Lincoln : critique

Laurent Pécha | 30 janvier 2013 - MAJ : 05/08/2018 14:19
Laurent Pécha | 30 janvier 2013 - MAJ : 05/08/2018 14:19

Steven Spielberg de retour au sommet. Daniel Day-Lewis aussi.

Nous avions laissé il y a tout juste un an Spielberg au temps de la 1ère guerre mondiale pour qu'il nous conte l'extraordinaire histoire d'amitié entre un jeune homme et un cheval - et accessoirement truster la 1ère place de notre classement de 2012. On retrouve ici le réalisateur plongé quelques décennies en arrière pour une œuvre historique qu'il affectionne depuis une certaine Liste de Schindler. Mais, si par le passé Spielberg s'était toujours permis une grand part de fiction dans ses films à connotation historique, il n'en est (presque) rien ici. Le cinéaste s'attaque, en effet, ni plus ni moins qu'à Lincoln, le plus célèbre des présidents des Etats-Unis et principalement la période clé où ce dernier fit tout (et c'est ce "tout" que Spielberg va nous rendre passionnant) pour faire voter un 13ème amendement à la Constitution de son pays pour permettre l'abolition de l'esclavage alors même que les Etats-Unis sont plongés depuis des années dans une guerre de sécession des plus meurtrières.

 

 

Si l'ombre d'Amistad, l'un des rares vrais échecs artistiques de la carrière du réalisateur, plane sur Lincoln de par le sujet (autour de l'esclavagisme) et le choix de confiner la majeure partie du récit entre les murs de bâtisses où les puissants discutent du sort du pays et des hommes, le résultat à l'écran est tout autre. Comme une sorte d'antidote absolu, Spielberg réussit ici tout ce qu'il avait raté par le passé. Si, pour autant, son nouveau film est tout aussi bavard si ce n'est plus, chaque mot, chaque séquence dialoguée est au service d'un plus grand dessein que le cinéaste ne perd jamais de vue. Désirant faire tout à la fois œuvre de mémoire et film de son temps avec des résonnances troublantes avec notre actualité brûlante, Spielberg parvient à mettre en scène aussi didactiquement que cinématographiquement l'importance universelle et intemporelle du combat mené par Lincoln pour abolir l'esclavage.

 

 

Pour ce faire, armé d'un script d'une rare pédagogie et source de multiples séquences d'éclat (la remarquable présentation de Lincoln après une courte séquence de combat, la seule scène « d'action » du film, les manipulations diverses et variées pour obtenir les voix nécessaires,...), le maestro s'évertue à insuffler à la moindre parcelle du récit son savoir-faire technique et narratif et ainsi de permettre de ne jamais oublier que l'on se trouve bien avant tout en face d'une œuvre cinématographique.  Et quoi de mieux pour résumer et même synthétiser tout le génie spielbergien que cette extraordinaire séquence du vote 13ème amendement où tout l'art du cinéaste - choix des plans, montage, jeu des comédiens,...-  éclate de la plus brillante des façons au point de nous river à notre fauteuil alors que l'issue est connue de tous.  Et le bougre de continuer peu de temps après en nous cueillant émotionnellement avec une scène aussi magnifique que simple mais qui résume de la plus belle des manières le combat rhétorique mené par Lincoln. Un Lincoln que Daniel Day Lewis ne se contente pas d'incarner tant le comédien est parvenu à créer ce qui sera sans doute à jamais dans l'imaginaire des gens la personnification absolue du 16ème Président des USA (l'Oscar l'attend déjà).

 

 

Admirablement secondé par des acteurs tous parfaits (une bonne vingtaine de rôles d'importance capitale et parfaitement joués dont un impressionnant Tommy Lee Jones et la revenante et admirable Sally Fields en femme du Président), Daniel Day Lewis est bien cette mémorable figure de proue - on ne se lasse pas de ces formidables histoires-anecdotes du Président pour faire passer son message - et le parfait reflet-relais d'un cinéaste au sommet de son art qui signe avec Lincoln l'un des longs-métrages les plus aboutis de sa prestigieuse filmographie.

 

 

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