annaselinnaer
14/03/2016 à 15:55

Je considère justement que le terme "surestimé" colle parfaitement à une situation où un cinéaste serait cité par d'autres, deviendrait une belle réponse aux questions "quelles sont vos inspirations", serait contemplé comme un grand artiste... et laisserait pourtant une partie des gens de marbre, dans l'interrogation.
La question de l'estime étant plus liée à la valeur artistique, qu'à la réputation, à la mode, au rôle donné par une époque à un style.

Pour le cas Malick, depuis sa Palme et le sacre Tree of Life, ses films partagent de plus en plus nettement entre ses grands adorateurs (je dis ça sans ironie) et ses détracteurs. Chaque fois qu'il gravit un échelon dans son trip-cinéma, il convainc un peu plus certains, et atterre un peu plus les autres. Donc vu comme il est cité par certains cinéphiles (pas tous) et cinéastes (pas tous), on peut décemment le dire.

Dire que quelqu'un est surestimé n'est en rien un engagement dans l'absolu, qu'il faut mesurer et assumer jusqu'au bout. Déjà, parce que le réal en question peut tout à fait livrer un grand film demain. Personne n'est medium.
"Surestimé", c'est naturellement basé sur un moment donné : en 2016, à la sortie de Midnight Special, Nichols peut être considéré comme surestimé quand on voit qu'il est comparé à Malick et Spielberg (comme Shyamalan à ses débuts), et déjà adoré par certains. En 2016, on peut considérer que Malick est surestimé quand on trouve que Knight of Cups et A la merveille sont loin d'être de grands films, et que son cinéma est loin d'être aussi grandiose et intelligent que le pensent sincèrement ses adeptes.

Au final ça revient à une simple idée : certains vont considérer que Take Shelter est un grand film, et d'autres un film minable. Pareil pour Knight of Cups. De la même manière qu'aucun n'aura raison, personne n'aura tort de dire qu'untel est surestimé. S'il considère que le réal est loin d'être à la hauteur de son image "publique" (Malick serait ainsi un demi-dieu du cinéma, hors catégorie, hors système, hors structure classique ; Nichols serait un jeune prodige).

La seule bêtise dans cette histoire serait de vouloir entièrement affirmer "il est surestimé", puis vouloir convaincre l'Autre que c'est une Vérité. Et non un avis. Basé sur une sensibilité, notamment. Et une culture.

Cervo
14/03/2016 à 15:37

Justement, l'expression "surestimée" elle est à manier avec précaution. Qu'on aime ou pas.

Tout simplement parce qu'il faut un peu de temps pour l'affirmer intelligemment. Je n'aime pas Nichols, pas du tout. Je trouve que son cinéma oscille entre le correct (Mud) et le minable (Take Shelter).

Mais je vais faire gaffe avant de le qualifier de surestimé. Parce que si dans 10 ans je vois 15 films par ans qui le citent ouvertement, que je le veuille ou non, que je l'aime ou pas, que je le considère comme un copiste incompétent ou pas, il aura eu un poids qui fait de la question de la l'estime "juste" ou non est presque caduque. Parce qu'il sera devenu un objet d'influence et un créateur de formes.

A l'inverse, Nolan me paraît indiscutablement surcôté. Il suffit de voir combien ses films, (à part The Prestige, qui est très sympathique), sont des sources d'inspirations... dans le domaine du marketing. Il n'a pas de poids, ses films restent peu (à part le Joker de Ledger, mais il y est finalement pour peu de choses). Par exemple, un voile pudique recouvre déjà Interstellar, dont les gens semblent réaliser quelques mois seulement après sa sortie que c'est tout vide.

annaselinnaer
14/03/2016 à 14:13

Mauvaise foi donc de dire "à peu près tous les genres et réalisateurs Hollywoodiens de talent s'en inspirent à mort", pour citer Abrams, Lowery, Gosling et Cooper.
On peut dire que Malick inspire, certes, sans aller jusqu'à affirmer ça.

Et ça marche dans les deux sens : si on peut tout à fait dire que Nichols dit une chose et en filme une autre, on peut tout à fait se dire que Abrams a beau être super inspiré par Malick en interview pour avoir une jolie réponse cinéphile, ça saute pas aux yeux dans ses films.

Sans aller jusqu'à parler de métamorphose totale de son cinéma (jamais dit ça d'ailleurs), j'ai pas du tout souvenir que dans ses films précédents, Malick avait cette caméra virevoltante. Ni Innaritu. Donc Lubezki n'étant pas un chef op ordinaire, on peut clairement imaginer qu'il apporte sa sensibilité. Un dir photo n'est pas un simple exécutant (la blague de "vous connaissez la différence entre Dieu et un chef op ?...).
Et j'ai jamais dit que Lubezki imposait quoi que ce soit. C'est une collaboration.

On peut justement dire qu'il est surestimé quand on est pas sensible à son cinéma. Et quelqu'un qui l'est pourra totalement trouver ça bête et non fondé. C'est le principe. Libre à chacun de défendre un réal apprécié ou admiré. La balance vient des goûts et visions différentes des choses, pas du désir d'avoir raison (puisque c'est illusoire).

Cervo
14/03/2016 à 13:51

Nichols peut bien dire "nan c'est pas du Malick", il peut même sincèrement le penser, la composition des plans de Take Shelter, ça me paraît évident.

Inarritu, dire que c'est le chef op qui créé ce rapprochement c'est à la fois exact et absurde. Exact parce que oui, Lubezki est un lien objectif. Absurde, parce que si Inarritu va le chercher c'est bien pour ça justement. Ensuite prétendre que le cinéma de Malick s'est métamorphosé avec Lubezki c'est d'une mauvaise foi absolue. Egalement parce que le chef op ne décide pas des plans et de leur agencement. Quand Inarritu se met à filmer pendant des plombes la nature au grand angle et des arbres en contreplongée, c'est pas Lubezki qui l'impose, c'est lui qui lui réclame cette image qu'il a créé avec Malick.

Snyder revendique haut et fort que son cinéma est influencé par Malick. J.J. Abrams a expliqué avant la sortie de Star Wars que Malick était le cinéaste actuel qui l'inspirait le plus. Pareil pour David Lowery (Les Amants du Texas). Scott Cooper, dans Crazy Heart et Les Brasiers de la Colère, c'est également frappant.

On peut continuer des heures. Les séquences d'exposition de Lost River, dans la banlieue presque rurale de Detroit, tu pourrais croire à des chutes de Tree of Life.

On peut continuer encore un bon moment.

C'est pas une question de dire "Malick est un dieu, un génie, nia-nia-nia-nia-nia". On peut tout à fait taper sur son cinéma, je m'en cogne. Expliquer qu'il est "surestimé", alors qu'objectivement, depuis Tree of Life, ses images réapparaissent dans énormément de films américains, ça me semble être une façon un peu stérile de se braquer.

annaselinnaer
14/03/2016 à 13:41

Qui sont "tous les genres et réalisateurs" qui s'inspirent "à mort" de Malick ?

Nichols a clairement dit qu'il ne comprend pas vraiment et ne valide pas plus que ça cette filiation.

The Revenant, c'est le chef op le lien. Le pont est facile à faire tellement Lubezki a une patte, qu'on ne retrouve pas dans les Malick et Inarritu sans lui.

Cervo
14/03/2016 à 11:44

Malick : tellement surestimé qu'à peu près tous les genres et réalisateurs Hollywoodiens de talent s'en inspirent à mort.

Notamment Inarritu, dont The Revenant pille des pans entiers de son cinéma.

C'est bien connu, quand quelqu'un devient une source d'inspiration majeure de son vivant, c'est souvent quelqu'un de surestimé !

stivostine
12/03/2016 à 13:18

Terrence Malick en voila un de real surestimé, Nolan a aussi fait le Prestige : chef d'oeuvre !!!

Flash
12/03/2016 à 11:08

Bon, j'avais adoré Mud, je m'étais un peu emmerdé avec Take Shelter, là je vais passer mon tour.

KLM
12/03/2016 à 01:45

@Mad
Je pense que si, pour ma part. Un réalisateur peut être surestimé, quand bien même un spectateur lambda ne saurait le resituer. On ne parle de surestimation populaire dans ce cas, mais d'une surestimation cinéphile justement.
On sent bien un courant très enchanté par Nichols depuis Take Shelter, au point que dès la première image de Midnight Special c'était du pur enthousiasme, sans aucune mesure parfois.
Shotgun Stories, vu en salles, ne m'avait laissé aucune impression. J'aime Take Shelter, mais par ex Mud, en faire un grand film, honnêtement je trouve que c'est le symptôme de cette "hype".
Et de beaucoup de choses qu'on projette sur lui... Nichols étant le premier à dire qu'il ne voit pas en quoi il y a du Malick dans son cinéma, sauf si on considère que filmer la nature avec une belle photo est Malickien.

Mais bon effectivement c'est des avis subjectifs. De la même manière que tu dis "Nolan adulé pour pas grand chose" (et je le trouve également un peu surestimé), faut te dire que certains trouvent qu'on en fait des tonnes pour Nichols, qui est intéressant sans être ce grand réal en puissance qu'on aime coller dans le chemin de Malick, Ford, et maintenant Spielberg avec Midnight Special (cf l'affiche...)

Mad
12/03/2016 à 00:44

Eh calmez-vous haha! Je ne voulais pas de ça après mon commentaire. Je ne trouve pas Nichols surestimé. Il est assez peu en vogue auprès du grand public (Pas comme pourrait l'être Nolan, qui lui est adulé pour pas grand chose.) Les cinéphiles l'aiment beaucoup et ce n'est pas pour rien. Après, oui, il faut aimer son style mais jamais je ne pourrais dire qu'il est surestimé. Il a une telle façon de filmer, de mettre en valeur la nature et l'humain en général. C'est un croisement entre Terrence Malick et John Ford. Amoureux des grands espaces et des histoires "brutes". C'est peut-être avec ce Midnight Special qu'il va gagner en popularité auprès du public lambda. Mais allez parler de Shotgun Stories, Take Shelter ou Mud à un amateur et il vous dira qu'il ne connait pas. Je ne pense pas qu'un réalisateur puisse être surestimé quand son public se limite aux cinéphiles, aux adorateurs de cinéma indépendant ou aux curieux qui creusent un peu pour trouver des pépites.

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