Critique : Neil Young Journeys

Jérémy Ponthieux | 19 janvier 2013
Jérémy Ponthieux | 19 janvier 2013

Voilà la troisième fois que Jonathan Demme consacre un long tout entier à la personnalité de Neil Young, musicien folk de légende et chanteur caractérisé par sa voix tirant vers les aigus. Troisième partie que l'on pourrait croire s'apparenter à un bilan, d'autant plus que le titre sous forme de voyage introspectif nous invite à la confidence. Si on se doutait bien qu'il ne fallait pas attendre de cette dernière collaboration un document à but pédagogique, renseignant sur l'artiste comme on feuillète une page Wikipédia, il aurait été difficile d'imaginer un résultat plus autiste, projet destiné à capter l'intérêt des fans les plus ardus avant tout.

Neil Young Journeys n'est pas vraiment un documentaire. C'est davantage une captation de concert entrecoupée d'anecdotes glanées au gré du voyage qu'est la tournée de l'artiste, qu'il organise avec la seule aide de son frangin et de deux Cadillac. Les commentaires nostalgiques disséminés par l'artiste sur les lieux qu'il traverse n'ont rien de passéiste, mais brosse le portrait d'un témoin d'une Amérique révolue, celle du temps savouré et des maisons en brique où une certaine insouciance poussait les gamins à mettre le nez dehors. Bien que confessées avec une bonne humeur communicative, les anecdotes personnelles de l'artiste n'ont aucune logique narrative ni aucun poids émotionnel, ce qui peut donner l'impression de naviguer dans les bonus d'un dvd davantage que dans un film à 9 euros le ticket. Le chanteur n'est pas aidé par la technique approximative de Demme, qui fait apparaître moult micros et autres scratchs de sons, guère justifié par le rapport intimiste qu'entretiennent les deux hommes.

Le reste (et majorité) du long-métrage se compose d'une captation live au Massey Hall de Toronto, salle mythique pour Neil Young qui l'aura vu évoluer au fil d'une cinquantaine d'années. L'artiste s'y ballade avec assurance et professionnalisme, seul en scène 100% du temps, ce qu'appuie Demme en ne provoquant aucun retour du public par le truchement de la caméra. Musicalement, les fans risquent d'être comblés, le chanteur alternant morceaux du dernier album et ballades mythiques, transcendés par des textes soucieux d'évoquer une histoire américaine douloureuse et en construction. Le problème provient davantage de la mise en scène, puisqu'en dehors d'alterner trois points vus à la fixité désarmante, le réalisateur tente quelques expérimentations malheureuses, comme ce plan à même le micro qui fait davantage pour la glotte de l'artiste que pour l'intimité de l'audience. Vide en substance, la dernière collaboration des deux artistes donne davantage l'impression d'un creux artistique que d'une urgence créative, et laissera sur la route tout ceux qui ne sont pas à même d'ânonner chaque album du chanteur. Vous voilà prévenus.

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