Golem, le tueur de Londres : Critique éventrée

Christophe Foltzer | 22 janvier 2018 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Christophe Foltzer | 22 janvier 2018 - MAJ : 09/03/2021 15:58

Le cinéma vit actuellement une véritable transformation en profondeurs avec la multiplication des supports. Et paradoxalement, cela décourage certains distributeurs à sortir des films "à risques" en salles. Et dans le cas de Golem, le tueur de Londres, c'est fichtrement dommage.

Juan Carlos Medina nous avait déjà bien soufflés en 2012 avec son Insensibles et son histoire de gamins qui ne pouvaient pas ressentir la douleur et la quête de vérité qui animait son film. Il revient donc 5 ans plus tard avec ce Golem, le tueur de Londres qui poursuit encore plus loin le voyage derrière le rideau, au-delà des apparences.

Et cette fois, c'est à Londres qu'il nous transporte, en 1880 même, alors que le quartier de Limehouse est la cible de meurtres sanglants par un tueur mystérieux surnommé le Golem. Scotland Yard refile l'enquête à l'inspecteur Kildare, placardisé parce que suspecté d'homosexualité. En parallèle, Lizzie Cree, ancienne actrice populaire, est arrêtée, soupçonnée d'avoir empoisonnée son mari, auteur raté. Les deux affaires ne vont pas tarder à se croiser alors que Kildare soupçonne l'entourage de Lizzie d'être étroitement lié au Golem et, du fond de sa cellule, elle va lui raconter sa vie tragique, le policier espérant y récolter de précieux indices.

 

Photo Douglas Booth, Olivia Cooke

Olivia Cooke et Douglas Booth

 

FROM ELLE

Ce qui frappe d'emblée dans Golem, le tueur de Londres, c'est l'ambition de sa direction artistique et l'ambiance poisseuse qu'il installe. Evidemment, on pense tout de suite au From Hell des Frères Hugues, mais dépecé de son aspect grandiloquent qui rendait le tout un peu toc. Ici, nous évoluons dans les bas-fonds du vieux Londres, là où Jack l'Eventreur fait son nid et où le Golem commet ses crimes atroces. Une peinture très macabre qui n'est que le reflet de notre époque, entre course à la popularité, pauvreté sans cesse grandissante et disparition de la classe moyenne programmée.

 

Photo Bill Nighy

Bill Nighy mène l'enquête

 

C'est bel et bien à la misère actuelle que s'attaque Medina sous forme de métaphore victorienne et le portrait est malheureusement assez juste. La vie n'y épargne personne et se fait un malin plaisir de pervertir les âmes les plus innocentes. D'ailleurs, Golem, le tueur de Londres risque d'en décevoir plus d'un tant il abandonne rapidement son enquête ténébreuse et la menace annoncée pour ne se concentrer que sur l'univers du music-hall dans lequel évolue Lizzie Cree jusqu'au matin fatidique où elle retrouve son mari mort empoisonné dans son lit. Si l'on passe outre cette trahison en regard de la promesse, nous sommes du coup face au vrai message du film, et il est passionnant.

Car c'est bel et bien le concours à la popularité, le narcissisme et les moyens d'accéder à la célébrité qui constituent le coeur du film. Chaque personnage y cherche une reconnaissance pour des raisons propres et est prêt à tout pour l'obtenir. En ce sens, Golem, le tueur de Londres se pose comme une véritable peinture au vitriol de notre époque, masquée sous des oripeaux victoriens pour mieux faire passer la pilule.

 

Photo Olivia Cooke

 Olivia Cooke

 

SEXE, MENSONGES ET IDEAUX

Ainsi, le récit fonctionne exclusivement sur le faux-semblant, le point de vue altérant la vérité, le mensonge et la manipulation. Personne n'est ce qu'il semble être et l'histoire tient en haleine du début à la fin même si les plus habitués à ce genre de scénarios auront tôt fait de deviner le retournement de situation final. Mais cela n'est pas trop grave puisque le film reste efficace et passionnant, d'autant qu'il est porté par des comédiens en pleine forme.

 

Photo Bill Nighy

 Bill Nighy

 

Bill Nighy évidemment, tiré à quatre épingles, dont le flegme ne tarde pas à se craqueler alors que son affect prend le dessus sur son bon sens, parfait de bout en bout, impérial et charismatique au possible, il confirme qu'on aimerait le voir encore plus souvent et qu'il excelle dans des rôles borderline. Douglas Booth surprend dans le rôle de Dan Leno, acteur célèbre des bas-fonds, trouble et décadent, déconnecté de la réalité, véritable vampire intellectuel et émotionnel qui n'hésite pas à utiliser les drames qui l'entourent comme autant de carburant pour ses spectacles et rester en haut de l'affiche.

Mais la grande révélation du film, c'est bel et bien Olivia Cooke, dans le rôle de Lizzie Cree. Fade et transparente dans le pathétique Ouija, elle imprime ici chaque plan de sa présence, de son intensité de jeu, de son regard innocent mais qui cache une énorme part d'ombre. Un rôle intense, auquel elle s'offre intégralement et qui laisse présager du meilleur pour Ready Player One.

 

Affiche française

 

Résumé

Si Golem, le tueur de Londres n'est au final pas la resucée attendue de From Hell, il est par contre un vrai film à découvrir, tant il parle de notre époque et de ses aspérités. Magnifiquement mis en scène et superbement interprété, il vous plongera dans un cauchemar qui risque de vous surprendre et vous laissera sans aucun doute K.O. à la fin. Disponible en vidéo et VOD à partir du 23 janvier 2018.

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commentaires
Confinou le confiné
10/04/2020 à 09:36

Le cadre victorien bien que très beau nous a semblé un peu vu et revu depuis ces quelques dernières années depuis l’anniversaire de la mort de Charles Dickens en fait. La fin est incompréhensible ????

Carolyn81
28/03/2020 à 19:05

Oui, elle a été pendue, et elle l'a été fièrement car persuadée qu'on retiendrait d'elle qu'elle était le Golem.
Du mal avec la fin, l'actrice qui meurt sur scène. Simple désir de reconnaissance pour Dan qui veut rester au devant de la scène ? Preuve qu'il était complice ? Ou crime unique pour venger celle qu'il a toujours soutenue ?

Chrisou
17/07/2018 à 22:52

Les costumes et l'ambiance est vraiment top. En revanche la fin est trop prévisible. Assez rapidement les plus avertis d'entre nous la comprenne. Toutefois cela ne gâche le plaisir.
Je ne comprends pas vraiment le clap de fin ou ses "amis " jouent son histoire...

Cathiou
06/06/2018 à 22:40

Je n’ai également pas saisi la fin. Pourquoi cet accident sur la scène ? Pourquoi cette froideur en reprenant le rôle ? Est-ce lui ? Étaient-ils tous les deux coupables ?
Oups je reste sur ma fin

Amari
13/04/2018 à 00:23

Je n'ai malheureusement pas compris la fin. A-t'elle oui ou non , été pendue ?

Bubu
26/01/2018 à 20:44

Très bon film

MystereK
19/12/2017 à 10:46

J'ai beaucoup aimé ce film même siu le twist final peut être prévisible assez tôt dans le film. L'ambiance victorienne rendue ici est très imersive et les acteurs sont tous impécables.

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