Critique : La Jungle

Louisa Amara | 12 juillet 2006
Louisa Amara | 12 juillet 2006

Comment deux bras cassés symboles d'une génération d'éternels ados peuvent-ils réussir à survivre une semaine dans la rue ? Avec ce postulat de départ inattendu, Matthieu Delaporte, co-scénariste du génial Renaissance, réalise sa première comédie. Rythmée, drôle, pleine de références, La Jungle réussit là où Les Poupées russes avait échoué : décrire la fameuse génération "Tanguy" avec une précision redoutable, sans redondance et en gardant toujours un 2nd degré irrésistible.

Le génie de ce film réside avant tout dans ses dialogues. Les scénaristes se sont à coup sûr inspirés de leurs propres conversations amicales et animées. Cinéphiles dans l'âme, ils parsèment les dialogues du film, de références savoureuses comme ce jeu très masculin qui consiste à trouver par exemple, dans quels films Sophie Marceau apparaît topless, ou totalement nue ? Ou mieux encore ce clin d'œil au mythique film de Boorman : « Je suis constipé, j'ai froid, j'ai faim, je pue… On a été poursuivi par des gitans, séquestré par un malade, et en plus j'ai plus de clopes putain mais c'est Délivrance ! Quoi ? Bon d'accord on s'est pas encore fait enculer, mais comme tu dis, il reste 5 jours ». Du pur caviar. Et ces perles fusent pendant tout le film grâce à un tandem de comédiens très bien choisis. Saluons d'ailleurs l'audace et l'intelligence des producteurs lors du casting.

Alors qu'on aurait pu s'attendre à un couple de comiques à la Eric et Ramzy, Omar et Fred, ou Lorant Deutsch, ils ont eu l'excellente idée de faire appel à des comédiens chevronnés totalement au service de leur personnage. On pensera à La Chèvre bien sûr pour le côté rêveur de Guillaume Gallienne et fonceur de Patrick Mille, mais aussi à tous les buddy movies américains, auxquels le réalisateur emprunte la mécanique sans faille. Mais le tandem de La Jungle a une véritable légitimité tant les personnages sont fouillés. Assez habilement, "l'adulescence" et le véritable passage à l'âge adulte des héros sont mis en évidence pour nous montrer leur refus de grandir puis leur évolution.

Un petit bémol tout de même dans ce concert de louanges : la réalisation manque parfois un peu de fluidité. À vouloir suivre de près ses héros dans leurs aventures mouvementées, Matthieu Delaporte utilise un peu trop la caméra à l'épaule, secouée dans tous les sens, alors qu'une steady cam aurait été beaucoup plus adaptée à ces séquences. La fin du film reste somme toute assez convenue, une sortie en queue de poisson avec un happy end alors qu'on aurait aimé un peu plus d'originalité. Mais le film remplit sa mission en divertissant, sans rires gras, tout en finesse, en ironie, et en tendresse. On saluera la présence de Guy Bedos, trop rare sur les grands écrans, très bon dans les joutes verbales avec son bon à rien de fils.

Une comédie française drôle sans être vulgaire, rythmée. Rien de mieux pour vous consoler d'une défaite amoureuse, professionnelle ou sportive !

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