La Vie rêvée de Walter Mitty : critique mitigée

Simon Riaux | 29 décembre 2013 - MAJ : 08/01/2019 12:00
Simon Riaux | 29 décembre 2013 - MAJ : 08/01/2019 12:00

« RÊVE : images résultant de l'activité psychique, produites pendant le sommeil, résultant de l'imagination du sujet. » La définition du Larousse a cela d'idéal qu'elle permet de pointer instantanément les trois manquements de La Vie secrète de Walter Mitty : les images, l'imagination et le sujet.

On l'aura compris, les rêves de Walter sont l'argument central du film, dont la promotion habile promettait une plongée irréelle et poétique dans le monde des songes. Un univers qui revêt ici l'apparence d'une publicité automobile ou d'un spot d'agence de voyages dans ses séquences les plus inspirées. Lumière rasante, coucher de soleil, long travellings, image supra-luminique et caricature absolue de l'autochtone sont les atouts majeurs de la chose. Quiconque a déjà allumé une télévision est familier à l'extrême des plus spectaculaires détours de La Vie secrète de Walter Mitty, dont la seule ambition est de jouer la montre quant à votre temps de cerveau disponible.

 

 

Freud mettait en évidence il y a plus d'un siècle que les rêves étaient par essence le lieu d'expression de nos névroses, soit un terreau parfait pour l'éros comme le thanatos, le sexe et la mort. De ces deux ingrédients indispensables il ne sera jamais question durant tout le film, qui se concentre sur un sauvetage canin, un Tartempion venu du froid, un pugilat propret, pour ne s'envoler que le temps trop court d'une déviante incursion dans un fantasme cinéphile. Chez Ben Stiller, on rêve plus blanc que blanc, on s'endort Mr Jekyll et on se réveille Mr Clean, l'inquiétante étrangeté connaît pas, le mystère s'évapore sous les ondées brûlantes d'une photographie chirurgicale.

 

 

Si Hollywood rêve de se faire sauvagement immaculer, à quoi aimerait-elle que nous rêvions ? Pour y répondre il faut se plonger dans le parcours de Walter Mitty, qui d'ouvrier pâlichon apprendra de ses rêves pour ré-enchanter son existence et (Nietzsche ne l'aurait pas dit autrement) devenir ce qu'il est. Or, cet homme ne gagnera à épouser ses songes ni transcendance, ni folie, de sa renaissance ne jaillira aucune grâce. Non, de son imagination toute puissante il ne retirera que le courage de tripatouiller une collègue de bureau peu farouche, la bravoure de titiller dignement le liquidateur de son entreprise et la sagesse d'accepter la disparition de ce pourquoi il s'est battu toute sa vie.

 

 

 

 

Résumé

En définitive, tout confortable et sécurisé que soit le voyage auquel nous convie La Vie secrète de Walter Mitty, sa destination n'est pas différente de celle cauchemardée par Philippe Muray, le pourfendeurs des Mutins de panurge. Ben Stiller nous promet un idéal de soumission, nous encourage à repasser par la case départ et omet de nous dire que si son personnage principal finit en couverture, ce n'est pas en héros mais en employé du mois. 

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commentaires
Andarioch
02/09/2019 à 20:07

Mon Simon, tu as tout faux.
Alors évidemment si tu cherchais du trash, une exploitation salace de l'âme humaine et de ses fantasmes, je ne peux que comprendre ton désarroi. Tout ici est lisse comme le cul d'une première communiante, sans excès, sans prise de risque. Encore que...
On plonge dans les fantasmes clean d'un grouillot sans tare, un lambda nourrit au roi lion et à Mary Poppins. Un rêveur, qui a des rêves tout simples, tout gentillets. Mais un rêveur qui hait sa vie sans vraiment la haïr vraiment parce que la haine, c'est mal. Et il ne se résout pas au mal.
Certains pensent que l'homme naît bon. Mitty l'est resté. Il reste sur des joies qui, si elles sont simples, n'en demeurent pas moins exaltantes. Une descente interminable en skate, un match de foot improvisé au trou du c.. du monde, ...
Mais risque il y a . Sans trop spoiler, disons qu'on se demande pendant tout le film ce que représente une photo (ça vient assez vite). Sans dire quoi que ce soit (on fini par le savoir, ou pas) la fin, dans le contexte, est juste parfaite.
Alors oui, Mitty est poétique, Mitty est magnifiquement naïf, Mitty ne plaira pas aux cyniques ou aux désabusés.
Mais tous ceux, adultes, qui n'ont pas oublié leurs 13 ans vont vivre un moment d'exception.
Tu veux que je te dise. Tu es actuellement à la fois trop jeune et trop vieux pour le comprendre. Du coup je passe l'éponge. On en reparle dans 10 ans.

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