Godzilla : critique du roi des monstres
Nanti d'un jeune réalisateur talentueux, accompagné d'un casting éclectique, Godzilla le film s'avance impérialement sur un chemin jonché de mines. Emblème d'un cinéma aussi adulé que moqué, figure légendaire d'une saga dont le grand public ne connaît finalement qu'une poignée de clichés, il fallait un miracle pour que l'expérience se différencie notablement des salves continues de blockbusters et de leurs vagues d'effets numériques. Plus qu'un miracle, c'est à la confirmation du talent de Gareth Edwards que nous assistons, l'avènement d'un artiste dont l'inspiration comme la sincérité terrassent un public qui n'en demandait pas tant.
ÉROTIQUE DU MONSTRE
Premier constat : Gareth Edwards s'inspire avec intelligence des Dents de la mer, décidant de retarder au maximum le dévoilement de ses titans. Et une fois les créatures en action, le metteur en scène s'échine à quasiment toujours conserver un point de vue ainsi qu'une échelle humaine sur les situations apocalyptiques qu'il décrit. Le résultat est littéralement tétanisant, nous permet de retrouver toute la puissance viscérale et symbolique de l'œuvre originale, tout en conférant à Godzilla une aura magnétique, qui irradie chaque scène, quand bien même le monstre en est absent.
De même qu'il retient les monstres jusqu'à son climax tellurique, Gareth Edwards aborde le genre auquel appartient Godzilla (le blockbuster de destruction massive) avec une intelligence et une dignité déjà présentes dans Monsters, son précédent film, et qui font cruellement défaut au cinéma hollywoodien contemporain.
Point de pornographie du chaos ici, ni de massacre de foules numérisées. L'artiste respecte trop la gravité des évènements qu'il dépeint pour traiter cyniquement du cataclysme qu'il filme. Le métrage ne s'attarde pas complaisamment sur les immeubles détruits, ne jouit pas de l'horreur et cherche au contraire à nous la faire ressentir de plein fouet. La mort n'est pas reléguée au hors champ, menace réellement les protagonistes, se révèle parfois saisissante alors que la caméra s'attarde sur un homme pulvérisé, balayé sans sommation par le Roi des monstres.
TRAGÉDIE MONSTRE
Un autre point fort du film est sa gestion des personnages. Si l'œuvre ne prétend pas révolutionner les canons du genre, elle les travaille avec soin. À nouveau, la comparaison avec son contemporain Pacific RIm est éclairante, nulle trace de side kick indigne dans les parages, tous les rôles se voient conférés une chair et une humanité palpable, à l'exception peut-être d'un Ken Watanabe engoncé dans un rôle en forme d'hommage au Godzilla originel.
En revanche, la destinée de la famille Brody s'avère un délicieux mélange de classicisme et de rigueur dramatique. Aaron Taylor-Johnson, tout de fragilité et de colère mêlées, est à ce titre un parfait premier rôle, dont la relation avec la Bête devrait faire verser une petite larme aux affiocionados de Miyazaki.
WE CALL IT... BLOCKBUSTER
S'il est impressionnant en diable, Godzilla n'oublie heureusement pas de nous divertir et se rappelle que les enfants que nous étions étaient aussi excités qu'effrayés par les créatures qu'ils découvraient à l'écran. Gareth Edwards décide de réserver toute sa puissance de feu pour un climax délirant en forme de choc des titans d'une ampleur tout simplement jamais vue au cinéma. L'angoisse disparaît alors au profit d'une euphorie juvénile, dont la maîtrise révèle un art de la mise en scène hallucinant.
Après avoir joué deux heures durant d'un rythme endiablé avec nos émotions les plus fortes, le metteur en scène clôt son récit avec un panache hors du commun, qui lui permet de synthétiser instantanément toutes les influences et aspirations du film. Et Godzilla d'imprimer nos rétines en un plan final dévastateur, où se superposent le monstre, l'icône, le vengeur et le protecteur quasi-mystique d'une Terre menacée par une humanité inconséquente.
Lecteurs
(3.7)16/04/2024 à 15:10
60 ans du monstre ! Gareth Edwards a été choisi à cause de son premier film « Monsters », qui savait traiter du rapport humains/créatures par le biais intime, et avec une bonne gestion des échelles.
Sur cette dernière partie, rien à y redire, c’est encore réussi. Par contre pour le côté intimiste c’est raté : ce film se présente comme faisant partie de la catégorie « film catastrophe », avec de simples humains essayant de survivre, ou de mettre leurs affaires en ordre avant de mourir. Sauf qu’on n’a pas un Godzilla seul, vu qu’il doit affronter des menaces au sein de la même histoire – non sans tuer plein d’innocents au passage, ce qui ne va pas gêner grand monde dans ces films du Monsterverse.
On se retrouve donc avec un résultat bâtard, refaisant le Godzilla de Emmerich (générique avec images d’archives classifiées, bêtes qui veulent surtout se reproduire) mais en se prenant très au sérieux, pour mieux émuler le film de 1954… Et dans le même temps, ça va tabasser des monstres parmis les plus moches jamais faits, espèces de blattes anguleuses, stylisées dans des tons de gris à même de séduire les spectateurs snobs.
Enfin, tabasser c’est relatif, quand le réalisateur semble avoir tout d’un coup honte de montrer la réalité d’une furie bestiale.
Ainsi en choisissant deux voies opposées, tout tombe à plat : les humains sont sous-écrits, n’arrivant pas à faire passer cette histoire de gens/monstres qui essayent désespérément de reformer leur famille (notamment des parents qui disparaissent d’une façon anti spectaculaire). Et il ne suffit pas de nommer le protagoniste principal du nom de Brody pour mieux se référer aux « Dents de la mer », car on n’a pas le même contexte.
Alors le héros éberlué passera son temps à se trouver pile sur la route des créatures, filant un bon coup de main toujours au bon moment… C’est vraiment trop gros. Surtout quand une partie du casting joue comme s’il faisait un AVC (mention particulière à la bouche bée de Ken Watanabe).
Et quand on se décide enfin à montrer les combats titanesques, la satisfaction s’accompagne d’un arrière-goût de frustration.
Bref le côté « Adulte » est superficiel, car pas assez subtil et exhaustif (on croirait Bryan Cranston débarqué d’une version sombre de « Malcolm »). Et le côté régressif n’est qu’une promesse qui ne peut pas être tenue pour cause d’excès de sérieux.
Apparemment la série « Monarch: Legacy of Monsters », qui se passe dans la foulée, suit la même voie problématique : un peu de monstres, un peu de décorum bien fichu à base de reconstitution d’époque… et beaucoup de drama qui agace, ainsi que d’origine d’une agence secrète qui n’intéresse que les plus geeks et complétistes. Remarquez c’était pas vraiment caché, tout est dans l’agencement du titre de la série – d’abord Monarch et les questions d’héritage, et enfin les monstres.
30/10/2021 à 00:18
J'ai préféré mille fois Skull island
Le film réussit l'exploit d'être chiant .
18/02/2020 à 09:39
@corle
Nope, la note n'a jamais changé.
18/02/2020 à 08:08
vous etes de mauvaise fois ecran large, a sa sortie vous avez mis 5 étoiles et aujourd'hui je constate qu'il est à 4 ? pourquoi?
18/03/2019 à 10:01
@NX
ce Godzilla est celui sorti en mai 2014, il est donc visible depuis un moment.
En revanche, personne n'a encore vu Godzilla : Roi des monstres à la rédaction, il arrivera seulement en juin prochain dans les salles.
18/03/2019 à 04:44
Et comment avez vous vu le film qui n'est aps encore sortie?
17/03/2019 à 20:52
Les goûts et les couleurs ... mais j’ai adoré ce film. Vu et revu. Idem que ses films de « combats « qui sont somptueux. Merci écran large j’en ai marre d’entendre que du bashing sur ce film.
17/03/2019 à 19:40
Film frustrant, on attend toujours que l'action démarre, et quand on se dit que ça va depoter, on passe à une scène suivante.
Trois étoiles et c'est bien payé.
17/03/2019 à 19:35
Tout l'inverse pour moi, rarement d'accord avec Écran Large mais là la note me convient très bien.
Le ton du film est très bien mené tout du long et e fait un très bon film (pour un blockbuster).
Curieux de voir la suite, après le médiocre " Skull Island"
17/03/2019 à 19:19
@JB : + 1