Combien tu m'aimes ? : Critique

Ilan Ferry | 25 octobre 2005
Ilan Ferry | 25 octobre 2005

Un quadra quelque peu déprimé mais très riche car venant d'empocher le gros lot au Loto propose à une prostituée incroyablement belle et aux longues jambes de devenir sa femme moyennant finances. Un air de Pretty Woman ? Attendez la suite ! 

La belle prend ses nouvelles responsabilités très à coeur attirant ainsi la convoitise de l'entourage de notre petit fonctionnaire qui n'en revient pas d'avoir autant de chance mais qui va cependant vite déchanter avec l'apparition du souteneur de cette femme trop belle pour être vrai... Décidément ça fait beaucoup d'émotions pour un cardiaque ! Vous êtes un peu perdu ? C'est normal puisqu'il s'agit du dernier film de Bertrand Blier accompagné d'un casting quatre étoiles : Bellucci, Depardieu, Campan. L'affiche avait de quoi faire fantasmer bon nombre de cinéphiles, le résultat est-il à la hauteur de nos espérances ? À moitié !

Passée une première partie qui arrive à être grinçante tout en restant émouvante, un constat s'impose : le réalisateur de Merci la vie n'a rien perdu de sa verve et nous prouve à l'occasion de scènes mémorables qu'il est en grande forme filmant Monica Bellucci comme personne ne l'avait fait auparavant face à des personnages singuliers, terriblement humains dans leurs faiblesses. En effet, s'il y a bien une qualité à reconnaître à Blier, c'est sa capacité à mettre en scène des personnages hors normes, véritables laissés pour compte de la vie qui à un moment donné semblent avoir raté le coche. À l'image de ce médecin magnifiquement interprété par Jean-Pierre Darroussin, un perdant magnifique comme seul Blier peut les créer et qu'il s'évertue à réhabiliter aux yeux d'une société qui ne semble plus jurer que par la perfection. Ainsi, le choix de Monica Bellucci comme incarnation parfaite du fantasme masculin n'a rien de fortuit. En grattant sous la surface, le personnage de Daniela révèle autant de failles que les hommes à qui elle fait tourner la tête et les femmes qui la jalousent.

 

 

« Combien tu m'aimes ? », « Combien tu prends ?», deux répliques qui dans le champ lexical de Blier veulent dire la même chose. Cependant, si les répliques fusent avec une énergie réjouissante, la deuxième partie du récit atténue quelque peu notre plaisir par une baisse de régime flagrante. Dès lors, le film amorce sa lente dérive d'objet filmique de moins en moins identifiable pour accèder à une forme de plus en plus scénique. Blier délaisse tout classicisme au détriment de dialogues certes brillants mais auxquels tentent de s'adapter des acteurs en roue libre trop contents de s'essayer aux monologues. La force et la faiblesse de Combien tu m'aimes ? résident dans cette forme qui bien qu'intéressante ne pourra que déconcerter les spectateurs peu familiers avec l'univers particulier du cinéaste où le bon mot est toujours roi. Tout est alors prompt à l'excès d'où une constante impression d'assister à une pièce de théâtre plutôt qu'à un long-métrage. 

 

Résumé

Au final, si le film questionne intelligemment les notions de solitude et de bonheur à travers la relation orageuse et pourtant passionnée se nouant entre les deux protagonistes, on regrette que Blier ne se soit pas libéré d'un style dans lequel il semble s'être enfermé. Bien que n'évitant pas la redite, Combien tu m'aimes ? reste un savoureux moment pour quiconque se laisse entraîner dans l'univers si particulier de l'homme à l'origine des Valseuses.

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