Critique : Mauvaise foi

Louisa Amara | 6 décembre 2006
Louisa Amara | 6 décembre 2006

Enfin une comédie dramatique sur les juifs et les musulmans, juste et sans cliché ! Enfin des auteurs qui savent de quoi ils parlent, et qui ont suffisament d'autodérision et de recul pour exploiter cette matière si complexe mais si riche. Par manque de subtilité, de réalisme et disons le franchement, de talent, les comédies sur les différences entre blacks blancs beurs et juifs, ont souvent survolé le sujet sans apporter un réel point de vue sur les difficultés que peuvent rencontrer les couples mixtes.

Roschdy Zem et Pascal Elbé, l'un arabe, l'autre juif, tous deux acteurs et auteurs, ont su travailler ensemble pour mieux échanger leurs expériences individuelles et familiales, en construisant une trame solide où les personnages ont une véritable évolution. C'est la richesse première du film qui explique pourquoi les clichés y sont absents et les personnages bien exploités du premier au dernier rôle. Un vrai bol d'air dans un cinéma français où les producteurs sont souvent à l'affut de La vérité si j'mens 3. Il est particulièrement appréciable de voir enfin montrée au cinéma, cette majorité silencieuse, modérée, bien intégrée, et bien réelle, mais absente des JT avides de sensationnalisme.

Mauvaise foi relève le pari de faire rire tout en apportant une véritable réflexion. S'en étonnant eux-mêmes, les auteurs n'avaient pas prévu de faire basculer cette comédie dans le drame et la critique sociale : « assez tard dans la phase d'écriture - surtout pendant le tournage - une forme d'âpreté est venue se calquer sur le film, assez naturellement ». Le contexte actuel aidant, les profondes différences entre les deux communautés rejaillissent, et il faut alors proposer la seule solution possible : le compromis. Dans son premier film Roschdy Zem rappelle avec une simplicité déconcertante que les concessions faites de part et d'autre peuvent assurer la pérennité d'un couple mixte, avec tout ce que cela implique : la vie au quotidien, en acceptant l'autre tel qu'il est, mais surtout, l'éducation des enfants, véritable déclencheur de toute l'histoire.

Pour vivre heureux, vivons cachés, c'est l'adage de bon nombre de couples mixtes qui décident d'affronter le regard des familles respectives (donc le début des emmerdes), seulement lorsqu'ils n'en plus le choix : emménagement, mariage, grossesse, etc. C'est aussi la raison pour laquelle, Mauvaise foi vise juste. Il y a du Woody Allen parfois dans les dialogues, dans le rire et le cynisme des héros. La réalisation est enlevée, sans grands effets, rythmée et évite le déjà-vu. Pour un peu, on en oublierait presque que ce n'est que le premier film de Roschdy Zem. On le savait déjà excellent acteur, il gagne ses galons de cinéaste. Vivement la suite.

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