Critique : Le Géant égoïste

Christophe Foltzer | 16 décembre 2013
Christophe Foltzer | 16 décembre 2013

Petite bête de festival, Le Géant Egoïste sort enfin sur nos écrans, histoire de bien nous flinguer le moral juste avant les fêtes. Car oui, Le Géant Egoïste est dur, sale, déprimant, sans pitié. Et c'est justement ce qui fait sa force. En suivant deux adolescents rejetés par le système vivre au jour le jour dans la campagne anglaise, la réalisatrice Clio Barnard nous montre un pays poisseux, honteux, où règne la loi du plus fort, bien loin des images d'Epinal exhibées lors du mariage du Prince William. Dans cette jungle moderne, seuls les plus roublards et les plus impitoyables survivront. A l'image de ce ferrailleur ambigu qui va utiliser les adolescents pour son propre profit, les conduisant vers un avenir des plus sombres avant qu'un ultime sursaut de culpabilité lui rappelle qu'il est encore un humain.

On pouvait craindre devant l'étalage de poncifs du drame social anglais, que la mayonnaise ne prenne pas. Car, en effet, entre le grand frère à problèmes, la mère détruite mais pleine d'espoir pour ses enfants, le père enfermé dans sa névrose et qui ne comprend pas ce qu'il fait et la grisaille permanente, nous sommes en terrain connu, pour une histoire somme toute assez classique et déjà vu. Pourtant, ça fonctionne. Parce que Clio Barnard installe un climat d'une lourdeur rarement aussi évocatrice, que le milieu qu'elle dépeint n'est jamais caricaturé ou jugé, elle arriverait presque à créer un univers à part entière qui rejoindrait la dimension de conte moderne suggéré par le titre. Mais ceux qui emportent tout sur leur passage, ce sont bel et bien les comédiens. Et particulièrement l'incroyable Conner Chapman, le plus jeune de tous, qui fait preuve de tellement d'authenticité, d'intensité et de talent qu'on a peine à croire ce que l'on voit. C'est bien simple, il porte le film à lui tout seul, entouré d'un casting solide et compétent, mais forcément moins percutant et impressionnant.

Pourtant, Le Géant Egoïste ne plaira pas à tout le monde. Le manque d'espoir et la lourdeur du film étant ses principaux handicaps. La misère (économique, sociale, humaine) est par instants trop appuyée et l'intrigue beaucoup trop prévisible pour vraiment convaincre. N'empêche, on ressort de la projection déboussolé, la gorge sèche, avec une féroce envie de se regarder un Disney, là, tout de suite. Le Géant Egoïste un très bon premier film et c'est une très mauvaise idée de le sortir pour les fêtes de Noël quand, justement, le public essaye vaille que vaille d'oublier ce que ce film ne manquera pas de lui rappeler.

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