Critique : Le Havre

Sandy Gillet | 17 mai 2011
Sandy Gillet | 17 mai 2011

Comment faire léger, évident et juste avec un sujet aussi grave, lourd et à l'actualité aussi brûlante ? La réponse est toute entière contenue et développée dans le dernier film du cinéaste finlandais que l'on ne présente plus : Aki Kaurismäki. Le Havre aurait pu au demeurant s'intituler Calais, Samos, Lampedusa... Des lieux connus pour leur affluence quotidienne en matière d'immigration. Du coup, on était très curieux de voir comment l'auteur de L'homme sans passé ou des Lumières du faubourg allait mettre en scène une ville peu montrée au cinéma et l'intégrer au sein de son univers visuel si particulier.

Sorte de pastiche surréaliste de films comme Welcome, Le Havre détonne et séduit son audience d'entrée en imprimant un rythme et des dialogues reconnaissables entre tous. On est proche de Tati pour la comédie de gestes qui s'accompagne ici de dialogues toujours aussi concis et percutants. Kaurismäki ne s'embarrasse pas non plus d'une exposition superflue : un couple (lui est cireur de chaussures, elle est femme au foyer) va croiser la route d'un enfant d'Afrique, clandestin de son état, en transit pour gagner Londres. Lui va alors s'employer, aidé en cela par les habitants du quartier (sa femme est en même temps atteinte d'un cancer et se retrouve à l'hôpital), à faire en sorte qu'il puisse traverser la Manche. Comme toujours les personnages sont savoureux. Si certaines têtes font déjà parties du bestiaire Kaurismäki, on remarquera l'apparition tonitruante de Darroussin en commissaire de police et le retour de André Wilms qui peut symboliser à lui seul la proposition de cinéma du réalisateur finlandais.

Outre son propos anti air du temps salvateur qui veut que l'on refoule les migrants à la mer, Le Havre est un très joli hommage au cinéma du duo Carné/Prévert qui nous permet le temps d'un film de nous regarder dans le miroir. Le fait que cela soit un finlandais qui le fasse montre tout l'aura que notre pays conserve encore à l'internationale mais nous désespère quant à la dure réalité d'une société qui semble même avoir oublié ce que le mot fraternité voulait dire.

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