Critique : Whisky Roméo Zulu

Damien Vinjgaard | 28 juin 2005
Damien Vinjgaard | 28 juin 2005

Astucieux film que la première œuvre de Enrique Piñeyro. À première vue, c'est un solide suspense à mi-chemin entre Révélations et Y-a-t-il un pilote dans l'avion ? (pour le côté aérien) concocté par un réalisateur qui se réserve le premier rôle. Avec quelques lenteurs, il décrit le parcours d'un pilote d'avion qui s'évertue à dénoncer l'insécurité de sa compagnie aérienne et de l'espace aérien argentin. Un combat qui ne va pas sans tracas, ni sueurs froides jusqu'à la fin. Cette fin si particulière, presque unique au cinéma puisqu'elle montre des images issues des chaînes de télévision argentines dans lequel on voit le réalisateur et donc l'acteur parler, témoigner de son expérience. Sans s'en rendre compte, le réalisateur nous a amené de la fiction au documentaire, de ce que l'on ne voit pas à ce que tout le monde a vu : le crash d'un avion survenu en 1997 en Argentine.

Retour en arrière. Enrique Piñeyro raconte donc sa propre histoire. Il a véritablement été cet homme qui a lutté envers et contre tous pour que soit respecter des normes de sécurité essentielles. Son film est alors un témoignage essentielle sur les enjeux du métier de pilote de ligne et sur les coulisses de ce qui a amené à une des catastrophes aériennes les plus importantes en Argentine. Il livre une réflexion profonde sur la responsabilité et le devoir des hommes du ciel dans un pays en proie à l'ultralibéralisme. Que représente en effet un humain dans le transport aérien ? Quelques choses de plus qu'un consommateur ? Sa démonstration des problèmes que pose la mondialisation dans des secteurs où les vies sont en jeu est alors imparable, glaçante même.

Mais le réalisateur va au-delà du simple réquisitoire et questionne les propres motivations qui ont mené les pilotes à jouer avec leurs destins. Là s'explique alors la faiblesse rythmique du film. Ce décrochage inopiné dans l'enfance et l'histoire d'amour qui déboule de façon impromptue. Dispositif fictionnel un peu balourd qui permet pourtant d'évoquer la relation quasi-charnelle qui unit les voyageurs du ciel avec leurs véhicules. Car, il est également là le problème, dans ce plaisir trop grand pour être raisonnable que les commandants de bord ont de s'envoyer en l'air. En cela, les plans de cockpit sont de magnifiques déclarations d'amour sur la sensation de légèreté que ressentent les aviateurs lorsqu'ils ont la tête dans les nuages.

En abordant l'Argentine de haut, en restant aérien, Whisky Romeo Zulu s'impose donc comme une œuvre atypique dans un cinéma âpre, rude et parfois borné dans l'auteurisme. Un suspense inattendue et accessible autant qu'une véritable mise à nue d'un vécu. Un beau film quoi !

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