Critique : Switch

Laurent Pécha | 4 juillet 2011
Laurent Pécha | 4 juillet 2011

Après plusieurs projets avortés et un passage remarqué sur la série Braquo, Frédéric Schoendoerffer revient au cinéma, après le mal aimé Truands, avec le genre qu'il affectionne tant : le thriller policier. Cette fois, le réalisateur s'est adjoint un célèbre partenaire de jeu en la personne du romancier Jean-Christophe Grangé. Deux univers bien différents dont on pouvait craindre la rencontre tant l'osmose pouvait être bien difficile à trouver. Mais c'était sans connaître la persévérance des deux hommes et leur ardent désir de travailler ensemble (ils ont longtemps planché en vain sur l'adaptation du Serment des limbes, un des derniers romans de Grangé). Le fruit de leur labeur s'appelle donc Switch, thriller diablement efficace qui prend le meilleur des deux créateurs pour aboutir un récit mené tambour battant, parfait divertissement estival.

Un bémol toutefois : pour apprécier l'incroyable teneur des mésaventures qui vont s'abattre sur Sophie Malaterre, jeune québécoise venue à Paris en vacances après avoir échangé son appart sur internet, il faut accepter de faire confiance à ce que Schoendoerffer et Grangé nous racontent, les innombrables invraisemblances de l'intrigue trouvant au fil du récit une solide explication. Et c'est là où le mariage des deux hommes fonctionne à plein régime. Alors que le scénario original concocté par Grangé est constamment « over the top », prétexte à des séquences hautes en couleurs amenant d'ailleurs l'histoire sur une pente « giallesque » très séduisante, la mise en scène toujours très documentée de Schoendoerffer s'évertue à contrebalancer cet état de fait, permettant à l'intrigue de rester dans des rails réalistes.

Au lieu de se télescoper maladroitement, ces deux façons de vivre le polar au cinéma entraînent Switch dans une direction salvatrice, jamais totalement classique (dans le sens déjà vu) car novateur dans un registre modeste. Entre chasse à l'homme (à la femme ici) haletante menée de main de maitre par un charismatique Eric Cantona et désir de résoudre et comprendre la machination qui se cache derrière tout ça, le récit ne laisse pas de place au répit. Il jongle sans cesse entre ces deux axes quand il ne les marie pas au cœur d'une même séquence et le spectateur d'avoir non seulement de l'empathie pour la fugitive Sophie, campée avec une solide conviction par Karine Vanasse (inconnue dans notre pays mais star chez elle au Québec) mais aussi un ardent désir de découvrir le fin mot de l'histoire. Avant d'y avoir le droit, il aura eu le loisir d'admirer quelques scènes d'action vraiment bien troussées avec en point d'orgue une course-poursuite à pieds dans la droite lignée de celle, étalon du genre, de Point Break (influence revendiquée par le cinéaste lui-même). Il aura accepté quelques autres séquences moins concluantes (les allers-retours au Québec). Et il aura apprécié cette capacité à aller à l'essentiel (les 100 minutes filent très vite) qui sont la marque des bons petits thrillers, ceux susceptibles de nous faire passer un moment agréable et qu'importe si éphémère au fond d'une salle de cinéma. C'était l'ambition modeste des deux auteurs de Switch. Une ambition plus qu'atteinte !

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