Critique : Footnote

Simon Riaux | 14 mai 2011
Simon Riaux | 14 mai 2011
Réaliser une tragicomédie sur les relations père-fils, au sein d'une famille de chercheurs, en s'appuyant constamment sur leurs travaux de spécialistes, en Israël, voilà ce qu'on appelle un projet atypique. Si l'on remerciera Joseph Cedar de ne pas s'intéresser aux sujets polémiques (et rebattus) intimement liés au contexte géopolitique de son oeuvre, on pourra regretter certaines orientations prises par le film.

Jusque dans son titre, Footnote (« note de bas de page ») porte haut son amour des mots et de leur étude. Loin d'être une simple posture ou un gimmick, la profession des deux personnages principaux est le coeur du film. Leur passion, quasi sacerdotale, pour l'étude du Talmud, loin d'être une abstraction stérile, nous émeut par cette foi absolue dans le verbe, son pouvoir structurant et historique. Rares sont les films dont chaque mot compte, et tient une place bien précise au sein de la moindre phrase prononcée, Footnote est de ceux-là. Les acteurs sont pour beaucoup dans cette réussite. Lior Ashkenazi et Shlomo Bar-Aba composent un duo contraire et bancal, souvent terrible, parfois drôle, toujours pétri d'amertume. La lutte de ce fils pour être reconnu par un père misanthrope et avare d'amour serre souvent la gorge du spectateur, qui ne peut totalement haïr cet homme au coeur aride, obsédé par la précision et la vérité, quitte à semer la désolation parmi les siens.

Si le film regorge d'idées, Joseph Cedar a, hélas, la mauvaise habitude de les étirer jusqu'à les vider tout à fait de leur saveur. En témoigne une scène de révélations dans un bureau bondé d'interlocuteurs, où un running gag manque de provoquer l'hilarité, pour lasser, avant de finir par franchement agacer. Ce défaut est présent dans la plupart des scènes du long-métrage, contrairement à l'inventivité des premières séquences, qui tend à s'estomper au fur et à mesure, empêchant la poésie de s'installer. On peut regretter également que le réalisateur abuse de sa partition musicale, pourtant réussie, qu'il impose à nos oreilles à tout bout de champ, au risque de nous vriller les tympans, notamment lors de la dernière bobine. Cette dernière était bien assez riche dramatiquement parlant pour tendre vers une certaine sobriété, au lieu de quoi elle croule sous les défauts précédemment cités.

Si Footnote ne parvient finalement pas à emporter totalement l'adhésion, on retiendra sa peinture délicate de la famille, bavarde dans le bon sens du terme. Le principal mérite du film est de parvenir, grâce à cette famille dysfonctionnelle, à dépeindre l'une des problématiques actuelles d'Israël, le pas pris par une génération sur l'autre, qui menace de faire oublier la force vive de cet état.

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