Top horreur n°29 : The Descent

Jean-Noël Nicolau | 3 octobre 2009
Jean-Noël Nicolau | 3 octobre 2009

Pour fêter le mois d'Halloween, la rédaction d'Ecran Large a pris son courage à deux mains et s'est lancée dans l'impossible : élire ses 31 meilleurs films d'horreur dans l'histoire du cinéma. Pour être le plus rigoureux possible, des règles ont été établies comme celle de ne pas avoir plus d'un film par cinéaste dans le classement final (sauf une exception mais chut on vous expliquera à la fin du mois pourquoi). 12 membres de la rédaction ont donc été invités à envoyer leur liste de leurs 40 films préférés. A partir de ces listes, on n'a gardé que les films cités plusieurs fois par chacun d'entre nous. On a alors resoumis la liste finale à un vote pour obtenir le classement final que nous allons vous faire découvrir quotidiennement jusqu'à la fameuse nuit d'Halloween qui révèlera le numéro 1 de la rédaction. Un éclairage par jour durant 31 jours sur des incontournables du cinéma d'horreur.  

 

29 – The Descent (2005) de Neil Marshall

 



Tonton BDM :

The Descent est une preuve supplémentaire, s’il en fallait encore une, de l’extrême vitalité du cinéma d’horreur anglais.

Sandy Gillet :

L’un des rares films des années 2000 à vraiment foutre le trouillomètre à zéro. Et rien que pour cela on ne peut passer à côté !

L'avis de Vincenzo Natali (Cube, Splice)

Il y a une séquence dans The Descent qui m'a fait sauter de mon siège. Rien que pour ça le film mérite toutes les éloges.

 

Après le succès de Dog Soldiers en 2002, véritable triomphe des vidéo-clubs, le réalisateur britannique Neil Marshall craint de se voir enfermer dans le genre des films d'horreur. En effet, toutes les propositions qui lui parviennent alors tournent autour de monstres et autres joyeusetés. Il accepte cependant d'écrire et de mettre en scène The Descent en collaboration avec le jeune producteur Christian Colson dont il s'agit du premier travail pour le cinéma. Quelques années plus tard Colson allait devenir une superstar grâce au phénomène Slumdog millionaire dont il est aussi le producteur.  

 

A l'origine, le casting du film devait être mixte. Dans sa quête d'une approche originale, Marshall opta pour des protagonistes exclusivement féminins. Le réalisateur a demandé conseil à de nombreuses collaboratrices pour éviter autant que possible les clichés. C'est ainsi que Shauna Macdonald, Natalie Mendoza, Alex Reid, Saskia Mulder, MyAnna Burng et Nora-Jane Noone ont été choisies pour incarner les héroïnes. De ce casting, Nora-Jane Noone était probablement l'actrice la plus connue, grâce à son rôle dans The Magdalene Sisters, Lion d'Or du Festival de Venise 2002. La présence d'actrices aux accents et aux sensibilités différentes est l'une des premières qualités de The Descent. Œuvre viscérale qui cherche à nous faire ressentir chaque situation, chaque explosion de violence au plus profond de nous, en une empathie totale pour les héroïnes. Avec leur (grande force) et leurs (immenses) faiblesses, elles apportent une touche de réalisme plutôt rare dans le domaine de l'horreur.


Même si le film est censé se dérouler aux Etats-Unis, il a été entièrement filmé au Royaume-Uni. Les extérieurs ont été tournés en Ecosse et toute la partie dans la grotte au studio de Pinewood près de Londres. Pour des raisons de sécurité et de temps, aucune scène n'a été tournée dans une vraie grotte. Avec très peu d'éléments de décors, en utilisant des agencements différents et un éclairage limité, The Descent donne l'impression de présenter de nombreuses salles et couloirs uniques. La topographie permet de créer une désorientation proche de la claustrophobie tout en rendant l'univers très lisible. La progression de la gauche du cadre vers sa droite ne se trouvant remise en question qu'à partir du moment où le chaos s'installe avec l'arrivée des Crawlers.

Pour créer la tension, parfois insoutenable, du film, Neil Marshall avoue s'être inspiré de Massacre à la tronçonneuse et de Délivrance« Nous voulions faire monter l'angoisse très progressivement, explique-t-il. Pas de la même façon que les films d'horreur américains actuels. Ils mettent les compteurs à 11 dès les premières minutes et ils ne peuvent plus suivre ce régime au fil du métrage. Nous voulions montrer les aspects les plus terribles de la caverne : l'obscurité, l'étouffement, la claustrophobie. Et quand cela semblait impossible que cela devienne pire, cela devient pire ! »

Durant sa conception, The Descent s'est trouvé en concurrence avec un film américain au sujet similaire : The Cave. L'œuvre de Neil Marshall devait sortir en novembre 2005 ou février 2006 au plus tard. Mais The Cave débuta son tournage avec 6 mois d'avance sur The Descent. Il fut alors décidé d'accélérer la production pour sortir avant la concurrence, le tournage étant bouclé à la fin du mois de février 2005.


Il existe un montage différent pour les Etats-Unis auquel il manque une minute. Il s'agit de la toute fin du film, le montage américain s'achevant au moment où Sarah aperçoit Juno couverte de sang près de la vitre de sa voiture après s'être échappée. Le retour dans la caverne, où l'on découvre que Sarah a perdu la raison, avait été supprimé par Lionsgate après les projections tests. Les spectateurs trouvaient en effet que la fin originale était beaucoup trop déprimante. Le réalisateur a commenté ce choix ainsi en le comparant à Massacre à la tronçonneuse : « Le fait qu'elle s'échappe entraîne-t-il vraiment une fin heureuse ? »


La création des monstres du film, les Crawlers fut assez complexe. Leur apparence se situant entre « le Gollum du Seigneur des anneaux et les Reapers de Blade 2 », les créatures devaient être proches de l'humain mais sans jamais pouvoir créer l'empathie. La peau des Crawlers devait être phosphorescente à l'origine, mais le résultat était beaucoup trop lumineux dans un univers aussi sombre.  Le design des Crawlers fut soigneusement dissimulé aux actrices qui furent ainsi réellement terrifiées lors de la première apparition du monstre dans la caverne. Natalie Mendoza raconte : « Quand ce moment est arrivé, j'ai failli mouiller mon pantalon ! Je courrais dans tous les sens, avec un rire hystérique et j'essayais de dissimuler le fait que j'étais vraiment horrifiée. Après cette première scène, nous ne nous sommes jamais senties à l'aise avec les Crawlers. »

Marshall insista pour créer un univers le plus réaliste possible pour ses créatures. Elles apparaissent ainsi dans leur « nid », et l'on peut y déceler des spécimens mâles et femelles, ainsi que des adolescents. « Je voulais une espèce très primitive et sauvage, vivant dans les profondeurs, mais je les voulais aussi humains, explique Marshall. Je ne voulais pas en faire des aliens, parce que l'humanité est ce qu'il y a de plus terrifiant. » Le résultat donne un sentiment de sauvagerie rarement aperçu sur un écran de cinéma. La brutalité des Crawlers vient incarner l'angoisse qui semble parcourir le film de son premier à son dernier plan.

La campagne de promotion du film fut perturbée par les attentats de Londres en juillet 2005. Les affiches durent être modifiées au dernier moment. Ces événements eurent vraisemblablement des répercutions sur le box-office, même si le film engrangea 6 millions de livres sur l'ensemble de l'Europe. Le box-office mondial s'éleva à 57 millions de dollars, un score très honorable pour un film ayant hérité des interdictions les plus dures dans tous les pays (moins de 16 ans en France, par exemple). Les critiques furent dans l'ensemble positives, voire très positives et le film se hissa même à la 10e place du classement de fin d'année du Washington Post. Depuis une suite a été tournée, précédée d'une réputation peu flatteuse, elle sort le 14 octobre dans les salles françaises.

Expérience tétanisante en salles, profitant d'une progression implacable, The Descent fit sensation auprès d'un large public, avant d'engendrer un culte vivace. Pourtant le schéma de base est on ne peut plus classique, c'est la perfection de sa mise en œuvre, belle dans sa brutalité, intense dans son traitement des terreurs les plus intimes, qui persiste à nous scotcher à chaque vision. Neil Marshall révélait ici une efficacité de réalisation inattendue et s'offrait une place de ténor de la nouvelle génération des artisans de la série B. Chose confirmée avec le déjanté Doomsday et le prometteur Centurion.

 

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