Halloween : critique du remake

Renaud Moran | 24 septembre 2007 - MAJ : 01/11/2018 21:41
Renaud Moran | 24 septembre 2007 - MAJ : 01/11/2018 21:41

Vu le statut incontestable de chef d'œuvre absolu du fantastique moderne et de fondateur indépassable de tout un sous genre qu'on lui reconnaît aujourd'hui, c'est peu dire qu'il nous apparaissait totalement dépourvu d'intérêt d'envisager un jour un quelconque remake d'Halloween à coup cette fois de millions de dollars.

Cela dit, et une fois notre conservatisme de cinéphile un peu désuet et un brin réactionnaire dépassé, le cinéma n'est pas un musée mais une chose bien vivante et en mouvement, et le re-faire en a jalonné toute l'histoire, pour le pire et le meilleur. Et quand il s'agit en plus du troisième film de Rob Zombie, LA révélation du cinéma américain depuis M. Night Shyamalan, on ne pouvait qu'être attentif et même optimiste.

 

 

Eh bien on peut dire sans ambages que l'on n'a pas été déçu et que nos attentes ont été largement sublimées, au point que cet Halloween cuvée 2007 peut désormais faire office de cas d'école comme exercice exemplaire du remake : voir à l'œuvre comment un artiste contamine  par ses propres obsessions et ses propres gestes l'œuvre d'un autre pour mieux la faire sienne. En effet, prolongeant ses recherches subversives sur la famille américaine déviante et les pulsions les plus sombres du genre humain après La Maison des 1000 morts et The Devil's Rejects, il prend le film de Carpenter à bras le corps, sans aucune retenue ni timidité, y fait le tri dans ce qui l'intéresse (les liens familiaux, la folie meurtière, l'échec à comprendre et à soigner l'horreur), en garde certains aspects (la musique originale de Carpenter, certaines scènes de meurtre, le synopsis et quelques personnages-clés comme le docteur Loomis), en développe d'autres (le jeu avec les masques, le basculement du petit Michael dans la folie, son internement et avant cela sa dernière journée « normale », sa relation avec sa famille et notamment avec sa mère et sa petite sœur Laurie) et se débarrasse des codes inhérents au genre (faire sursauter avec le chat derrière le placard et autres gestions du cheminement émotionnel du spectateur, les notion de virginité et d'innocence, etc.) pour en livrer une version tout à fait personnelle et originale, tout en rendant un hommage vibrant et poignant au maître.  Absolument moderne, donc.

 

 

Ainsi, alors que l'original, façonné par la légendaire épure carpenterienne, faisait de Michael Myers une enveloppe évidée et possédée, une espèce d'entité maléfique et mécanique, une personnification de l'idée abstraite du mal et de la mort en marche, totalement dénuée de la moindre trace d'humanité, le remake en prend le contrepied total en lui redonnant toute cette humanité perdue. Et c'est bien là que réside l'aspect le plus dérangeant mais aussi le plus brillant d'Halloween 2007 et qui fait de Rob Zombie un cinéaste essentiel.

 

 

Comme dans The Devil's Rejects, Rob Zombie soigne tous ses rôles, du plus petit au plus important, donne sa chance à tous ses personnages, pas plus cons et pas plus intelligents que nous autres créatures, et le film épouse tour à tour les points de vue du croquemitaine et de ses victimes, sans pour autant justifier les actions de celui-ci. Et il faut voir avec quel talent et générosité le réalisateur brosse le portrait de chacun d'eux en deux ou trois coups de pinceaux discrets et bien sentis : quelques gestes, regards, attitudes et lignes de dialogue suffisent à nous les rendre attachants. A l'image du sommet atteint dans la déchirante scène où Michael tend la photo à sa petite sœur dans un ultime sursaut de normalité. Proprement sidérant.

 

 

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