Critique : L'Amour et rien d'autre

Nicolas Thys | 17 avril 2012
Nicolas Thys | 17 avril 2012
L'amour et rien d'autre est un film qui interroge et qui laisse perplexe, un film attirant autant que déconcertant, qui nous laisse avec un arrière goût difficile à définir, tantôt amer, tantôt doux : celui d'un amour qu'on imagine à la fois fort et faux, un amour dont on ne sait s'il en est vraiment un. Ou plutôt de deux amours, l'un construit dans le temps, l'autre fabriqué vite fait, séparés par un étrange flottement et une perte. Mais la perte n'est pas tant celle de l'être cher que celle des propres repères de cette femme qui se retrouve dans un monde peuplé de fantômes, de personnages qui n'ont jamais totalement existé, uniquement en surface, et qui ne pourront jamais totalement exister, elle refuse de creuser afin de laisser la première surface se fondre dans la seconde. Après tout, ne tombe t-elle pas amoureuse à cause d'un simple tic, rappel d'un passé faux, en niant tout élément qui la confronterait à sa propre histoire plus en profondeur ?

Premier long métrage d'un cinéaste allemand qui arrive bien après le début d'une nouvelle vague débutée voilà bientôt dix ans, L'Amour et rien d'autre est emprunt de ce petit quelque chose qu'on trouve parfois chez Köhler, Schanelec ou Hochhaüsler : des personnages en situation de crise, perdus dans un monde qu'ils ne connaissent finalement pas vraiment même s'ils l'habitent et l'arpentent. Avec une mise en scène délicate et sensible, qui laisse affleurer les sentiments sur des visages sans expression, dans des décors vides et convenus, dans des lumières mates et crues, le réalisateur nous invite à parcourir l'espace et le temps d'une folie douce, à la fois banale et complexe. Car tous les personnages sont des fous contemporains, des gens perdus et sans envergure, communs et malades, qui passent leur temps à disparaître pour revenir et repartir dans un monde clos et oppressant. Avec même un mini Jean-Claude Romand dont la monstruosité sera de laisser sa compagne vivante telle un zombie, sombrer dans une démence latente pseudo passionnelle.

Voilà la beauté et le problème du film. Nous ne sommes jamais en présence de grands malades héroïques ou romantiques, mais d'individus mornes dont l'âme est morte. Ils errent, dans la rue, dans une université, dans un bus et même chez eux. Et le film respire le morbide. La chair se dévoile comme un élément neutre, l'amour n'est nulle-part, il n'est qu'un leurre, quelque chose qu'on recherche, qu'on fabrique et dont on se persuade. Le deuxième homme n'est guère mieux, instable et sans caractère, se réfugiant derrière des livres et un pupitre, à peine capable de révolte et d'assumer ce qu'il ressent face à une ex baladeuse. Les sentiments finalement ? Peut-être existent-il. Libre au spectateur de faire son choix...

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