Gran Torino : critique

Sandy Gillet | 27 février 2009 - MAJ : 22/01/2019 23:46
Sandy Gillet | 27 février 2009 - MAJ : 22/01/2019 23:46

Quand le projet Gran Torino est devenu une réalité, les rumeurs les plus folles ont couru le web : Clint revenant devant la caméra (cela n'était plus arrivé depuis Million dollar baby) et au vu des premières fuites scénaristiques, cela ne pouvait être que pour reprendre une énième fois le rôle de l'inspecteur Harry Callahan... Depuis Eastwood a balayé tout cela lors de la conférence de presse cannoise où il venait plutôt parler de L'échange arguant du fait qu'il était bien trop vieux pour reprendre ainsi du service...

Il est toutefois troublant de retrouver dans Gran Torino la mœlle d'un scénario fantasmé et qui a donc couru sur le web en son temps. À l'époque il était question du meurtre d'un petit fils policier qui devait forcer un Callahan âgé donc de 78 ans à dépoussiérer son 357 Magnum et à mener l'enquête à sa façon. Cela donne en fin de compte un vétéran de la guerre de Corée, Walt Kowalski, ouvrier retraité de la grande usine Ford de Detroit qui vient tout juste de perdre sa femme. Intolérant, craint de ses enfants, détesté de ses petits-enfants et raciste jusqu'au bout des cheveux, il voit débarquer dans la maison d'à côté une famille d'origine asiatique dont le jeune fils est harcelé par un gang local qui veut absolument l'embrigader pour en faire un de leur soldat.

 

 

Jusqu'au moment où cela dérape forçant le vieux soldat qui a bouffé du niac dans sa jeunesse et qui ne s'en est jamais complètement remis à devoir remiser ses certitudes tout en prenant une leçon de vie à l'orée de la sienne. C'est on l'aura compris cousu de fil blanc et filmé dans la grande tradition d'un cinéma dit eastwoodien pour ne pas dire classique (à ne pas confondre avec académique) : l'évolution du personnage est entendue dès les premières images, les dialogues balancées dans un souffle de plus en plus rauque (seule preuve au final que l'homme vieillit) balisent un terrain ultra connu, la dramaturgie qui se met en place est évidente... Mais alors pourquoi le plaisir reste t'il ici aussi total, intacte et intense ?

 

 

C'est que mine de rien Eastwood rendosse bien le costume d'un homme en marge d'une société qui le dépasse toujours un peu plus car de moins en moins en phase avec son mode vie, ses certitudes et sa propre histoire. Il y a plus que jamais du Peckinpah ici doublé d'un peu de Cimino dont Stanley White, le flic polack joué par Mickey Rourke dans L'année du dragon n'est pas sans rappeler le Walt Kowalski propriétaire d'une Gran Torino. Et c'est ce qui fait que l'on y soit si attaché dès le début car il symbolise à lui tout seul cette Amérique iconoclaste dépeinte de l'intérieur par les Hawks, Ford, Walsh... et dont Eastwood assume la filiation d'une manière magistrale.

 

 

Le plaisir est donc intense et renouvelée à chaque fois que la caméra se focalise sur ce visage ridé et que l'on pense éternellement buriné. Que l'on aime aussi entendre Clint Easwood abuser d'un gimmick sonore qui pourrait s'apparenter à une sorte de râle d'outre-tombe dispensé pour signifier son éternel désapprobation sur tout. Et si d'aucuns pourront avancer que Gran Torino n'est au final qu'une simple accumulation de petits plaisirs coupables, nous voulons bien être jugés et condamnés à chaque fois !

 

Résumé

Newsletter Ecranlarge
Recevez chaque jour les news, critiques et dossiers essentiels d'Écran Large.

Lecteurs

(3.4)

Votre note ?

commentaires
nico
26/07/2018 à 22:29

un chef-d'oeuvre!

votre commentaire