Critique : Darkman

Jérémy Ponthieux | 12 mars 2013
Jérémy Ponthieux | 12 mars 2013

Le génial scientifique, amoureux sans histoire, défiguré par des hommes de main brutaux et impitoyables, est contraint de vivre dans l'ombre pour éviter toute panique générale. Cet homme tourmenté, c'est Liam Neeson, 1 mètre 90 de sensibilité et le regard profond comme un tunnel sans fin, choix de casting d'une cohérence à toute épreuve. Il y est accompagné de Frances McDormand, actrice forcément attachante, et d'une batterie de mines patibulaires et de sbires aux sourires narquois. Voilà finalement les vrais piliers qui font de Darkman un film appréciable, sorte de super-anti-héros avant l'heure sur lequel Sam Raimi ne se montre pas vraiment virtuose en diable.

Résultat de multiples réécritures, Darkman est né de l'envie du réalisateur d'élargir son audience par le truchement d'un spectacle hollywoodien, le tout mixé dans une refonte du Fantôme de l'opéra modernisé et « cartoonesque ». Le long-métrage aura acquis un certain statut d'œuvre aimée au fil des ans, sans que n'éclate vraiment le potentiel contenu dans son univers à l'orée des 13 ans du film. Car il y a d'éclatantes possibilités dans ce projet passionné, en particulier cette bonne vieille dichotomie entre le bien et le mal, rendue plausible par l'impressionnant maquillage du protagoniste. Teintée de multiples références au bestiaire d'Universal (ombres menaçantes et multiples décadrages à l'appui), l'oppressante atmosphère qui règne s'accommode pourtant mal de la légèreté des antagonistes et de leurs sautillantes péripéties. Le mélange entre les deux amenuise l'un et l'autre, sans doute parce que Raimi ne se montre pas assez libre dans ses partis pris, n'étant ni trop sombre ni trop délirant, ne laissant que de jubilatoires miettes à ses fans fous qui le suivent depuis Evil Dead premier du nom (la jambe-fusil, idée dingue noyée dans le reste).

Comme retenu par sa première « grosse » production, le réalisateur trouve une vraie difficulté à assumer son rôle d'entertainer sans lâcher la bride à son imagination débordante, livrant au final un long-métrage un peu tiède. Tiède aussi parce qu'avec l'âge le récit se montre perclus de fils blancs, de l'énième Belle et la Bête à la vengeance par paliers, allant de l'acolyte insignifiant au dangereux businessman forcément bavard. Rien qui ne soit foncièrement désagréable, mais on reste la plupart du temps dans l'attente d'une expérimentation visuelle originale ou d'une punchline habile, ce qui met davantage en valeur la frustration qui émerge du projet. C'est cette efficience sans accroc qui gêne davantage que des effets spéciaux datés, qualité que Raimi saura combiner avec une vraie ampleur dans son Spider-Man futur.

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