Critique : Mon frère est fils unique

Même si Daniele Luchetti s'en défend, Mon frère est fils unique est bien un film politique au sens noble du terme puisque axant son récit sur le destin de deux frères que tout oppose sauf l'amour qu'ils vouent à la même femme (solaire Diane Fleri qui a eu la gentillesse de nous accorder une interview que l'on pourra découvrir en cliquant ici). Surfant avec une certaine habileté sur un cinéma italien qui n'en finit plus de se pencher sur ses « années de plomb », le réalisateur de l'extraordinaire Porteur de serviette, utilise ce cadre comme prétexte pour mieux étudier l'évolution de leurs rapports depuis l'enfance jusqu'à l'âge adulte

Portés par deux jeunes comédiens aussi brillants que talentueux (Elio Germano le petit frère dit « La Teigne » et le ténébreux Riccardo Scamarcio), Mon frère est fils unique bénéficie aussi et surtout d'un scénario dont les auteurs ne sont autre que ceux à qui l'on doit Nos Meilleures années réalisé par Marco Tullio Giordana soit ce que le cinéma italien nous a proposé de mieux ces dix dernières années. On retrouve d'ailleurs par moments dans le film de Luchetti, la fulgurance de Nos Meilleures années quand celui-ci nous susurrait avec maestria un contexte historique pesant mais exaltant pour une jeunesse en mal de repères et où les idéaux politiques se forgent au creux des frustrations familiales.

Filmant au plus près de ses personnages, traquant leurs multiples fissures forcément plus qu'humaines, on est happé vers l'inexorabilité d'une fin qui ne peut qu'être tragique et attendue par tous (spectateurs compris) comme une délivrance. C'est au demeurant le seul vrai reproche que l'on pourrait faire à Luchetti : que sa caméra soit si explicite, si prévisible et si lourde de sens qu'il en annihile trop souvent toute légèreté et respiration pourtant nécessaires comme si son film sautait un battement de cœur sur deux pour finir par faire une criqe cardiaque.