All about Albert : critique

Geoffrey Crété | 25 mars 2014 - MAJ : 18/07/2018 15:01
Geoffrey Crété | 25 mars 2014 - MAJ : 18/07/2018 15:01

Dans la famille du ciné indé américain, Nicole Holofcener souffre d'un mal trop commun : celui d'écrire des films faussement banals, enfermés dans une case réservée aux puristes. Mais son sixième film, qui marque l'une des ultimes apparitions de James Gandolfini, confirme toute la délicatesse de sa plume.

Nicole Holofcener a connu une minute de gloire lorsqu'en 2005, la sortie de Friends With Money a été emportée dans l'ouragan du divorce de Jennifer Aniston - qui y a trouvé l'un de ses meilleurs rôles, celui d'une femme de ménage paumée et sans amour propre. Dix ans plus tard, le destin a encore frappé, en beaucoup plus noir, puisque All About Albert a été médiatisé suite à la disparition de James Gandolfini, qui y a trouvé son dernier rôle principal, à contre emploi en plus. Mais là encore, le film, qui marque le grand retour de la réalisatrice dans les salles françaises, mérite plus qu'une simple couverture de circonstance.

 

 

All About Albert porte très mal son titre français puisque comme les précédents de Holofcener, il tourne autour des femmes : la géniale Julia Louis-Dreyfus, quadra divorcée, sans vie affective mais avec une fille adolescente ; Toni Collette, bourgeoise tourmentée par son salon et sa femme de ménage ; et l'inévitable Catherine Keener, muse de la réalisatrice depuis ses débuts. Mais cette fois-ci, Nicole Holofcener abandonne la forme du film chorale pour se concentrer sur une héroïne, quitte à réduire le spectre des émotions à une parade : celle d'un vaudeville de luxe articulé autour d'Eva, qui réalise que l'homme qu'elle commence à aimer est l'ex-mari de sa nouvelle amie, laquelle en a dressé un portrait peu flatteur. L'issue de cette impasse, tout comme son exécution, sont bien connus. Au point que ce fameux Albert, archiviste dans le secteur de la télévision, explique que l'image contemporaine n'a pas le charme de celle d'antan. Une manière d'assumer l'approche désuète qu'a la cinéaste de la comédie romantique.

  

 

Mais la richesse de Nicole Holofcener, qui alterne systématiquement les DTV et sorties cinéma en France depuis son premier essai Walking and Talking en 1996,  est ailleurs : dans la somme de détails empilés pour construire ses personnages, les dialogues délicieusement décalés d'une banalité assumée, cette douceur posée sur la violence normale, ou encore l'énergie collective dégagée par une troupe de comédiens fantastiques. Maintenue dans l'ombre par les succès de ses pairs, de James L. Brooks à Lisa Cholodenko, Holofcener a maintenu le cap d'une belle filmographie, dévouée à la complexité tragi-comique des interactions humaines. Avec la même émotion rassurante en fin de parcours : celle d'avoir atteint, en même temps que les personnages, une forme de paix avec soi-même, le monde, ses faiblesses et ses limites. Comme Sarah qui a cessé de vouloir contrôler son univers à tout prix, Eva qui accepte l'imperfection de l'Autre, et Albert qui embrasse la maladresse d'Eva. Ce n'est certainement pas un hasard si le titre original est Enough Said (Assez parlé) : il y a une certaine beauté dans l'évidence du film.

 

Résumé

Nicole Holofcener rappelle qu'elle est une fabuleuse scénariste avec cette romance désuète, plus mécanique que ses précédents films, mais brillamment écrite. Avec une Julia Louis-Dreyfus irrésistible.

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