Shortbus : critique orgiaque

Vincent Julé | 29 mai 2006 - MAJ : 25/06/2018 15:03
Vincent Julé | 29 mai 2006 - MAJ : 25/06/2018 15:03

Il semblait bien avec Hedwig and the angry inch qu'il se tramait quelque chose à la fois dans la tête de John Cameron Mitchell et sur grand écran. Confirmation au-delà de toutes les espérances avec son deuxième long-métrage, film choral et musical, où le sexe est le principal, voire le seul, moyen d'expression et de communication. Ainsi, dès son prologue, il enchaîne un couple testant les positions du Kamasutra, un autre adepte du SM et enfin un homme faisant l'amour… avec lui-même. Entendez une scène d'autofellation hallucinante où l'acteur, Paul Dawson, finit par s'auto-inséminer. Un drôle de numéro d'acrobate à la fois fascinant et repoussant. Mais pas le temps d'avaler de travers, car en faisant du sexe une métaphore de l'amour, de la peur et des sentiments, le réalisateur remet le sexe en scène. En effet, avec les scènes les plus crus, les plus extrêmes en tout début de film, il évacue pour la suite toute gêne possible, toute considération éthique ou autre morale puritaine, et peut librement célébrer sa joie de vivre.

Elle ne viendra pas tout de suite, mais d'ici-là, le sexe est déjà devenu pour le spectateur aussi naturel, décomplexé et salvateur qu'il ne l'ait pour les personnages (et pour le coup aussi les acteurs). Pas de chair triste à la 9 Songs ou à la Romance, puisque dans Shortbus – oh miracle – le sexe est vecteur de plaisir, de découverte et d'épanouissement. Pour la préparation du film, les neuf comédiens se sont fréquentés pendant plus d'un an et ont appris ensemble à jouer, à écrire, à s'embrasser et à devenir leurs personnages… et un peu d'eux-mêmes. Ils ont expérimenté autant de cinéma que de vie. Ainsi, Peter Stickles, qui interprète le rôle du voyeur (et du spectateur), explique à quel point il était terrifié à l'idée de vivre en communauté dans ce grand loft mis à leur disposition. Il aimait le sexe, mais jusqu'à quel point. Au final, il a passé le pas, laissé les affinités se faire et alors qu'il se trouvait ennuyeux, il peut aujourd'hui tout faire. Alors même qu'il est celui-là qui en fait le moins dans le film. L'expression « une aventure humaine » n'a alors jamais eu autant de sens, et celle-ci n'a été possible que grâce à une seule, et tous les acteurs s'accordent à le dire, à le défendre : une totale confiance en John Cameron Mitchell, et suite logique, entre eux !

Face à la peur contemporaine de l'autre, et donc de soi, John Cameron Mitchell donne la plus belle, la plus euphorisante des réponses. En effet, s'il est impossible de répondre à la question de savoir qu'est-ce qu'est le sexe, Shortbus en revanche nous montre et nous fait partager à quoi il peut servir. Et après un final festif et sensuel, le sexe est la dernière chose à laquelle pense le spectateur.
Vivre par contre…

 

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