Isaiah Mustafa), qui voit son intrigue et sa personnalité transférés une nouvelle fois à Ben, pour être totalement mis de côté par l’intrigue. Et si seulement ce désintérêt pour les Ratés autorisait Grippe-Sou à constituer une véritable menace en déglinguant nos héros... Mais la peur n’est pas au rendez-vous.

 

photo Bill Skarsgård

 

MONSTRES & CAMPARI

Plus encore que Ça premier du nom, ce Chapitre 2 souffre d’un agencement incompréhensible des séquences horrifiques. Tout y est charcuté par le montage, bien trop bref, jamais insistant, étouffé sous un mixage sonore tonitruant. Impossible de sentir le malaise, la dissonance, ou quoi que ce soit d’inquiétant, tant la mise en scène paraît redouter l’horreur, ou la concevoir comme l’orgasme d’un tambour de guerre.

On se réjouissait néanmoins de retrouver Bill Skarsgård, dont on pouvait espérer qu’il se lâche tout à fait dans le rôle de Grippe-Sou le Clown. Malheureusement, la production, peut-être pour tenter de démultiplier l’impact de sa performance, le recouvre en permanence de prothèse ou de maquillages numériques, le plus souvent finis au sébum d’ado syphilitique. Le résultat n’est jamais effrayant, curieusement aseptisé et techniquement risible. Et le film éviscère ainsi lui-même un de ses plus beaux atouts.

 

PhotoUn des nombreux et ridicules maquillages numériques

 

Mais Grippe-Sou n’est pas le seul à souffrir de ce traitement. Par extension, c’est tout le formidable bestiaire de Stephen King, et les ajouts de Muschietti, qui passent à une moulinette absurde. Comme s’il fallait transmuter ce cauchemar sidéral, cette angoisse cosmique où nous flottons tous en bas… en un succédané de Transformers.

Et même quand la caméra retrouve, le temps d’une séquence à la déchirante platitude, l’abominable lépreux du précédent film, Muschietti a bien du mal à renouveler ses effets, enregistre la performance horrifique comme on pointe à l’usine. Entre désenchantement et effets de manche industrieux, la désolation est totale.

 

photo, Jessica ChastainHeureusement il y a Jessica Chastain

 

NOUS RAGEONS TOUS EN BAS

Le plus rageant enfin, ce n’est pas tant le champ de ruines qui s’étend près de 3 heures durant. C’est plutôt le constat, amer, que Muschietti aime sincèrement son matériau de base, parvenant, par endroit, à tout à fait ressusciter la puissance mélancolique de Ça. Le film contient en effet une poignée de scènes à la force remarquable, qui enchanteront les fans absolus de l’œuvre de Stephen King.

Flashback en forme de rapport de police terrifiant dans le roman, l’agression homophobe dont est victime Adrian Mellon au début du récit est une réussite déchirante. Avec une belle réserve et une vulnérabilité qui impressionne instantanément, Xavier Dolan joue l’une des victimes les plus touchantes de Grippe-Sou, accompagnée d’une cascade d’idées visuelles qui feront cruellement défaut au reste du film.

 

Photo Bill Hader Bill Hader, le seul à s'en tirer avec les honneurs

 

On retrouve cette surpuissance symbolique dans la séquence où Bev retourne chez elle, dont les trailers n’ont pas manqué de repiquer plusieurs excellents passages. À nouveau, le metteur en scène génère un malaise et un vertige emblématiques de l’œuvre originelle, nous donnant à ressentir toute la corruption, la grande putréfaction de Derry.

Mais c’est bien trop peu, bien trop tard. Même constat quand Richie (Bill Hader) laisse entrevoir un pan de sa personne qu’il a tout fait pour dissimuler. Muschietti se l’approprie pour donner un sens nouveau au climax. Ces réussites, éclatantes et rares, soulignent aussi l’inutilité et la décomposition d’un Chapitre 2 qui erre à la manière d’un canard sans tête.

 

Affiche française

Résumé

Handicapé par une durée ridicule, étouffé par un scénario incroyablement mécanique, Ça : Chapitre 2 éviscère son atmosphère à coups d'effets numériques grossiers. Restent la belle performance de Bill Hader et une poignée de scènes dignes du cauchemar de Stephen King.

Autre avis Geoffrey Crété
Comme le premier, Ça : Chapitre 2 souffre d'une narration bancale, manque cruellement d'un vrai sens de l'angoisse, et tombe dans une formule répétitive. Mais comme le premier, il emballe quelques scènes solides, et repose sur des personnages dont la belle mélancolie infuse le métrage.
Autre avis Alexandre Janowiak
Interminable et terriblement banal, ce deuxième volet confirme, après le premier chapitre anodin, à quel point la nouvelle adaptation du roman culte de Stephen King, malgré quelques bonne idées visuelles ici ou là, ne restera pas gravée dans les mémoires.
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Lecteurs

(3.3)

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commentaires
noé
29/01/2023 à 22:53

Le film est merveilleux arrêter de le critiquer. Chaque films a ses faiblesses.

Yoyo
30/08/2020 à 22:32

Je n’ai pas lu les livres ni vu le téléfilm. Ce deuxième épisode accentue le défaut principale du 1er episode. A partir du moment où la menace est principalement matérialisée par des hallucinations.... le film m’a perdu, je me suis plus senti concerné et effrayé. Ça me fait penser au jeu sur Gamecube Eternal Darkness où les hallucinations étaient franchement amusantes, mais rien de plus qu’un petit interlude.

Kel-Morian
19/08/2020 à 18:56

Je ne suis pas d'accord avec cette critique, mais tout les avis sont bons à prendre.
Pour le coup cette adaptation est très proche du bouquin.

Par contre Écran Large, comme à votre habitude, vous choisissez des mots durs et des tournures de phrases assassines pour un film qui ne mérite pas tant.
C'est dommage, ça va finir par entamer votre crédibilité.

Simon Riaux
19/08/2020 à 16:27

@Metal3d

On est un des rares sites à s'intéresser sincèrement et franchement aux blockbusters, et certainement pas à les prendre de haut. D'ailleurs le précédent opus de cette adaptation avait reçu une critique - nettement - plus positive.

Un simple coup d'oeil permet d'en juger, on republie depuis des semaines plusieurs dossiers consacré à notre amour de Nolan, on publie fréquemment dans la catégorie "mal-aimés" des articles sur des blockbusters qu'on estime... mal-aimés justement.

Le dernier blockbuster sorti, à savoir Greenland a probablement reçu son retour le plus positif sur Ecran large (à l'écrit, et en vidéo). On vient tout juste de publier une autre vidéo, pour revenir sur Starship Troopers, énorme blockbuster cher à notre coeur.

Pour revenir sur le film dont vous parlez directement, la plupart des éléments que vous avancez sont parfaitement subjectifs. Vous pouvez trouver Bill Skarsgård très bon, pour ma part je le trouve extrêmement mal dirigé, et quand sa prestation peut/pourrait devenir intéressante, pas mal d'altérations numériques la ruinent souvent.

Quant à l'intention de mise en scène, là aussi, on peut l'évoquer, mais c'est une des faiblesses notables de Muschietti. Il met en scène essentiellement pour pousser des effets, pas spécialement en faisant de son cadre un espace narratif, et ce, depuis Mama.

Et pour autant, ce que vous écrivez n'a rien d'un "mensonge". C'est une opinion, différente de celle mise en avant ici.


19/08/2020 à 16:16

Je suis exaspéré par les critiques de ce site. Essentiellement réducteurs et agressifs. Pas l'ombre d'une recherche de sens de la réalisation. Quand on parle de cinoche pop corn, on vous perd.
Les deux opus de Ça sont excellents. Oui ils ont des défauts mais quel film est parfait ?
Il remet au centre un clown qui a un aspect vraiment effrayant, vous ne parlez même pas de l'acteur qui le joue vraiment avec conviction, vous dénigrez la photo, vous vomissez simplement sur ce film parce que c'est un blockbuster.
Tout cet article, ainsi que pas mal d'autres de votre site, est un ramassis de critiques exagérées à la limite du mensonge. J'aimerai bien savoir d'où vient cette rage...

Klm
19/08/2020 à 08:24

Cher auteur, le but d'un remake n'est pas de refaire la même chose. Personnellement, je n'irais jamais voir un remake trop ressemblant à l'original. De plus vous ne semblez pas avoir compris ce qu'est Gripsou ! Il n'est ni un Homme, ni un clown ni même un lépreux. C'est une entité céleste plus vieille que l'humanité. Elle a la faculté de se transformer et de se téléporter par conséquent, heureusement qu'ils n'ont pas simplement grimé grossièrement le pauvre Bill. Le but n'est pas de s'en remettre entièrement au jeu d' acteur, la scène de Vicky par exemple ne serais rien sans le maquillage, les effets post prod et le jeu d'acteur ENSEMBLE. Votre avis n'est pas objectif et non seulement parce que je ne le partage pas.

Fyah87
18/08/2020 à 23:16

Ce qui me fait le plus rire c'est que peu de commentaires postés à la suite de cette analyse ne rejoignent en rien les dires de l'auteur de l'article.
De plus, le pompon, la cerise c'est quand même les gens qui postent des commentaires avec des termes qu'eux mêmes ne savent même pas ce qu'ils veulent dire.
Perso j'ai adoré les deux films, même si le deuxième est un peu longuet parfois. Mais de là à le démonter ainsi, je dis non Monsieur!

Ravens
18/08/2020 à 21:19

Écran large aime bien démonté des film comme toujours. Étant un grand fan de Stephen King j'ai lu IT des dizaines de fois et je dois dire que ce film est l'adaptation la plus réussi de ce livre culte, certes il est pas parfait mais c'est pas une raison de démonté un film comme ça.
P.S : quand à Gemini Man à côté ce film {IT} est un chef d'œuvre ????

Sameroth
18/08/2020 à 18:23

Certes les goûts et les couleurs de discutent depuis la nuit des temps. Mais si vous sortez autant de co***ries pour un film superbe, surtout quand on le compare à la première version de 1990 qui était décevant à souhait, je me demande ce que vous pouvez dire d'un Sharknado ou Transmorfers qui sont des trou noir d'effets spéciaux médiocre et sans aucune histoire qui tienne la route.
Franchement, descendre des films comme celui là, quel film trouvez vous bien du coup ?
J'hallucine...

Simon Riaux
18/08/2020 à 14:11

@Rorschach

Oh bah merci à vous !

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