Outcast : la série d'exorcisme du créateur de The Walking Dead valait-elle le coup ?

Geoffrey Crété | 17 août 2016 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Geoffrey Crété | 17 août 2016 - MAJ : 09/03/2021 15:58

Alors que The Walking Dead déchaîne de plus en plus la haine malgré son succès indéniable, l'auteur Robert Kirkman s'envole vers de nouveaux horizons avec une nouvelle série adaptée de ses comics : Outcast.

Le pilote promettait beaucoup. Réalisé par Adam Wingard (You're Next, V/H/S) et scénarisé par Kirkman, le premier épisode installait une belle ambiance à le Stephen King dans une petite ville isolée, prison à ciel ouvert de Kyle Barnes, lié depuis son enfance à des forces maléfiques qui prennent possession de ses proches - sa mère, puis la mère de sa fille. Grâce à un révérend et poussé par sa soeur, il décidait de sortir de sa tannière pour utiliser ses dons extraordinaires et aider son prochain.

Mais la suite de la saison a confirmé ce que le deuxième épisode laissait craindre : Outcast traîne, s'étire et hésite trop à se lancer dans son histoire, alors même que certains aspects sont passionnants.

ATTENTION SPOILERS

 

Outcast

 

I WANT TO BELIEVE

Le principal et ordinaire défaut de cette première saison : la volonté de construire des épisodes indépendants, avec Kyle Barnes et le révérend Anderson confrontés à une nouvelle personne possédée. Ce n'est peut-être pas innocent si l'un des personnages fait référence à "ces conneries des Experts" dans une scène : en suivant peu ou prou le schéma d'une série policière, où le duo de héros rencontre dans chaque épisode un nouveau cas et trouve de nouveaux indices, Outcast ne se montre pas à la hauteur de ses ambitions premières.

Car la série commence avec un Kyle Barnes reclus dans sa maison, meurtri par un don qui a détruit sa vie et brisé ses simples rêves. Outcast semble alors s'embarquer dans une histoire type feuilleton, avec un rythme qui annonce une évolution lente, une montée en puissance précise et maîtrisée. Or, l'intrigue passe par des étapes très classiques, très prévisibles, avec un héros doté de capacités extraordinaires qui tente de résoudre des cas isolés tandis qu'une menace plus grande montre peu à peu son visage. Alors même que le beau générique, anti-spectaculaire mais terriblement envoûtant, vend un objet à contre-courant, avec une identité forte, chaque épisode semble dire l'inverse.

Même la présence encore une fois épatante de Grace Zabriskie, visage connu des fans de David Lynch, ne peut atténuer cette nette impression que la série de Kirkman échoue à véritablement plonger le spectateur dans son univers à cause de cette narration un peu plate.

Outcast semble en plus lutter contre cette architecture puisqu'il n'y aura pas d'exorcismes à la chaîne. Le liquide noir du diable reste étonnamment rare dans la première saison, les épisodes manquent de scènes fortes. Peu d'andrénaline ou de surprise une fois le décor installé dans le pilote, la série suivant des rails usés.

 

Photo Patrick Fugit

 

L'ANTRE DE LA FOLIE

Problème là encore classique : Outcast repousse le vrai coeur de l'histoire dans les derniers épisodes, nettement plus inspirés. A mesure que la mystérieuse figure de Sidney (incarné par Brent Spiner, bien connu des fans de science-fiction avec Star Trek et Independence Day) s'impose comme centrale, la série traite son vrai sujet : l'apocalypse.

Cette innocente petite ville coupée du monde, presque hors du temps et abandonnée par la modernité, est ainsi le siège d'une invasion silencieuse, insidieuse. Elle commence par remplacer un par un les visages familiers, sans créer ni peur ni panique dans certains cas. Elle s'est adaptée aux méthodes d'exorcisme, laissant croire à ses adversaires qu'ils ont remporté une victoire pour mieux les piéger. Le personnage du prêtre Anderson se révèle ainsi plus vif et complexe que prévu, même si son rôle en arrière-plan n'aide pas forcément à donner une vraie valeur à ses questionnements.

 

Photo Brent Spiner

 

L'épisode 8 offre l'une des scènes les plus saisissantes de la saison lorsque Lenny explique qu'il a vu sa femme changer, qu'il a compris qu'elle était autre chose, mais qu'il préfère cette version neuve, naïve, passionnée, inconnue. Peu importe le prix à payer. Il avoue même avoir aidé une demi-douzaines de personnes à gérer cette métamorphose difficile.

Là, il devient clair que le combat de Kyle et Anderson n'est pas uniquement contre le Mal : il est aussi voire surtout contre l'Homme. Contre ceux qui ne croient pas à cette magie noire et à l'existence du diable, mais aussi contre ceux qui ont vu cette force des ténèbres, et ont décidé de l'accepter, de l'embrasser.

Par ailleurs, Outcast utilise l'aspect fantastique de l'histoire pour interroger la folie humaine. La mère de Kyle, l'homme qui a violé Megan, le révérend au yeux de son église : la frontière entre la clairvoyance et la démence, entre le mal venu d'ailleurs et celui qui est né dans l'esprit d'un individu, est au coeur de l'histoire. Les démons sont-ils surnaturels ou humains ? Lesquels sont pires ? Le cycle de la violence est sans cesse rejoué, notamment la violence dans la cellule familiale, avec la terrible idée du déterminisme qui ronge peu à peu les victimes.

 

Pilote

 

FAMILY MAN 

L'autre argument de la fin de saison est évidemment le personnage de Megan. Si l'arc consacré à son viol reste un peu flou dans ses intentions, notamment parce qu'il occupe une place très importante sans tomber dans la vengeance attendue, la soeur de Kyle apporte la violence nécessaire à la série lorsqu'elle est possédée par le démon et tue son mari dans une scène-choc.

Dans le très bon épisode 8, Sidney explique à Kyle qu'il est "comme une allumette qui scintille dans une forêt sombre", un aimant pour ces forces maléfiques en quête d'hôtes. Cette facette tragique du personnage, à la fois source et solution du cauchemar, est certainement l'âme de la série. Toute l'intrigue autour d'Allison, la femme de Kyle et mère de sa fille Amber, tourne autour de la culpabilité qui ronge le héros, et l'empêche d'assumer son rôle et son pouvoir. A ce titre, Kate Lyn Sheil (vue dans You're Next et la série The Girlfriend Experience) apporte beaucoup d'émotion et de nuances malgré son peu de temps à l'écran.

 

Photo Kate Lyn Sheil

 

KICK ASS

Outcast parvient donc à redresser la barre et sortir des sentiers trop ordinaires dans sa dernière ligne droite, plus claire dans ses intentions et ambitions. Du moins dans les thématiques et l'histoire, car la mise en scène se révèle parfois illisible ; la faute à une caméra et une lumière étonnamment faiblards dans certaines scènes, notamment dans le dernier épisode, la série ne se montre pas toujours à la hauteur de son univers.

Dans ses derniers instants, cette première saison vend pourtant quelque chose de plus excitant encore : désormais épaulé par sa fille, dotée des mêmes pouvoirs que lui, Kyle quitte la ville. Dans une station service, ils réalisent l'étendue de leur pouvoir, mais également de la menace qui se dresse devant eux, lorsque plusieurs inconnus les fixent d'un air étrange. Un délicieux clin d'oeil aux Body snatchers qui apporte une touche d'angoisse nécessaire à la série, et ouvre de belles perspectives pour la suite.

 

Photo Patrick Fugit

 

Dans l'épisode 10, Outcast semble pencher vers une histoire de super-héros tordus, torturés, malades, comme une version encore plus désenchantée qu'Incassable de Shyamalan. Ce n'est pas un simple hasard si Amber répond à son père qu'elle aurait préféré avoir le pouvoir de voler, ou être invisible.

Le père et la fille ont une main quasi divine, capable d'exorciser et effrayer le Mal alors que celui-ci se répand dans l'Amérique, voire le monde, comme ce liquide noir infiltré dans le décor de la ville du générique. Jusqu'où ira la saison 2 ? Cette ouverture vers une invasion à plus grande échelle sera t-elle assumée ? Outcast deviendra t-elle cette série qu'elle semble capable d'être ?

La promesse est classique pour une série américaine. Reste à savoir si le très critiqué Robert Kirkman saura la tenir, et si cette première saison aura offert suffisamment marqué les esprits pour donner envie de s'y replonger dans quelques mois.

 

Affiche

 

 

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commentaires
west666
17/08/2016 à 10:35

De grosse question se pose sur le dernier épisode , qui sont t'il qui est t'il vu qu'il vient du meme endroit que eux ????? des aliens des demons ????? faudra attendre la saison 2 merde.

nimbari
16/08/2016 à 16:47

C'est vrai que ça se traîne un peu, mais, les 2 derniers épisodes sont excellents, on trouve dans cette série des idées nouvelles sur le thème de la possession, ce n'est pas aussi manichéen qu'on pourrait le croire au vu du sujet, mais, je ne peut pas aller loin sans spoiler.

west666
16/08/2016 à 07:33

Au départ ça démarre fort , pour descendre de 3 crans , et tourner en rond parfois , mais cela reste interessant pour tenir un minimum mais pas mal sans plus .