Pushing daisies : La merveille télé morte-née

Stéphane Argentin | 28 novembre 2008
Stéphane Argentin | 28 novembre 2008

Octobre 2007 : notre preview enthousiaste de Pushing daisies rejoint une large majorité de la presse américaine. Cette nouvelle petite merveille sérielle née de l’imaginaire de Bryan Fuller se veut en effet à contre-courant des autres productions télévisuelles de ces dernières années : une mise en scène posée et appliquée (exit les caméras à l’épaule et autres décadrages à tout-va) que l’on doit à Barry Sonnenfeld, réalisateur du pilot, combinée à une esthétique aquarelle digne d’un conte de fées pour un résultat à l’écran aussi surréaliste que magique. Graphiquement, beaucoup y ont vu (en bien ou en mal) un joyeux melting-pot artistico-narratif depuis l’univers de Terry Gilliam jusqu’à celui de Jean-Pierre Jeunet (notamment Amélie Poulain et sa narration en voix-off), sans oublier bien sûr Tim Burton.

 

 

 

 

Loin de renier ces multiples sources d’inspiration, Fuller les amalgame en un mélange des genres aussi improbable qu’enjôleur : le drame (entre autres fil rouge de la saison 1 : Ned finira-t-il par avouer à Chuck qu’il est indirectement responsable de la mort du père de cette dernière ?), la romance (le couple Ned / Chuck auquel se joint une troisième larronne, Olive), le suspense (les différentes enquêtes en compagnie d’Emerson) et, bien entendu, la comédie. Quel meilleur remède en effet que le second degré pour aborder sur un network US, en l’occurrence ABC, les multiples trépas que comportent la série ? Expert en la matière (cf. les décès tous plus truculents et folkloriques de Dead like me), Bryan Fuller partage aussi avec Tim Burton l’art délicat de parler de la Vie (avec un V majuscule) au travers de la Mort comme nul autre pareil. Il ressort ainsi que chaque épisode, voire de chaque scène, un sentiment contradictoire mais oh combien immersif de gravité et de légèreté. Cette combinaison se trouve de surcroît renforcée par l’intemporalité de la série (le lieu et l’époque ne sont jamais précisés, aussi bien oralement que visuellement) en dépit d’intrigues qui flirtent parfois avec une certaine contemporanéité (1.4- Pigeon : un avion qui s’écrase dans un building).

 

 

 

 

 

De crash, la série en aura hélas subit un gros. Après un solide démarrage à 13 millions de téléspectateurs le 3 octobre 2007, les audiences se sont égrainées au fil de la première saison, fauchée de surcroît de plein fouet par la grève des scénaristes hollywoodiens pour ne compter au final que neuf petits épisodes. Absente des écrans pendant neuf mois (autant dire une éternité en matière de shows TV), la saison 2 débute en octobre 2008 avec des audiences diminuées de moitié. Sous perfusion, Pushing daisies survit tant bien que mal durant quelques semaines avant que le couperet ne tombe pour de bon fin novembre : la chaîne ABC, habitué à des scores autrement plus florissants (Desperate housewives, Grey’s anatomy, Lost…), met un terme à la deuxième saison en cours et signe de facto l’arrêt de mort de la série.

 

Trop onirique et décalée pour son époque ? Victime de la grève des scénaristes et/ou de l’Obamania ? Toujours est-il que Pushing daisies (2007-2008) n’ira pas au-delà de la petite vingtaine d’épisodes et rejoint ainsi le sort funeste qu’avaient déjà connu les deux shows précédents imaginés par Bryan Fuller : Dead like me (2003-2004 : 29 épisodes) et Wonderfalls (2004 : 14 épisodes). Une situation oh combien ironique donc que les tranches de vie de ce créateur de génie, aussi intenses à suivre, qu’éphémères.

 

Pushing daisies - Saison 1 : Tous les jeudis à 20h50 sur Canal+ à partir du 27 novembre 2008.

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