Critique : Electrick children

Thibaud Gonzalez | 26 juin 2013
Thibaud Gonzalez | 26 juin 2013

Avec ce tout premier long-métrage, présenté au festival américain de Deauville en septembre 2012, Rebecca Thomas nous embarque dans un road-movie à tendance mystique et religieuse. Un film sur une jeunesse un peu paumée, teinté d'immaculée conception. Presque un choc des civilisations, quand la jeune Rachel s'enfuit de sa communauté mormone natale pour découvrir le monde extérieur, et notamment Las Vegas.

Au premier abord, Electick Children est un de ces films qui traite de l'adolescence, celle en perte de repères, celle qui dérive, perdue dans une société qui ne la comprend pas. Le long-métrage déroule donc de temps à autre certains des éléments archétypaux inhérents du genre : liens familiaux mis à mal (parents qui obligent, qui rejettent, ou qui manquent), jeunesse recréant sa propre société à part, incompréhension des générations... Malgré tout, le film ne cherche jamais à s'aventurer dans la description d'une réalité crue (on n'est pas chez Larry Clark). La grossesse de Rachel, 15 ans, qu'elle pense immaculée, n'est jamais prétexte à aborder des thèmes comme l'avortement, le viol ou la pédophilie. L'ambiance qui règne dans le groupe des jeunes skateurs marginaux rencontré à Las Vegas n'est elle pas forcément synonyme de sexe, drogues et rock'n'roll (mais plutôt de blagues téléphoniques, de pizzas et de jeux vidéo). Le film se place donc souvent dans une posture plutôt optimiste, aidé en cela par l'incroyable luminosité de Julia Garner (au sens propre comme au figuré, puisqu'elle fut apparemment assez difficile à éclairer), qui manie parfaitement ce mélange entre candeur et détermination. Le film baigne dans une ambiance très claire, et ce même dans les scènes de nuit, renforçant une impression de douceur.

Mais ce qui pourrait paraître comme un défaut, un manque de prise de risque (voire une certaine pudibonderie, la réalisatrice venant elle aussi de la communauté mormone), n'en est finalement pas vraiment un. Electick Children cherche en fait à aller plus loin que le simple film sur l'adolescence, puisque le parcours de Rachel s'apparente finalement à une quête quasi mystique. La voix de l'homme qu'elle a entendu chanter à travers une cassette audio, voix qu'elle considère comme à l'origine de sa grossesse, s'apparente alors à celle du Saint Esprit. La réalisatrice laisse délibérément le doute quant à savoir si cette immaculée conception est réelle ou n'est qu'un délire, et le film devient alors une sorte de version contemporaine et réaliste de l'histoire de la vierge Marie. Il évite heureusement d'appuyer outrageusement cet aspect en distillant ça et là quelques éléments mystiques et mythologiques (s'inspirant parfois aussi de contes, comme Alice au pays des merveilles). Seule la figure du magnétophone permettant à Rachel d'enregistrer chacun des évènements de son périple (véritable évangile en cours de rédaction), et prétexte à une voix off trop présente, peut rapidement fatiguer.

Electick Children, film aussi bien social que mythologique (voire presque fantastique), parvient à surmonter ce mélange difficile en trouvant un bel équilibre entre réalisme et conte mystique, et en évitant scrupuleusement de nous faire la morale.

 

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