Gotham by Gaslight : critique victorienne

Christophe Foltzer | 31 janvier 2018 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Christophe Foltzer | 31 janvier 2018 - MAJ : 09/03/2021 15:58

On ne le dira jamais assez, mais la division vidéo animée de DC Comics est peut-être ce qui est arrivé de mieux à nos super-héros. Adaptant les histoires les plus populaires comme les plus marginales, elle prend les risques que refuse d'affronter le DCEU. Et c'est toujours une bonne nouvelle, comme le rappelle Gotham by Gaslight de Sam Liu, disponible en VOD depuis le 23 janvier, et en Blu-ray et DVD le 28 février.

Après nous avoir régalé avec le très bon Batman et Harley Quinn, on se demandait bien ce que DC Animation nous préparait comme nouvelle friandise. Quelle ne fût pas notre surprise lorsque nous avons appris que c'était le classique Gotham by Gaslight de Mike Mignola qui allait ensuite être adapté, avant que le très énigmatique Batman Ninja vienne nous chauffer les rétines. Et on ne pourra pas accuser Warner et DC de ne pas prendre de risques tant Gotham by Gaslight bouscule nos habitudes.

 

 

 

FROM HELL

Nous nous retrouvons donc dans un Gotham victorien aux forts accents de Londres et de Whitechapel, à la veille de l'ouverture d'une exposition universelle financée par Bruce Wayne. Sauf que depuis quelques temps, il se passe des choses bizarres dans les bas-fonds de la ville : un type déguisé en chauve-souris se fracasse du criminel tandis qu'un autre homme masqué tue des femmes de façon atroce et se fait appeler Jack l'Eventreur.

Batman se met donc en tête de l'arrêter, surtout après qu'il ait assassiné sauvagement Pamela, alias Poison Ivy, qui avait grandi avec Bruce dans le même orphelinat, sous la direction de la bienveillante sœur Leslie. Mais dans une ville où tout le monde est un coupable potentiel, la tâche sera difficile et l'aide de Selina Kyle ne sera pas de trop.

 

Photo

Batman by Gaslight

 

Ce qui ravit d'emblée dans Gotham by Gaslight, c'est son ton, sombre et adulte, totalement assumé là où le DCEU fait sa timide. Clairement orienté vers un public jeune adulte, le film pose immédiatement ses bases : il sera violent et sexuel. Toujours dans une certaine délicatesse, évitant autant que possible des meurtres trop graphiques, mais l'intention est là. A la manière du From Hell d'Alan Moore, Gotham by Gaslight épouse les ténèbres pour nous livrer une peinture acide d'une société en pleine déliquescence, au croisement de deux siècles, tentant l'impossible bond progressiste alors que les mentalités anciennes détiennent encore le pouvoir.

 

Photo Gotham by Gaslight

Un Jack l'Eventreur très, très impressionnant

 

BATMAN THE RIPPER

Si l'intrigue reste, somme toute, assez classique, elle nous réserve néanmoins quelques savoureuses surprises, principalement en ce qui concerne l'utilisation des figures bien connues de cet univers. Si Bruce Wayne et Jim Gordon ne changent a priori pas trop de ceux que l'on connait, le film prend donc un malin plaisir à jouer avec les trois générations de Robin (ici des orphelins voyous détroussant les passants), ou encore Harvey Dent, très loin du Double-Face que l'on connait mais déjà animé de pulsions morbides.

 

Photo

Selina Kyle, pas vraiment une faible femme en détresse

 

Si nous ne dévoilerons pas le cœur de l'intrigue et le coup de théâtre de l'histoire pour préserver ceux qui n'auraient pas lu le comics, on se rend rapidement compte que ce Gotham by Gaslight est probablement le film le plus politique et social de tout l'univers DC, et que sa sortie en plein scandales sexuels n'est pas un hasard.

En effet, le métrage se veut avant tout comme une peinture au vitriol des jeux de pouvoirs entre hommes et femmes, et de la place de ces dernières dans la société. C'est bien connu, la métaphore utilisant le passé est toujours un excellent moyen de mettre en lumière les excès et les dérives de notre époque. Et cela fonctionne particulièrement bien dans Gotham by Gaslight.

 

Photo

Jack sème la terreur dans les rues de Gotham

 

D'un point de vue technique, le film oscille entre le correct et le très bon. Si, dans l'ensemble, l'animation est assez moyenne et figée, l'accent a évidemment été mis sur les nombreuses scènes d'action, impressionnantes, fluides et tendues, où l'on ressent bien les coups. Dans ces instants, le talent des animateurs explose et nous réserve quelques très belles séquences (on pense à la baston sur le zeppelin par exemple, où dans l'abattoir).

Le design des personnages suit, en revanche, un parti-pris des plus intéressants dans le sens où il essaye de mixer le trait si particulier de Mike Mignola avec la charte graphique établie par Bruce Timm il y a presque 30 ans. Là encore, Gotham by Gaslight remporte le pari haut la main puisque la rencontre entre ces deux univers est homogène, les hommes étant issus de l'école Mignola, tandis que toutes les femmes trouvent leur beauté et leur grande sensualité dans le trait si félin de Bruce Timm (dont le talent pour créer des personnages féminins n'est plus à prouver).

Evidemment, dans le lot, c'est bien entendu Selina Kyle qui tire son épingle du jeu et se révèle comme le personnage le plus intéressant de tout le film, le véritable héros de l'histoire ; une femme forte, indépendante tout autant que complexe, loin des clichés habituels, bref un vrai être humain.

  

Affiche officielle

Résumé

Palpitant, profond, sombre, intelligent et extrêmement divertissant, Gotham by Gaslight est donc une nouvelle réussite de la branche animation de DC et Warner, et prouve une fois de plus que le DCEU devrait clairement s'en inspirer plutôt que de s'échiner à copier Marvel.

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commentaires
Kryss
02/03/2018 à 01:44

Plus qu'un repompage à quel qu'ouvre que ce soit. Gotham n'y Gaslight est une relecture de la mythologie du chevalier noir à une époque victorienne et n'a d'autre ambition que d'être un what if plaisant pour le fan qui retrouvera ses personnages préfèrés dans une situation tantôt attendu, tantôt inédite... Si l'intrigue est tout à fait convenu, malgres un twist final réussi. Le film se regarde surtout pour son côté original que novateur. Un film pour les fans de Batman, les autres n'y trouveront pas forcément leur compte. Quand à la température de l'eau, elle variera selon les plaisirs de chacun.

figueras
02/02/2018 à 11:25

dommage que techniquement c'est à la masse, on dirait un dessin animé d'il y a 20 ans

mikegyver
01/02/2018 à 11:04

oubliez pas batman et scooby-doo, il est sombre et adulte lui aussi ?

lol

Kryss
31/01/2018 à 18:50

Pompage évident du From Hell d’Alan Moore pour les motivations de Jack l’eventreur et les atrocités contre les femmes qu’il rencontre, pompage graphique évident de Kevin O’Neal ( visage et vêtements des femmes, accessoires steampunk’ etc )pour son travail sur la Ligue des Gentlement Extraordinaires... écrite par Moore. Comme quoi DC Animated n’arrive toujours pas à s’affranchir de son influence et de celle de Frank Miller... comme le DCEU.
Bon, le pilote de Thé Aliénist est dans le même cas. Il faut dire que les créatifs au pouvoir maintenant ont été ado dans les années 80...

Sinon désolé, mais j’ai trouvé gaslight ennuyeux, et plutôt prévisible, plein de fausses audaces parce que pas vraiment dérangeantes. Critique sociale mais pas trop... d’ailleurs les trois gamins pauvres vont visiblement s’en sortir, le mal ne vient que d’un esprit dérange ET réactionnaire ET taraude par la haine/peur des femmes. Tellement en dessous de V for vendetta, from hell... pour parler œuvre française, il n’y a qu’a (re)lire les passagers du vent de François bourgeon pour se rendre compte que tout ça est de l’eau tiède.

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