Dans les hautes herbes : critique de l'enfer vert

Geoffrey Crété | 4 octobre 2019 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Geoffrey Crété | 4 octobre 2019 - MAJ : 09/03/2021 15:58

Après avoir visité et nourri les univers de séries comme American GodsWestworldLuke Cage, Perdus dans l'espaceThe StrainHannibal ou encore Wayward PinesVincenzo Natali revient enfin au long-métrage avec Dans les hautes herbes sur Netflix. Adaptation de la nouvelle de Stephen King et Joe Hill, cette histoire de champ diabolique, qui avale ceux qui osent s'y aventurer, rappelle le souvenir de Cube.

LES HERBES FOLLES

"N'allez pas dans les hautes herbes !" criait un personnage du Monde perdu : Jurassic Park, pour avertir de la présence de raptors dans un champ trop calme pour être honnête. Un avertissement qui pourrait servir pour Dans les hautes herbes, où c'est un môme qui, au beau milieu d'un champ perdu au fin fond des États-Unis, appelle à l'aide. Le piège commence ici pour les malheureux bien intentionnés qui osent pénétrer dans cette antichambre de l'enfer, où toute notion d'espace et temps s'envole.

Les tiges et feuilles balayées par le vent cachent un champ de sables mouvants qui avalent les pauvres âmes égarées malgré elle, et confrontées à des phénomènes délirants. Cette prison à ciel ouvert rappelle immanquablement Cube, le premier film et coup de maître de Vincenzo Natali. Étrangers réunis par l'étrange, espace qui se tord et se dérègle, temps qui se dilate, menace qui prend différentes formes plus ou moins intimes : le cinéaste est en terrain familier, sauf qu'ici sa prison est à ciel ouvert.

Et après des années d'absence côté film (son dernier long-métrage, Haunter, est sorti directement en vidéo en France, en 2014), cette adaptation de la nouvelle In the Tall Grass de Stephen King et Joe Hill, publiée en 2012, est l'occasion de se souvenir que le réalisateur de Cypher et Splice nous manque.

 

photo, Laysla De OliveiraAvant le drame

 

LE CHAMP DES POSSIBLES

Dans les hautes herbes n'est jamais aussi intéressant que lorsque Vincenzo Natali exploite le potentiel fantastique et cauchemardesque du décor. Un soleil qui bascule subitement dans le ciel, un personnage qui s'éloigne en l'espace de quelques secondes, un cri qui se déplace de manière insensée, un bâtiment qui apparaît ou disparaît à l'horizon... C'est quand la caméra se glisse à travers les feuilles, et transforme ce champ anodin en territoire de toutes les angoisses que le film est le plus réussi.

Créer un sentiment de claustrophobie, d'enfermement et d'étouffement dans un champ de hautes herbes est un pari aussi risqué qu'intéressant. Ce n'est pas la première fois que ce décor est exploité sous l'angle horrifique (M. Night Shyamalan en a tiré une excellente scène nocturne dans Signes par exemple), mais étiré sur plus de 90 minutes, c'est un défi de taille. Malgré beaucoup d'ellipses et de recours à des plans larges qui plongent dans l'ombre des plantes, le réalisateur tient sa ligne, et crée une vraie atmosphère.

Ce n'est pas tant une surprise qu'un plaisir de le retrouver, Vincenzo Natali ayant plusieurs fois prouvé ses talents en la matière - Cube bien sûr, mais aussi Nothing, ou même Cypher et Splice, où plusieurs décors étaient longuement filmés comme le théâtre de l'angoisse.

 

photo, Laysla De Oliveira, Avery Whitted, Harrison Gilbertson Et quelques grosses libertés d'adaptation

 

DES LENDEMAINS SANGLANTS

Mais Dans les hautes herbes traîne une intrigue qui tourne en rond dans les interactions entre les personnages, un peu trop évidentes et surlignées. Les conflits sont trop accessoires, et les libertés prises avec la nouvelle témoignent d'un effort évident et parfois forcé pour dynamiser l'action. Une fois le théâtre de l'angoisse installé et les règles énoncées, il y a un flottement que même la mise en scène ne peut camoufler.

C'est le gros point faible du film, qui laissait fantasmer un cauchemar plus tendu et complexe. C'est d'autant plus visible que lorsque l'action s'emballe, c'est autour d'une idée de menace d'abord trop facile et claire, qui pour le coup ressemble beaucoup trop à une facette de Cube.

 

photo, Patrick Wilson Belle photo de Craig Wrobleski (passé sur X-Files, Umbrella Academy, Fargo)

 

Heureusement, Vincenzo Natali et ses hautes herbes ont encore quelques atouts en main. Dans la dernière ligne droite, le réalisateur retrouve un peu de sa folie baroque exprimée dans la série Hannibal. Il y a notamment une scène superbe et notamment un plan magistral, empreint d'un sens de la mise en scène, d'un goût pour la peinture et la matière à cauchemar, qui donne le vertige et ouvre littéralement les portes de l'enfer. Dans ces instants puissants, ou lorsqu'il filme une terrible pitance offerte par une main diabolique, ou du sang couler sur les herbes et les peaux moites, Vincenzo Natali rappelle sa capacité à générer de pures images de cinéma. Et même touchée du bout des doigts, l'étrange mythologie derrière ce champ reste fascinante.

Si par moments il rappelle le malin et mésestimé Les Ruines en transformant de pauvres plantes en entités terrifiantes, Dans les hautes herbes est moins un film d'horreur réel qu'une petite sortie de route tordue, type Twilight Zone ou Au-delà du réel : L'aventure continue. Que Vincenzo Natali s'en sorte si bien avec un tel défi, et provoque un tel trouble est une nouvelle preuve qu'il mérite plus d'occasions de briller et développer ses univers.

 

Affiche

Résumé

Modeste mais malin, classique mais soigné, Dans les hautes herbes rappelle surtout que Vincenzo Natali est un réalisateur talentueux, capable de générer des images puissantes et installer des ambiances fascinantes.

Autre avis Alexandre Janowiak
Vincenzo Natali confirme encore son talent de metteur en scène, capable de créer de vrais moments de tensions en quelques jeux de cadres ingénieux. Malheureusement, ses hautes herbes reposent sur un récit inapte à développer sa mythologie et au rythme lancinant (1h35 interminables). Le spectateur n'a alors qu'une envie : s'en échapper lui aussi.
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Lecteurs

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commentaires
Kribicat
26/09/2021 à 08:23

Film super j ai tout compris

Kyle Reese
19/06/2021 à 00:46

Pas mal du tout. Bonne idée, pas d'explications précise de ce qui se passe vraiment, on doit se creuser un peu les méninges et comprendre par nous même grâce aux visions étonnantes entre aperçues ça et là. Un maléfice original, une pierre vivante se nourrissant de la vie qui restera mystérieuse jusqu'au bout. D’où elle vient, qu'elle est son rôle, s'il y en a un, ça reste flou et c'est tant mieux. J'ai bien aimé tout le concept et l'ambiance et Natali fait très bien le job.

BienSûr
12/05/2020 à 19:10

Alors là je n'ai rien compris. Je me suis endormi dans le film. Le trailer est très intéressant, mais je me suis vite perdu depuis que j'ai vu le petit garçon agir bizarrement, il avait donc touché la pierre. Et puis je ne comprends pas les boucles temporelles, Travis arrive 4 mois après tandis qu'il fût le premier arrivé. Comment se passe le temps à l'extérieur de l'herbe là oú des gens vivent normalement ?
Côté spaciotemporel, c'est Mirage.

Cap
22/10/2019 à 18:13

Il me semble que ce film indique le choix de sa vie , se méfier des pièges ,résister
à la tentation , suivre le bon chemin .

Machmaléchtoukof
12/10/2019 à 05:29

Film qui pourrait paraître correcte dans la première demi heure (et encore...), aucuns travail, aucuns sens, aucunes mises en œuvre, aucun, aucune..... Etc.. J'en perd mes mots tellement je me suis endormi et en même temps essayer d'expliquer ce que j'essayais de comprendre à ma femme, une descente aux enfer... Voilà l'horreur, j'arrive pas à comprendre pourquoi peut-on être financé ou financé de tels films qui n'ont aucunes valeurs et j'en passe car j'ai du respect malgré tout.... Déçu et pas qu'un peu je préfère dormir en ayant une bonne fièvre, avec de la chance je ferai un bon cauchemar ou un beau rêve plus cohérent et vivant...!!!!

Chris
08/10/2019 à 01:45

Vraiment pas terrible, intriguant au début puis ça part vite dans le n'importe quoi. Pas étonnant que c'est signé Stephen King (dans sa mauvaise période) et Joe Hill (qui à réussi à se faire connaître que en grande partie car c'est le fils de...). ça aurait pu être sympa si ça partait moins dans le mystique comme Stephen King en a trop souvent l'habitude et le fiston aussi apparemment.

Luciiie
07/10/2019 à 20:24

Personellement je n'ai pas vraiment apprécié, le thème est vraiment bien mais il y a bcp de choses que je n'ai pas compris je trouve qu'on s y pert facilement. A vous de voir pour vous faire votre propre avis !

Chris
07/10/2019 à 14:02

Encore un navet signé Netflix, pas mal pour s'endormir le soir...

Geoffrey Crété - Rédaction
06/10/2019 à 23:34

@prof west

Vous êtes sur un site dont l'ADN repose en grande partie sur l'amour du cinéma de genre. Ne pas avoir le même avis sur un film de genre ne veut pas dire que quelqu'un a mal vu, mal compris ou ne maîtrise pas suffisamment la chose, et bien heureusement.

On est ravis si vous avez beaucoup aimé les Ça récents. Notre avis est plus nuancé. Nous n'avons pas raison, vous n'avez pas raison : on est ici dans un cas très simple d'avis différents, et de notre côté, on trouve tout à fait sain et simple, et jamais on n'ira expliquer ça par la culture ou l'absence de culture de la personne en face.

prof west
06/10/2019 à 15:55

Mechanic

C'est un constat d'année sur la presse spécialisé en cinéma généraliste surtout , elle ne connait définitivement plus rien en matière de cinéma fantastique - horror je ne parle pas spécialement que de écran large mais pour d'autre critique presse généraliste .

Ça : Chapitre 2 - critique qui rage en bas du 6 sep 2019 2/5 étoiles Simon Riaux l'auteur de la critique je parle pas du rédacteur , et meme il vaut bien plus que 3/5 * .
ça chapitre 1 noté 3/5 * critique qui flotte en bas Geoffrey Crété | 31 octobre 2017 - MAJ : 07/09/2019.

C'est pas question de gout ,c'est surtout une expérience de genre de film , et malheureusement , les critiques presse sont beaucoup trop écrites par des journalistes généralisé et non de vrai fan du genre spécialisé en matière de cinéma horror fantastique.

cdlt

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