Critique : La Révélation

Eric Provot | 9 février 2010
Eric Provot | 9 février 2010

Le risque avec un film politique ou judiciaire, c'est d'emmêler l'histoire dans les rouages complexes du système... Et de perdre le spectateur en route. Hans-Christian Shmid réalisateur, allemand du film La Révélation, a pourtant décidé de compliquer les choses. Il livre un film ou politique et judiciaire se côtoient. Une procureure au tribunal international de La Haye se voit attribuée un nouveau dossier. Le procès du général Goran Duric, candidat sérieux à la présidence serbe, pour crimes contre l'humanité. Mais le témoin pouvant affirmer la culpabilité de Duric livre des déclarations mensongères. Il discrédite ainsi toute l'accusation menée contre le général serbe. Mais, un espoir réside en la personne de Mira, sœur du témoin, qui aurait le témoignage accablant le général.

Force est de constater que le réalisateur s'est informé sur le sujet. Les rouages du tribunal international y sont présentés avec une certaine précision. Mais pas aux dépens de l'histoire... et de ses personnages. Car le film n'est pas seulement un thriller, comme l'annonce l'affiche du film. C'est aussi un drame. L'histoire de deux femmes. L'une (Kerry Fox) est procureure et vient de rater une promotion. Elle met alors toute son énergie dans ce procès contre un général serbe, quitte à aller contre le système. L'autre, interprétée par Anamaria Marinca vue dans 4 Mois, 3 semaines et 2 jours, est une femme fuyant un passé éprouvant. Et c'est là la force du récit de Schmid. D'intégrer l'histoire personnelle dans la grande histoire. Il fait un récit à taille humaine. Il dépeint ainsi les motivations et émotions humaines au centre du processus judiciaire qui peuvent le gripper : la difficulté de témoigner, les ambitions personnelles, les jeux d'influences...

L'humanité du récit est rendue possible par les acteurs. Avec en tête le duo d'actrices principales. Kerry Fox est parfaite en procureure stricte en plein remise en cause. Quant à Anamaria Marinca, elle est formidable de retenue. En particulier, lors de la scène poignante de son premier témoignage.

Le contexte politique ou judiciaire n'est pas pour autant laissé de côté. Le réalisateur se permet un constat lucide sur le fonctionnement d'un tel tribunal. Pour résumé : il n'est pas si simple de condamner un criminel de guerre. Entre les problèmes de financement, de procédure et d'influences, une telle institution a bien du mal à rendre la justice. La sacrosainte Union Européenne en prend même pour son grade dans ce film.

Bien sûr, du point de vue du thriller le contrat est également rempli.  Le rythme est soutenu. L'alternance de scène purement judiciaires ou d'investigation et de moments plus humains aide énormément. Les voyages fréquents de Kerry Fox participent également à ce rythme. La procureure « court » entre les avions, les hôtels et le tribunal. Le tout soutenu par une réalisation type documentaire avec caméra à l'épaule. Qui peut choquer un peu au début mais qui s'avère un véritable allié au récit et au réalisme voulu par le réalisateur. La Révélation est un thriller intelligent à dimension humaine bien mené. Il nous en faudrait plus comme ça.

Résumé

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