Critique : The Queen

Laurent Pécha | 3 septembre 2006
Laurent Pécha | 3 septembre 2006

Alors que la mode semble être au devoir de mémoire sur les tragédies marquantes de notre époque (voir les deux films, Vol 93 et World Trade Center), Stephen Frears apporte sa pierre à l'édifice avec The Queen, satire réjouissante sur les « coulisses » de la royauté anglaise à un moment où elle fut le plus sous les feux des projecteurs. En choisissant de nous faire entrer dans la vie intime de la Reine Elizabeth II en cette fin de mois d'août 1997, Frears prend le partie de mêler l'humour au drame puisque son film va suivre les relations médiatiques tumultueuses entre la famille royale et le reste du monde suite à la mort accidentelle de Lady Diana.

Porté de bout en bout par une faramineuse Helen Mirren qui peut déjà se préparer à recevoir une flopée de nominations (dont celle pour l'Oscar de la meilleure actrice en mars 2007) mais aussi par un Michael Sheen campant lui aussi un Tony Blair avec un extraordinaire sens du mimétisme, The Queen réussit à jouer habilement sur tous les tableaux ne cherchant jamais à diaboliser un camp plus qu'un autre. Avec la rigueur et le devoir de réserve d'un documentariste, Stephen Frears va continuellement s'évertuer à laisser le spectateur libre de ses opinions. Si le ton est avant tout léger, on rit de bon cœur du décalage des coutumes royales (mais jamais en se moquant), Frears sait être grave lorsqu'il s'attaque à la reconstitution d'un des événements les plus marquants émotionnellement de ces dix dernières années, la mort tragique de la Princesse de Galles.

Si le réalisateur anglais fait mouche que ce soit dans cette reconstitution (très belle scène où le Prince Charles découvre off screen le corps de son ex-femme) ou dans le portrait d'une femme d'exception (on découvre une Elizabeth toute dévouée à son peuple et respectueuse de ses devoirs et obligations), la plus grande réussite de The Queen reste encore et largement la description des relations entre la Reine et son Premier Ministre, Tony Blair. Que ce soit la séquence inaugurale d'investiture d'une drôlerie savoureuse en passant par les échanges téléphoniques brefs mais cinglants entre les deux personnages les plus importants du Royaume-Uni sans oublier cette tirade chargée d'émotion où Blair prend la défense de « sa » Reine, The Queen n'est plus ni moins que le tableau presque nostalgique d'un duo qui n'avait rien pour s'entendre mais qui par les aléas d'une crise sans commune mesure ont su faire bloc et tisser malgré eux des liens forts. En les voyant partir en pleine discussion dans les jardins du Palais lors des ultimes instants du film, on en viendrait presque à citer la fameuse tirade de Bogart dans Casablanca «…I think this is the beginning of a beautiful friendship ».

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