Polisse : critique aux mœurs

Sandy Gillet | 22 janvier 2023 - MAJ : 24/01/2023 17:09
Sandy Gillet | 22 janvier 2023 - MAJ : 24/01/2023 17:09

Maïwenn est un drôle d'oiseau et son nouveau film (sa troisième réalisation) lui permet de faire un peu plus son nid au sein de la « formidable fratrie » qu'est le cinéma français. Car Polisse est le fruit du talent de sa réalisatrice et de son casting d'ensemble parfaitement choisi et dirigé constitué de Joey Starr, Karin Viard et Marina Foïs.

La star joey

L'une des marques formelles de fabrique de Maïwenn c'est bien la pléiade d'acteurs et d'actrices qui traverse ses films façon choral kaléidoscopique. Polisse encore plus que Le bal des actrices d'ailleurs qui souffrait au demeurant d'un récit bien trop éclaté pour mettre suffisamment en valeur tous les personnages. En prenant ici pour cadre la BPM (Brigade de Protection des Mineurs), la réalisatrice s'astreint du coup à une unité de lieux qui lui permet donc de donner franchement la parole à chacun.

À commencer par celui que l'on ne voyait que trop peu dans son précédent film, the one and only Joey Starr. Incroyable de présence et de charisme, l'ex-rappeur des NTM vampirise l'image et endosse avec maestria le premier rôle que lui offre Maïwenn certainement autant surprise que ravie de l'effet bœuf qu'il produisit dans son précédent film. Son personnage, à la fois touchant et minéral, est le maillon fort et faible d'une équipe de flics en charge des affaires de pédophilie, de prostitutions de mineurs et autres maltraitances enfantines. Bref que du bonheur au quotidien pour des hommes et des femmes eux-mêmes parents ou en proie aux affres d'une vie privée pas toujours tendre.

 

Polisse : photoUn casting tout en talent

 

dans les yeux de maïwenn

Pour autant Polisse (titre à hauteur d'enfant) ne fait pas dans le misérabilisme d'un quotidien ultra noir et balisé. Non le film de Maïwenn alterne avec un naturel étonnant (proche de la naïveté ?) les séquences chocs souvent proche de la nausée avec celles hilarantes qui permettent à tout le monde de décompresser, spectateurs compris. D'une sincérité confondante (agaçante pour d'autres) on passe ainsi de la tragédie ordinaire à la comédia del arte avec en guise de transition les yeux embuées.

 

photo, JoeyStarrAu coeur de l'action et de la réalité

 

Bien entendu on pense à L.627. Tous deux se repaissent de faits avérés et sont filmés façon documentaire. Tous deux sont nantis d'une écriture sèche et de dialogues d'une rare violence communicative. Tous deux font l'état des lieux d'une police non pas à la dérive mais composé d'éléments aussi fragiles que la société qu'elle est censée défendre et protéger d'elle-même.

À la différence tout de même qu'il y a chez Polisse un point de vue devant la caméra qui se nomme justement Maïwenn. Impossible en effet pour celle qui se dit avoir subi une enfance difficile de ne pas se mettre en scène. C'est certainement la limite de l'exercice pour ceux qui ne voit en elle qu'une personne égocentrique et foncièrement exaspérante. Mais c'est étonnamment ici la force vitale d'un film qui ne s'embarrasse même pas du credo de son auteur. Elle comme les autres a son histoire dans l'histoire sans que celle-ci vienne phagocyter les autres.

 

Affiche

Résumé

Film funambule qui ne confirmera pour les uns qu'une posture formelle de plus, Polisse sera surtout pour d'autres à la croisée des chemins d'un cinéma d'une rare vitalité au sein d'un paysage cinématographique de plus en plus codifié, pince fesse et tire au cul. Avec Polisse c'est en pleine face qu'on se prend un sacré film prouvant que le cinéma français bouge encore. Amen !

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Lecteurs

(2.9)

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commentaires
Sascha
23/01/2023 à 14:27

Wow 2,5 par les lecteurs. Ca fait mal.
Super film qui retourne bien l'estomac...

Kyle Reese
15/06/2022 à 14:50

@Cidjay

Les gens changent, évoluent, il s'est assagit, a grandit. Dommage de s'arrêter à une partie de sa vie. Le parcours de Joy Star est assez incroyable, et il dégage quelque chose d'assez unique.
En tout cas il est très bon dans le film.

Cidjay
15/06/2022 à 13:27

Joey Starr en flic, c'est l'hôpital qui se fout de la charité.
Le mec à passer sa vie à chier sur la gueule des flics pour pour au final retourner sa veste contre un gros billet.
Rien que pour ça je ne verrais jamais ce film... je ne supporte pas ce mec...
c'est du pur militantisme personnel.
ou alors j'attends la version expurgée "WithoutJoeyStarrCut".

Kojak
15/06/2022 à 09:52

Un ami dirigeait la brigade des mineurs d'une grande ville. Toute son équipe (et lui aussi) a trouvé le film très réaliste par rapport à leur quotidien.

Anderton
15/06/2022 à 08:14

Revu hier soir donc... Je trouve le film très bon si ce n'est le personnage de Maiwenn, très clichée voire énervante cette bobo parisienne qui vient se confronter à la réalité sociale...
Après je ne sais que penser de Maiwenn en tant que réalisatrice; est-elle si douée notamment dans sa direction d'acteurs ou bien sait-elle seulement s'entourer des très bons/meilleurs...

JamesCr
14/06/2022 à 23:43

Un film qui retourne les esprits et les estomacs.

La scène d'engueulade entre Marina Fois et Karine Viard est tellement criante de réalisme qu'elle devient gênante car on s'y croit.

Prévoyez une tablette de chocolat pour vous remonter le moral après le film.

Kyle Reese
14/06/2022 à 21:19

Vu sur le tard car ayant eu bcq d’apriori sur le film et l'actrice réalisatrice à l'époque, elle m'énervait un peu quoi. C'est pas bien ça ... bref, beaucoup aimé au final. Poignant. Une grande directrice d'acteur.

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