Critique : Robots

Stéphane Argentin | 4 mars 2005
Stéphane Argentin | 4 mars 2005

Après une décennie de règne et de fascination entamée avec Jurassic Park, les dinosaures ont peu à peu cédé la place à l'imaginaire futuriste au tournant du nouveau millénaire (Minority Report, I, Robot…). En 2002, L'âge de glace surfait sur l'une des toutes dernières vagues préhistoriques et c'est à présent en toute logique que les créateurs de Scrat (ce lointain cousin de l'écureuil) prennent désormais la nouvelle au sommet avec Robots. Le studio Blue Sky a d'ailleurs si bien su négocier le changement de climat et d'époque qu'ils en ont profité pour faire chauffer au rouge leurs supercalculateurs 3D afin d'enrichir dans toutes les directions et à perte de vue cette nouvelle ère jusqu'à en faire passer la précédente pour une étendue désertique.

Dès le départ et la croissance accélérée du dernier né de la famille Copperbottom (sous la forme de remplacements de pièces détachées façon kit d'assemblage), on devine déjà que les idées vont non seulement fusées mais également s'enchaîner à un rythme si soutenu que les occasions de s'ennuyer seront rares pour ne pas dire inexistantes, là où L'âge de glace souffrait par endroits de quelques effets de pachydermie. Une idée et 10.000 détails par plan, voilà quel semble être désormais la consigne avec Robots, à tel point que l'on envisage déjà un second visionnage chez soi, télécommande en main, le doigt sur pause afin de profiter pleinement de l'imagination fertile dont ont fait preuve les milliers de cellules grises et de microprocesseurs du studio.

Cette abondante réussite, le film la doit avant tout à une robotisation intensive et adroite de notre quotidien d'humain, tout d'abord sur le plan thématique et social. C'est ainsi que l'on retrouve des sujets tels que la fierté et l'émancipation parentale avec le passage à l'âge adulte (premiers amours, premières prises de décisions / positions…), la déshumanisation des mégalopoles aux dimensions disproportionnées (l'arrivée dans la gare remplie d'une foule galopante, de mendiants et d'escrocs) ou encore la société poussant sans cesse à la surconsommation inutile avec la mise au rebus pure et simple des pièces endommagées qui finiront au recyclage dans les hauts fourneaux des bas-fonds de la ville.

Toujours avec le même souci d'intégration non forcée, Robots renferme là son second niveau de programme, celui de la référence culturelle comme de plus en plus de long-métrages d'animation cherchant à singer leurs homologues de chair et de sang (Shrek, Gang de requins, Les indestructibles, Vaillant…). Si les clins d'œil à Star Wars ou encore Chantons sous la pluie sauteront aux yeux de tous, les plus cinéphiles pourront également reconnaître sans trop de mal Soleil vert (la réutilisation d'individus pour « nourrir » ceux de la même espèce) ou encore Metropolis (Roboville et sa conception en strates sociales verticales depuis les fourneaux souterrains jusqu'à la luxuriance des sommets) tandis que les plus joueurs (sur consoles) verront sans peine les allusions à Ratchet & Clank (le méchant du film se nommant Ratchet) ou encore Sonic The Hedgehog (les différentes séquences « speedées » ou tout va roulant – boulant à cent à l'heure).

Tous ses emprunts et ses recyclages viennent bien entendu se fondre au cœur du processeur central de Robots qui a pour tâche première de divertir en rythme et en rires. Entouré de toute une troupe de personnages hétéroclites faits de bric et de brocs dont le moins drôle n'est certainement pas le guignol de service, Fender (Robin Williams en VO, plus déchaîné que jamais), notre Rodney va par exemple se livrer à un désormais incontournable mais toujours aussi tordant petit concours de pets ou encore farter la piste de danse lors d'une reprise hilarante d'un tube de Britney Spears. Tous ces délires comiques prennent souvent place au milieu de séquences aussi spectaculaires que discrètement moralisatrices où l'initiative, le courage et la ténacité individuelle finiront par avoir raison de tous les obstacles tout en fédérant un grand élan de solidarité.

Pour son second long-métrage, Chris Wedge et toute son équipe de Blue Sky Studios ont donc su assembler une mécanique aux rouages très bien huilés et délivrer, au bout de la chaîne de montage, un Robots drôlement intelligent mais aussi intelligemment drôle. Une double réussite trop rare pour ne pas être signalée, y compris parmi les long-métrages « traditionnels ».

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