The Tudors - Saison 1

Stéphane Argentin | 24 mars 2008
Stéphane Argentin | 24 mars 2008

Considéré, à tort ou à raison, comme la réponse de Showtime au Rome de HBO (deux chaînes de surcroît opposées de longue date jusque dans leurs sièges respectifs situés sur les deux côtes américaines, Est et Ouest), The Tudors vaut bien mieux que le qualificatif de « Rome du pauvre » que certains lui ont attribué à la hâte.

 

Quitte à crever l’abcès, autant le faire d’entrée de jeux : oui, The Tudors souffre bel et bien de la comparaison avec son illustre prédécesseur. Mais après tout, comment pouvait-il en être autrement lorsque, sur le papier comme à l’écran, outre l’étiquette de « suiveur » (Rome date de 2005, The Tudors de 2007), la prestigieuse et prodigieuse série de HBO a posé des jalons désormais quasi inégalables ? Un budget pharaonique (100 millions de dollars pour la seule première saison), un faste combiné à une crasse visuelle sans précédant pour un péplum, une liberté graphique totale (orgies, tortures, décapitations en Co.) qu’aucun concurrent ne peut se permettre (HBO est une chaine à péage, Showtime une chaine du câble plus « grand public »). Sans compter l’ancienneté combiné à la notoriété de John Millius (l’un des trois hommes à l’origine de Rome) là où Michael Hirst (le créateur et unique scénariste de tous les épisodes de la première saison de The Tudors) possède pour seul fait d’arme « notable » sur son CV le script d’Elizabeth.

 


Mais dans les faits justement, qu’est-ce que The Tudors ? En bref : la vie tumultueuse, aussi bien politique que sentimentale, de Henri VIII, roi d’Angleterre de 1509 à 1547. Dans le détail, la première saison débute peu avant la rencontre entre François Ier, roi de France, et Henri VIII au camp du Drap d’Or en 1520 (entrevue visant à la signature d’un traité de non-agression entre les deux royaumes) pour s’achever en 1530 avec la mort de Thomas Wolsey, Cardinal très influent auprès du souverain britannique en charge de la politique étrangère. Campé par un Sam Neill aussi brillant que machiavélique, cet ecclésiaste aux méthodes bien peu catholiques prêt à se livrer à chacun des sept pêchés capitaux les uns après les autres symbolise à lui seul la série, à savoir le J.R. d’une saga familiale autour des Tudors, dynastie royale à la tête de l’Angleterre de 1485 à 1603 et dont le pivot central serait donc cet Henri VIII.

 


S’il fallait en effet dresser un parallèle entre The Tudors et une autre fiction télévisée, ce serait davantage avec le mythique soap texan Dallas imaginé par David Jacobs et non avec la fresque impériale du Rome de Millius. Dans The Tudors, les différents enjeux politiques (Henri promet la main de sa sœur et de sa fille à des seuls fins diplomatiques), religieux (la montée en puissance du luthéranisme) et sentimentaux (la relation passionnelle entre le roi et Anne Boleyn) qui se jouent au sein de décors, certes restreints en taille (une majorité de séquences prend place entre les quatre murs ouatés d’un château) mais à la restitution visuelle (décors, costumes et accessoires) tout aussi réussie que Rome, évoquent en effet bien davantage les différents actes d’une pièce de théâtre autour d’une seule et même famille : les Tudors et leur proche entourage.

 


Une pièce dont le seul véritable reproche serait en définitive une construction quelque peu décousue. Les évènements historiques (telle cette grande épidémie de Suette qui fit des dizaines de milliers de victimes en Angleterre en 1528 et occupe à elle seule un épisode entier) et le passage systématique d’une entité « lieu / personnages » à une autre sans le moindre repère temporel (les édifices ou les villes sont cités mais jamais les dates) se succèdent en effet sans la même densité et continuité que Rome, aboutissant de facto à une tapisserie royale (les comédiens sont tous impériaux et à la hauteur des moyens mis en œuvre) relatant une décennie de règne où les baisses de rythmes sont régulières mais néanmoins contrebalancées par de grands élans de pure dramaturgie théâtrale. À l’image de cette rédemption pré-mortem du Cardinal Wolsey ou encore de ce magnifique final du procès en place publique opposant Henri VIII à son épouse Catherine d'Aragon au cours de l’antépénultième épisode.

 


Alors certes, The Tudors (sa première saison tout du moins) ne se hisse pas à la hauteur de Rome (une série le pourra-t-elle vraiment à présent ?) et comporte encore des irrégularités. Mais cette évocation du règne d’un Henri VIII aussi impétueux que passionné et interprété comme tel avec justesse par Jonathan Rhys Meyers n’en demeure pas moins une bien belle réussite télévisuelle. On attend désormais de découvrir si la deuxième saison saura corriger les erreurs de jeunesse précitées en vue de nous aspirer pour de bon dans ce mélodrame royal où nous attendent encore quelques unes des plus grandes heures de la monarchie du souverain : l’anglicanisme ou encore la future rupture charnelle d’avec Anne Boleyn, tous deux annoncés au cours du season finale (les hérétiques brûlés et le coït final).

 

 

The Tudors saison 1 : Tous les lundis soirs à 20h50 sur Canal + à partir du 24 mars 2008.

 

NB : Hasard ou coïncidence du calendrier, à l’heure où la première saison de The Tudors sera diffusée sur la chaine cryptée, sortira dans les salles une évocation assez réussie de la rivalité amoureuse entre Anne (Nathalie Portman impériale) et Mary Boylen (Scarlett Johansson toujours aussi désirable) pour s’attirer les faveurs de Henri VIII (Eric Bana enfin débarrassé des ses oripeaux verts) : Deux sœurs pour un Roi. Un fait à peine évoqué dans la série.

 

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