Critique : Jamais le premier soir

Simon Riaux | 26 décembre 2013
Simon Riaux | 26 décembre 2013
On se souvient du film à sketch Les Infidèles, à l'initiative de Jean Dujardin et Gilles Lellouche, où les deux compères se mettaient en scène dans une tripotée de situations scabreuses. Depuis, ces messieurs ont perdu leurs meilleures moitiés et tout pourrait laisser croire que ces dernières ont dans l'idée de leur répondre avec Jamais le premier soir, tant les thèmes et interrogations qui traversent les personnages d'Alexandra Lamy et Mélanie Doutey semblent faire écho au film pré-cité autant qu'à ses auteurs. Les deux œuvres partagent également un autre point commun essentiel : leur intégrale médiocrité.

Écrites en quatrième vitesse pour ne pas louper les diverses commissions de lectures, produites à la chaîne pour économiser un maximum, tournées au galop pour la même raison, la plupart des comédies françaises sortent systématiquement du même moule industriel et celle qui nous intéresse ne fait pas exception à la règle. De son schéma vu mille fois (une femme un-peu-fofolle-mais-attachante en quête d'amour écume moult blaireaux mais ne devine pas que derrière la moustache de son gros baiseur de libraire, bat un cœur qui ne palpite que pour elle), le film ne daigne jamais s'écarter, exception faite de quelques parenthèses vulgaires et méprisantes dans le quotidien de ses personnages secondaires. Le temps d'un coït sur une chaise de bureau ou d'un éloge hypocrite de la routine conjugale, Mélanie Drigeard laisse ainsi entrevoir sinon du mépris pour les caractères qu'elle dépeint, à tout le moins une artificialité malvenue (les filles ça se câline quand c'est triste, et ça fait les fofolles quand c'est bourré).

On l'aura compris, Jamais le premier soir fait sien la nullité institutionnalisée du cinéma hexagonal, sans oublier de lui adjoindre son pendant technique de produit télévisuel. Le métrage fait ainsi preuve dès la destruction – réjouissante sur le papier – qui ouvre le récit, d'une incompétence technique hors normes. Le montage souffre d'une arythmie qui aurait raison d'un athlète chevronné, la mise en scène a recours à quantité d'artifices pour masquer le règne triomphant du champ/contre-champ, allant jusqu'à gâcher même les clichés les facilement exécutables du genre, tels que la séquence de drague sur fond de panorama parisien.

À lire le dossier de presse, Mélanie Drigeard était particulièrement émue d'appartenir à la dernière génération de réalisateurs auxquels il aura été donné de débuter leur carrière sur pellicule. Elle a bien raison. Pour notre part, nous prions pour qu'elle appartienne à la dernière génération de cinéastes qui se seront vus confier une caméra en dépit de leur indiscutable incompétence.

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