Critique : Juliette

Perrine Quennesson | 16 juillet 2013
Perrine Quennesson | 16 juillet 2013

Si l'âge « adulte » commence officiellement à 18 ans où l'on est considéré comme majeur, cela n'est officieusement pas vrai. La raison ? L'allongement de l'espérance de vie, l'entrée tardive dans la vie active, l'accumulation des études, trop de perspectives, pas assez d'opportunités... les explications sont nombreuses et on les entend tous les jours vers 20h à la télévision.

Sans s'épancher sur le pourquoi du comment, Pierre Godeau, le jeune réalisateur de Juliette dont c'est le premier film, fait le constat d'une jeunesse désorientée. Son héroïne, incarnée par la ravissante Astrid Bergès-Frisbey, a 25 ans. Elle vit dans l'appartement de son père qui lui est à l'hôpital. Elle est belle, pas plus bête qu'une autre, n'a pas de souci d'argent particulier et, pourtant, elle est perdue. Incapable de faire un choix : celui de rester dans un état pubère où l'avenir reste encore un champ des possibles ou de se responsabiliser, de prendre une décision et de s'y tenir, d'en assumer les conséquences. Elle est dans un entre-deux qu'expérimente actuellement une bonne partie des 20-30 ans et, ce, peu importe le milieu d'où ils viennent.

Ce vacillement se fait ressentir par ses caprices, ses décisions parfois désarmantes et  l'inconstance de ses relations. Désagréable ? Oui, Juliette peut l'être. Notamment avec sa sœur, excellente Elodie Bouchez, qui symbolise le conformisme qui l'effraie tant. Dur, elle l'est aussi avec les garçons qu'elle fréquente qui représentent, eux aussi, l'impossible dilemme entre la passion et la raison. Mais elle est également en quête d'affection et d'approbation comme auprès de son père malade, le touchant Féodor Atkine, vestige de son enfance qui s'en va. Elle n'est pas méchante, mais plutôt honnête : elle transmet, par ce biais, sa peur face au vide devant elle. Portrait romancée d'une jeune fille de son époque comme Madame Bovary pouvait l'être en son temps, elle est aussi le symbole d'une génération. En ça le film peut être clivant.

Mais avec une mise en scène épurée, parfois fantasque, Pierre Godeau s'attache à nous faire découvrir tous les aspects de son héroïne mélancolique, nostalgique d'une période qu'elle n'a pas connue. La musique est également importante dans la mise en scène de Godeau. Très contemporaine et particulièrement désenchantée, elle vient souligner les états d'âme de sa Juliette.

Malgré quelques maladresses inhérentes à un premier film, Juliette de Pierre Godeau est un beau coup d'essai qui parvient à faire mouche en touchant parfois du doigt, avec justesse, l'impalpable pouls d'une certaine génération.  

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