Critique : Torpedo

Sandy Gillet | 21 mars 2012
Sandy Gillet | 21 mars 2012

En belge, torpedo désigne un vélo doté d'un frein situé au niveau des pédales et que l'on actionne en rétropédalant. Pour ceux qui ne sont pas familiers avec ce système, il faut bien avouer que quand on est gosse c'est ultra fun. Cela permet par exemple de frimer à mort en faisant des dérapages contrôlés avec trace de pneu sur le bitume devant des minettes bien entendu conquises. Les prémices du tuning en quelque sorte (on s'en fout me gueule-t-on dans l'oreillette). Pour Matthieu Donck dont c'est ici le premier film, il s'agissait avec ce titre de parler à sa Belgique natale (un torpedo est bien souvent le premier vélo pour beaucoup de ses compatriotes. Et non je ne suis pas belge) mais aussi de mettre d'emblée le personnage principal de son film au centre de son histoire : (...) cette notion de rétropédalage convenait parfaitement au personnage de Michel Ressac, un type qui va de l'avant et ne pense jamais à revenir en arrière.

François Damiens est Michel Ressac et Dieu que le rôle lui va comme un gant. Le cinéaste précise d'ailleurs qu'il l'a écrit en pensant à son personnage de François l'embrouille qui l'a popularisé à la télévision. C'est peut-être d'ailleurs le premier écueil que n'évite pas le film, qui l'assume même. Celui de proposer un François Damiens qui fait du François Damiens, voire le caricature. Certes pour notre plus grand bonheur, mais aussi à la charge d'un film qui se cloître dans ses attendus. L'autre credo évident de Torpedo c'est le côté un peu « old school » pour ne pas dire suranné de sa mise en scène. Une comédie qui nous vient tout droit dans sa manière d'être et de paraître des années 80/90 avec ses mouvements de caméra évidents et voyants, son montage estampillé ESEC 2ème année de cette époque et son histoire dont on a deviné les intentions dès la première minute. Et pourtant là encore tout semble assumé et étudié pour donner à ce film en apparence besogneux un souffle de liberté dans ses intentions, ses pérégrinations et sa façon de regarder dans les yeux son spectateur cinéphile ou non.  

Matthieu Donck rend ainsi hommage au cinéma de papa, à l'instar d'un Eddy Merckx (symbole d'une Belgique unifiée et où tout fonctionnait) enjeu de ce road movie belgico-français, qui permet à trois personnes que tout sépare, de former une sorte de famille idéale. Les ficelles sont énormes, le développement connu, mais tout le talent du réalisateur est justement d'arriver malgré ces handicaps de circonstance, à nous émouvoir et nous passionner. Comme un pied de nez ultime aux codes de bienséance cinématographique auxquels Donck tord le cou sans en avoir l'air. Voilà donc un élève qui a bien digéré ses leçons et qui devrait finir de conquérir son monde dans un proche avenir.

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