Test : Colorado - Édition Collector Blu-ray + DVD + Livre

Tonton BDM | 8 juillet 2013
Tonton BDM | 8 juillet 2013

Grand jour pour les amateurs de western spaghetti que celui de la découverte de la version longue de Colorado, que tout le monde évoquait pour rattraper les maladresses du montage du film distribué en France jusqu'ici (et déjà foutrement attachant), souvent sans l'avoir jamais vue. Ce montage, l'auteur de ces lignes l'avait découvert en 2003, avec l'édition DVD italienne de La resa dei conti, aka Colorado donc, qui ne disposait d'aucun sous-titres et était donc à réserver aux  membres de la mafia   ritals  italianophones convaincus. Une édition DVD par ailleurs particulièrement moche au niveau du master malgré son packaging sympathique. Béni soit donc Wild Side pour avoir eu la bonne idée d'exhumer un film peu connu en France, en nous proposant non seulement la version internationale du film dans sa VF d'origine avec la voix de Gérard Hernandez (et en VO bien sûr), mais également sur la même galette Blu-ray ce qui aurait déjà constitué un bonus de choix : la fameuse version longue en HD !

 



Un sésame inattendu, que dis-je, inespéré, que cette version longue nous proposant de découvrir les quelques vingt minutes supplémentaires avec des sous-titres rédigés dans la langue de Racine, Molière et Bruno Masure. Un événement qui nous incitera à fermer les yeux avec bienveillance sur certains courts passages du film nous proposant un master vraiment très abimé, en particulier durant la première rencontre entre Corbett (Lee Van Cleef) et Cuchillo, l'as du couteau (Tomas Milian), que les amateurs non-initiés aux pépites de western all'italiana et découvrant le genre avec la galette éditée par Wild Side se réjouiront de pouvoir retrouver dans Saludos hombre, le troisième western de Sergio Sollima. Côté image, le film oscille donc entre l'excellent et le moins bon, mais le rendu global est vraiment très satisfaisant. Le format est respecté, de même que le joli grain argentique de la photo de Carlo Carlini, bref c'est du tout bon.



Mais quid de cette version longue me demanderez-vous ? Qu'apporte-t-elle donc à Colorado, vaut-elle l'investissement dans ce magnifique Blu-ray afin de remplacer mon DVD italiano-vafanculo au master dégueu ou ma VHS de 1982 ? Déjà, il faut noter que les scènes coupées du montage international sont essentiellement des plans très courts, ou de courtes séquences qui mettent souvent en scène le personnage du chasseur de primes, Corbett. Elles permettent de montrer les doutes croissants - pur beurre bien sûr - du personnage par rapport à la culpabilité de Cuchillo, et rendent un peu moins brutal et manichéen son revirement final. Cuchillo s'offre aussi quelques petits moments supplémentaires, notamment avec sa femme. L'ensemble est plus subtil, un peu moins embarrassé de l'emprise envahissante et rigide du script original plus lourdement politique signé Franco Solinas (El mercenario).



Accédez à la galerie en cliquant sur la capture ci-dessous :





Outre la « version longue » du film qui est donc du pain béni pour les amateurs et nécessite à elle-seule l'acquisition du dernier bébé de chez Wild Side, les suppléments de cette édition collector de Colorado se divisent en deux parties, dont le gros morceau est indubitablement le beau petit bouquin présent dans le coffret. S'il souffre certes de quelques lourdeurs stylistiques qui en rendent par moments la lecture un poil trop scolaire (cela dit, on vous accordera volontiers l'auteur de ces lignes parlant de lourdeur stylistique, c'est carrément l'hôpital qui se fout de la charité), le livre de Jean-François Giré, intitulé Le vautour et la proie (en hommage à la première version du scénario signée Franco Solinas et Fernando Morandi), fait montre d'une belle implication, avec des anecdotes nostalgiques sur l'auteur lui-même, qui nous offre un récit pour le moins passionné, documenté, forcément informatif et très richement illustré. Cet essai d'une centaine de pages est habilement divisé en sept chapitres, revenant dans le détail sur la filmographie et l'importance du film dans la carrière de chacun des « piliers » humains de Colorado, à savoir Sergio Sollima (réalisateur), Lee Van Cleef, Tomas Milian (acteurs), Ennio Morricone (musique), Carlo Carlini (photo), Carlo Simi (décors) et Alberto Grimaldi (production). Pour terminer, Giré propose une fine analyse du film en revenant sur les points essentiels qu'il n'a pas pu aborder auparavant. Outre donc la passionnante présentation du génial acteur-caméléon Tomas Milian et ses dernières pages qui proposent une lecture du film tout à fait passionnante, là où le bouquin fait fort, c'est qu'il rétablit un certain nombre de vérités, concernant certaines légendes ou erreurs tenaces sur le film ou même sur le western en général : on appréciera qu'il revienne sur l'implication de Franco Solinas dans l'écriture du film, qu'on avait largement évoqué dans notre critique maison (signée par le meilleur des meilleurs il va sans dire), même s'il est assez amusant que l'on en ait une lecture proto-marxiste que réfute tout à fait Giré, et ce dés l'introduction de son livre. Cela dit, et sans vouloir en remettre une couche, certaines citations issues de l'essai même de Giré vont dans notre sens ; on soulignait que Colorado souffrait un peu de l'ombre de Solinas et que le style de Sollima, d'avantage distancié et presque anarchiste, se révélerait plus sur ses films suivants. Ce que le réal ne dément pas : « Moi je faisais des paraboles sur la société italienne, c'est vrai. Mais je ne faisais jamais les choses aussi ouvertement que Solinas. Disons que Solinas était un vrai bon gauchiste et que je suis un gros anarchiste ! » Un autre tacle de Giré fera particulièrement plaisir aux spagh'ophiles, c'est celui à l'encontre d'Alberto Grimaldi, qui avait choqué les amateurs de westerns et de Sergio Leone en particulier en 2006 en s'attribuant en prime time sur Arte les mérites de la production de Pour une poignée de dollars, dans le documentaire Car ils sont sans pitié (Hans-Jürgen Panitz et Peter Dollinger, 2006). Vlan, dans les dents. Toutes les vérités sont bonnes à dire, papi !

 



Le second - et dernier - bonus de cette riche édition se trouve sur la galette Blu-ray, et consiste en un entretien avec un des grands oubliés du bouquin de Giré, le scénariste Sergio Donati, sobrement intitulé De Leone à Sollima. Ce collaborateur de longue date de Leone évoque donc pendant une vingtaine de minutes sa riche carrière, mais si intéressant soit-il, il n'aborde malheureusement que très peu son travail aux côtés de Sergio Sollima, même s'il revient assez longuement sur le scénario d'origine signé Franco Solinas et Fernando Morandi, qui se déroulait non pas dans l'Ouest sauvage mais dans l'Italie des années 60, et dont les tenants et aboutissants politiques étaient naturellement bien plus prégnants (on est à l'aube de mai 68). C'est dommage mais le bonhomme est intéressant, notamment quand il évoque les regrets de n'avoir que très peu de scénarios « originaux » à son actif. Pour en terminer avec la section bonus, on vous remet une bande-annonce et une galerie photo.



Apport HD : Indispensable.


Résumé

Newsletter Ecranlarge
Recevez chaque jour les news, critiques et dossiers essentiels d'Écran Large.
commentaires
Aucun commentaire.
votre commentaire