Black Snake Moan : Critique

Jean-Noël Nicolau | 16 mars 2007
Jean-Noël Nicolau | 16 mars 2007

Sexe, blues et obsession, la note d'intention de Black snake moan a de quoi allécher l'amateur de cinéma d'exploitation. 

La promotion du film, insistant largement sur le côté « pulp » (Samuel L. Jackson à l'appui) et sulfureux (Christina Ricci en « white trash » esclavagisée), promettait une œuvre décadente et excitante. Les espoirs sont malheureusement très vite déçus par une longue mise en place de près d'une heure, à peine sauvée par un numéro outrancier de la miss Ricci qui se donne toute entière à son rôle de nymphomane. Les fans seront aux anges, tant leur égérie déploie un charisme érotique aussi malsain que fascinant. Mais cette présentation s'étale un peu trop longuement, insistant sur l'aspect hautement cliché des personnages. Nous sommes dans le domaine des archétypes et il était sans doute inutile de s'étendre aussi longtemps sur des figures aussi connues.

 

 

Enfin, Christina est attachée, et Samuel va pouvoir lui donner une leçon de vie. La misogynie latente de Black snake moan éclate alors dans toute sa splendeur. Pour calmer les ardeurs des gourgandines, rien ne vaut une bonne mise au pas à l'ancienne. Cette trop courte partie de bondage au sadisme moite constitue le meilleur du film. Hélas, au bout d'une grosse demi-heure, comme choqué de ses propres audaces, le réalisateur Craig Brewer redonne sa liberté à la donzelle et entame une lente plongée dans la guimauve. Le pire est évité de justesse, le blues débarquant enfin en force et proposant à Samuel Jackson des séquences taillées à sa mesure. La scène du « black snake moan » (la chanson exprimant les tourments de Lazarus) est le sommet du film et mérite à elle seule le déplacement. Intensément électrique, transcendée par l'interprétation d'un Jackson habité, elle trouve enfin l'âme du blues et de ce Sud des États-Unis fantasmé. Le concert qui la suit, bien qu'un peu trop filmé comme un clip de r'n'b pour MTV, réserve encore quelques frissons, mais ne parvient pas à retrouver cette magie noire éphémère.

 

 

De manière encore plus inattendue, la conclusion du métrage hésite entre un happy end de comédie romantique et une dernière percée de psychiatrie douteuse. Le propos de Craig Brewer risque de faire hurler les féministes, cela fait bien longtemps que l'on ne nous avait pas affirmé que la sexualité des dames est en fait une maladie que l'on ne peut soigner qu'en serrant littéralement les liens du mariage. Déséquilibré et n'assumant pas totalement les aspects les plus scandaleux de son sujet, Black snake moan séduit néanmoins par la classe de sa mise en scène, sa bande originale très « roots » et par l'excellence de ses interprètes. Mais le choix de privilégier l'aspect moral de l'œuvre au détriment de la simple jouissance sensorielle risque de laisser plus d'un spectateur sur sa faim..

 

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