Critique : Jeune & jolie

Sandy Gillet | 16 mai 2013
Sandy Gillet | 16 mai 2013

Comme souvent avec Ozon, le "film d'après" ne cherche pas à creuser le sillon d'une thématique entendue ou d'obsessions récurrentes. C'est à la fois la force et la faiblesse de son cinéma. Une force régénératrice qui passe par d'incessantes remises en question, une faiblesse inhérente à celui qui prend des risques et qui peut se planter. Plus (Le temps qui reste) ou moins (8 Femmes / Ricky / Le refuge...). Jeune & jolie surprend une nouvelle fois tout en reprenant (un peu) la forme dramaturgique de 5x2 qui se concentrait par des vignettes temporelles sur des moments précis pour mieux comprendre le tableau d'ensemble. Ici le film est structuré par saisons où Ozon privilégie à chaque fois le point de vue d'un des personnages principaux tout en biaisant très rapidement son axe de réflexion et de mise en scène en mettant Isabelle au centre de tout. Jeune ado de 17 ans, Isabelle se prostitue pour le plaisir. Et Ozon de nous montrer sans aucune velléités sociologiques ce qui peut pousser un tel « choix de vie ».

Isabelle c'est Marine Vacth, une quasi-inconnue que l'on a pu remarquer dans un spot publicitaire, La nuit de l'homme d'Yves Saint Laurent avec Vincent Cassel, mais aussi dans Ma part du gâteau de Klapisch et Ce que le jour doit à la nuit d'Arcady. Taille mannequin (entendre anorexique), faux air de Maïwenn avec un talent évident irradiant chaque plan, elle est littéralement cette « jeune & jolie » de la décennie 2010. Une ado sans tabous à l'aise dans son époque qui cherche la transgression sans très bien savoir ce que c'est (encore). Ozon la filme en mode voyeur mais sans jamais brusquer ses cadres. Il n'y pas de viol. Tout est consenti avec un naturel confondant. Ozon y cherche la pureté des sens dans une démarche qui aux yeux de l'adulte est pervers. Une dichotomie magnifiquement montrée et une démarche qui rappelle dans la forme la subtilité d'un Truffaut et la vitalité d'un Rohmer.

La pointe de frustration viendra de cette volonté justement de ne pas assumer le portrait d'une génération. De ne pas donner un peu de hauteur à un récit certes jamais étouffant mais in fine toujours la tête dans le guidon. Un choix assumé et certainement respectable mais qui manque d'ampleur tant le reste est couillu et d'une finesse à fleur de peau. On manque aussi d'un peu d'empathie et de mystère à l'image de son Sous le sable de chef-d'œuvre, mais la fraîcheur de sa démarche associée à une spontanéité d'écriture font de ce Jeune & Jolie une belle petite musique orchestrée par un réalisateur au fait de son talent.

Résumé

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